Jugée après le crime d’un patient

Danièle Canarelli, une psychiatre marseillaise, comparaîtra le 13 novembre prochain devant le tribunal correctionnel des Bouches-du-Rhône pour "homicide involontaire" après le crime commis par Joël Gaillard, un de ses patients, en 2004.
Danièle Canarelli, une psychiatre marseillaise, comparaîtra le 13 novembre prochain devant le tribunal correctionnel des Bouches-du-Rhône pour "homicide involontaire" après le crime commis par Joël Gaillard, un de ses patients, en 2004. © MaxPPP
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Frédéric Frangeul avec Chloé Triomphe et agences , modifié à
Joël Gaillard avait assassiné un retraité en 2004. Sa psychiatre n’avait pas décelé sa schizophrénie.

Elle est la seule psychiatre à ne pas avoir diagnostiqué de schizophrénie chez Joël Gaillard, ce patient qu'elle suivait, auteur de l'assassinat d'un retraité en 2004. Danièle Canarelli, une praticienne du centre Edourd-Toulouse de Marseille, comparaîtra le 13 novembre prochain devant le tribunal correctionnel des Bouches-du-Rhône. Elle est  poursuivie pour "homicide involontaire".

"Des fautes multiples et caractérisées"

Danièle Canarelli devra se défendre devant la justice de "fautes multiples et caractérisées" ayant "conduit au passage à l’acte violent de Joël Gaillard". Les enquêteurs reprochent à la psychiatre d’avoir minimisé la dangerosité de son patient.

Missionné par la justice après une plainte du fils de la victime, le docteur Archambault a souligné que la psychiatre s’était obstinée à noter l’absence de schizophrénie chez Joël Gaillard, contrairement à tous les spécialistes qui l’avaient examiné depuis 2000, comme le souligne Le Parisien jeudi. Un "déni", selon cet expert psychiatrique, qui a conduit au drame pour lequel le schizophrène a été jugé irresponsable, en 2005, en raison de sa maladie.

"Elle s'est trompée"

Selon Michel Trabuc, le fils de la victime, "la violence est montée crescendo jusqu'à la mort de mon père. Si Joël Gaillard avait été soigné efficacement par la psychiatre qui le suivait depuis plusieurs années, je pense qu'on aurait pu éviter cela", a-t-il assuré au micro d'Europe 1.

"Il était interné d'office et après on lui a admis des sorties à l'essai. Ce sont les psychiatres qui ont estimé qu'il pouvait sortir. Je pense que la psychiatre qui le suivait s'est trompée. C'était son médecin traitant. Elle le suivait depuis plusieurs années et elle n'a pas diagnostiqué sa vraie maladie. Je pense qu'elle était dans le déni le plus total. On ne doit pas lâcher comme ça les gens dans la nature", a-t-il déploré.

"Aucune précaution particulière" autour du patient

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Entre février 2000 et septembre 2001, Joël Gaillard avait fait l’objet de quatre placements d’office qui ont été systématiquement levés par Danièle Canarelli. A chaque fois, ces sorties se sont soldées par des incidents : des violences, un incendie volontaire ou même une tentative d’assassinat en mai 2001.

La juge d’instruction en charge du dossier déplore qu’"aucune mesure de précaution particulière" n’ait été prise autour de Joël Gaillard". Ce dernier s’échappera de l’hôpital et assassinera Germain Trabuc à coups de hachette à Gap le 9 mars 2004.

Les psychiatres inquiets

Pour Me Chemla, avocat des parties civiles, "la problématique que pose ce procès celle de la responsabilité du médecin psychiatre, chef de service d'un hôpital, à qui on remet un malade mental parce qu'il est dangereux", explique-t-il sur Europe 1. Selon lui, Danièle Canarelli n’a pas pris "la mesure de la dangerosité et de la gravité de l'état du patient".

De son côté, la psychiatre serait très meurtrie par cette affaire, selon ces collègues. Au sein de l’hôpital, le personnel redoute que le procès conduise les psychiatres à ne plus oser poser de diagnostic dans une discipline particulièrement délicate.