Fraude de 238 millions d'euros à la "taxe carbone" : jusqu'à 10 ans de prison requis

© PHILIPPE HUGUEN / AFP
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avec AFP , modifié à
Ils sont soupçonnés d'avoir orchestré une fraude massive sur le marché des quotas d'émission de CO2. Ils auraient ainsi détourné des millions d'euros de TVA.

Des peines allant jusqu'à 10 ans de prison et un million d'euros d'amende, le maximum prévu, ont été requises mercredi au procès d'une affaire d'escroquerie à la TVA sur le marché de quotas d'émission de CO2 portant dans ce dossier sur 283 millions d'euros.

Plusieurs millions d'actifs déjà confisqués. La peine maximale a été requise à l'encontre des trois principaux prévenus: le financier Arnaud Mimran, Marco Mouly et le courtier polonais Jaroslaw Klapucki. Le parquet national financier (PNF) a également requis à l'encontre des prévenus une mesure de "confiscation générale" en valeur, à hauteur de 263 millions d'euros. Le PNF a requis la confiscation de 20 millions d'euros d'actifs déjà saisis. Des "peines sévères", a souligné le procureur Patrice Amar, pour ce "vol dans la poche du peuple". Contre les autres prévenus, les réquisitions vont de deux ans de prison, contre une "gérante de paille" d'une société, à six ans de prison et un million d'euros d'amende.

"La voiture balai" du protocole de Kyoto. En préambule d'un réquisitoire à deux voix, le procureur Bruno Nataf a rappelé les sommes "vertigineuses" de TVA éludées au total dans la fraude sur le marché des quotas d'émission de CO2, qui font l'objet de plusieurs dossiers judiciaires: 1,6 milliard d'euros en France, 6 milliards à l'échelle de l'Union européenne. "L'Etat ne recouvrera à mon sens jamais les 283 millions d'euros" dont il est question dans ce procès, a-t-il déclaré. "Nous sommes la voiture-balai d'une sorte de naïveté du protocole de Kyoto" sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre, a-t-il poursuivi, soulignant que la mise en oeuvre des quotas d'émission de CO2, ces droits à polluer, par l'Union européenne, "s'est faite sans analyse des risques".

La TVA n'était jamais versée à l'Etat. L'escroquerie consistait à acheter des quotas hors taxe dans un pays étranger, avant de les revendre en France à un prix incluant la TVA, puis d'investir les fonds dans une nouvelle opération. La TVA, elle, n'était jamais reversée à l'État. Ces opérations se faisaient grâce à des sociétés dont "le véritable objet social" n'était que de "capter de la TVA", selon Bruno Nataf. Devant l'ampleur de la fraude, les opérations ont été exonérées de TVA en juin 2009 en France. "L'Etat a été prompt à réagir", "surtout, l'Etat français a été le premier à réagir", a expliqué Bruno Nataf, avant de rappeler qu'à la suite de cette décision, "les fraudeurs" ont sévi dans d'autres pays. 

Le procureur a également évoqué le "climat de violence, de menace" qui entoure cette affaire. Un des organisateurs présumés de la fraude, Samy Soueid, a été assassiné en 2010 Porte Maillot à Paris.