Les cinq "terroristes" déchus de la nationalité se mobilisent

Deux passeports français.
Deux passeports français. © RAMZI HAIDAR / AFP
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CB avec AFP , modifié à
Les cinq amis d'enfance, qui se disent "rangés" et "réinsérés", estiment que leur déchéance de nationalité est une "décision politique".

Ils se disent "rangés" et "réinsérés". Mais pour le gouvernement, ce sont des "terroristes". Cinq amis d'enfance, qui ont purgé leur peine pour leurs liens avec les auteurs des attentats de Casablanca en 2003, estiment que leur déchéance de nationalité est une "décision politique". Fouad Charouali, Rachid Aït El Hadj, Bachir Ghoumid, Redouane Aberbri et Attila Turk, devenus français entre 1991 et 2001, s'apprêtent à contester leur déchéance de la nationalité devant le Conseil d'État.

Condamné pour leurs liens avec les attentats de Casablanca. Ces hommes âgés de 38 à 41 ans, quatre Franco-Marocains et un Franco-Turc, originaires des Mureaux et de Mantes-la-Jolie, ont été condamnés en 2007 à des peines de six à huit ans de prison pour leur "participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un acte terroriste". Ils étaient notamment jugés pour leurs liens plus ou moins directs avec le Groupe islamique combattant marocain, responsable des attentats de Casablanca du 16 mai 2003 : 45 personnes avaient été tuées, dont trois Français, et une centaine blessées dans plusieurs attaques.

"On est des enfants de la France". Leurs avocats, Jean-Pierre Spitzer et William Bourdon, les ont réunis jeudi pour une conférence de presse, au cours de laquelle ils ont brossé le portrait de "pères de famille" travailleurs, "parfaitement rangés et réinsérés". Des agents de voyages, électricien, technicien de maintenance, vendeur, dont l'un a créé son entreprise.

Barbe en collier et chemise à carreaux, l'un d'entre eux dit s'exprimer pour tous: "On est des enfants de la France, bien intégrés, on nous colle l'étiquette de terroriste pour faire passer dans l'opinion qu'on est des pestiférés, mais on se battra."

"Une opération politique". Les déchéances de nationalité française, publiées au Journal officiel le 7 octobre, ont été demandées par le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve. "Une double peine", selon les avocats, et le début d'une "mort civile, sociale et professionnelle, suivie d'une destruction de la famille" en cas d'expulsion.

Derrière les décrets, les avocats dénoncent aussi "une opération politique" et "démagogique", à l'approche des élections. "La diabolisation qu'on veut organiser auprès de l'opinion passe par une manipulation de l'opinion", a fustigé Me Bourdon.

Pourquoi eux et pourquoi maintenant ? La décision du ministère ne tient "pas au hasard", assure pourtant une source proche du dossier : les services spécialisés "ont déterminé avec précision leur degré de dangerosité et leurs liens éventuels avec des dossiers judiciaires à caractère terroriste en cours".

L'un d'eux, Rachid Aït El Haj, apparaît dans les investigations sur l'affaire Sid Ahmed Ghlam, soupçonné d'avoir voulu attaquer une église de Villejuif, mais rien, à ce stade, ne le met en cause, selon une autre source proche du dossier.