Bébés congelés : de nombreuses zones d'ombre

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avec Pierre de Cossette et AFP , modifié à
Le père a découvert un premier nouveau-né dans un sac isotherme, quatre autres corps de nourrissons ont été retrouvés dans un congélateur. La mère a reconnu avoir accouché secrètement.

Si les faits sont avérés, il s'agirait de la plus grave affaire d'infanticide depuis cinq ans. Jeudi, des gendarmes appelés par un père de famille sous le choc ont découvert le cadavre de cinq bébés. L'un se trouvait dans un sac isotherme, les autres dans un congélateur du pavillon familial de Louchats, un village situé dans le sud de la Gironde. Selon les informations recueillies par Europe 1, la mère, qui n'a pas encore été entendue, aurait toutefois reconnu, très brièvement, avoir accouché secrètement il y a deux jours. Son conjoint, qu'elle n'aurait pas informé, est entendu depuis jeudi soir sous le statut de la garde à vue. 

Un premier bébé dans un sac isotherme. C'est le père de famille, qui à ce stade de l'enquête, semblait ignorer les grossesses successives de sa femme, qui a découvert un premier cadavre de nourrisson. Il est 7 heures du matin quand il tombe sur un sac isotherme situé dans une des chambres de la maison. A l'intérieur : le corps d'un nouveau-né, pas encore congelé. Au moment de la découverte, les deux filles du couple, âgées de 14 et 17 ans, se trouvent dans la maison. L'homme, dévasté, appelle directement les gendarmes.

20.03 La maison du couple où les cinq corps de bébés ont été découverts le 19 mars 205, à Louchats, en Gironde. 1280

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Une information judiciaire ouverte samedi. Au terme d'une longue perquisition, les militaires découvrent quatre autres corps de bébés. Ces nouveaux cadavres se trouvaient dans un congélateur du pavillon. Après la découverte des faits, les époux ont été placés en garde à vue. Entendu jeudi en fin de soirée, le père de famille, âgé de 40 ans, assure n'avoir été au courant de rien. Orientée vers le CHU de Bordeaux pour des examens, la mère a ensuite été dirigée vers un centre psychiatrique. Sa garde à vue, incompatible avec son état de santé, a été pour l'heure levée.

Celle du père a revanche été prolongée de 24 heures, vendredi matin. L'homme a "fait état de sa surprise" et "manifesté un certain abattement", mais l'enquête n'a pas encore permis de savoir s'il était au courant de cet accouchement et de la présence des quatre autres enfants dans le congélateur. Une information judiciaire, qui sera ouverte samedi, "devra établir la part de chacun. Pour l'heure rien n'est établi", a souligné le procureur de la République adjoint de Bordeaux, Anne Kayanakis.

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Le premier bébé est né viable. L'autopsie pratiquée sur le premier corps retrouvé a révélé que l'enfant, de sexe masculin, est né viable. Cependant "on ne peut pas dire encore si c'était une naissance à terme, et des analyses devront déterminer s'il a vécu après l'accouchement" qui s'est produit mardi soir, a précisé vendredi la magistrate. "Il n'est pas mort-né. La question est de savoir s'il a vécu", a-t-elle précisé. "Il faut des investigations complémentaires pour déterminer s'il a respiré après l'accouchement, ce qui peut avoir une conséquence sur la qualification des faits." Les autopsies des quatre autres nouveau-nés découverts dans un congélateur auront lieu samedi.

Aucun signe de grossesse décelé dans le village. La famille n'était pas connue des services judiciaires ni de l'assistance éducative du juge des enfants, a souligné le parquet. De nombreuses zones d'ombre subsistent dans cette affaire, notamment sur le fait de savoir si la grossesse de la mère, âgée de 35 ans et employée chez un pépiniériste, décrite par beaucoup comme menue et "toute maigrichonne, à peine 50 kg", a pu passer inaperçue. "Je l'ai vue à une fête il y a trois semaines", affirme un proche du père. La femme présentait-elle des signes de grossesse? "Rien, rien du tout !" répond-il, ajoutant : "c'est triste pour elle, c'est surtout elle qui est à plaindre."

"Une famille de travailleurs". "Si ce que vous me dites est avéré, on est très ému et choqué. Ce sont des citoyens qui travaillent, qui se lèvent le matin et qui vont travailler. Dans les petites communes on connaît tous les habitants, c'est un petit village rural. On les connaissait, c'est une famille de travailleurs", a réagi au micro d'Europe 1 le maire de Louchats, Philippe Carrère. "Elle, on la voyait pas très souvent, je ne l'ai jamais vue enceinte! C'est pour ça que j'ai été surpris", explique pour sa part Michel Olivier, retraité qui habite la maison située en face de celle du couple.