Affaire du Carlton de Lille : l'heure du jugement pour Dominique Strauss-Kahn

dominique strauss-khan 1280 DSK carlton
© AFP
  • Copié
C.P.-R. avec AFP , modifié à
L’ancien patron du FMI, Dodo la Saumure et les douze autres suspects dans cette affaire de proxénétisme aggravé vont être fixés sur leur sort, vendredi.

Fort de la relaxe requise à son égard par le parquet, Dominique Strauss-Kahn sera bien présent pour écouter le jugement du tribunal correctionnel de Lille, vendredi matin. Treize autres prévenus se retrouvent en compagnie de l'ancien patron du Fonds monétaire international (FMI) pour l’épilogue de cette affaire de proxénétisme dite du Carlton de Lille qui avait éclaté en octobre 2011 faisant les choux gras de la presse.

 

Strauss-Kahn relaxé

Poursuivi pour proxénétisme aggravé, Dominique Strauss-Kahn a été relaxé vendredi en correctionnelle dans l'affaire dite du Carlton de Lille. Le tribunal a estimé qu'il avait eu "un comportement de client non répréhensible par la loi pénale". L'écrasante majorité des prévenus a également été relaxée, à l'exception de René Kojfer, ancien responsable des relations publiques du Carlton, condamné à un an de prison avec sursis. Même le tenancier assumé de maisons closes en Belgique, Dominique Alderweireld, alias Dodo la saumure, a été relaxé alors qu'il était le seul prévenu contre qui le parquet avait requis de la prison ferme, lors du procès en février dernier.

Relaxe requise pour DSK. Depuis sa comparution et les trois semaines d’audiences qui se sont tenues en février dernier, le principal protagoniste de l’affaire a tenté de se faire discret et d’échapper aux médias. C’est en mars 2012 que DSK avait été mis en examen dans ce scandale sexuel pour proxénétisme aggravé. Si le non-lieu requis par le parquet fournit aux avocats de l’ancien favori socialiste de la présidentielle 2012 un motif d'optimisme, ces derniers ont choisi de ne pas s'exprimer avant l'échéance.

Et pour le grand flic Lagarde. Outre la relaxe "pure et simple" requise au sujet de Dominique Strauss-Kahn par le procureur de la République, l'ex-chef de la sûreté urbaine du Nord Jean-Christophe Lagarde a aussi bénéficié des doutes des magistrats quant à l'accusation de proxénétisme. La défense de cet ancien adjoint de Michel Neyret aux stups de Lyon - comme celle de Dominique Strauss-Kahn - avait pilonné l'instruction qui soupçonnait Lagarde d’avoir joué les organisateurs de parties fines dans l’espoir d’un retour d’ascenseur, si DSK emportait la présidentielle de 2012. La défense avait dénoncé une instruction faisant de leur client "un marche-pied" pour étayer l'hypothèse d'un réseau proxénète organisé autour de DSK, surnommé "le roi de la fête".  

DSK, libertin mais pas proxénète. Si DSK n'a jamais nié sa participation à des soirées libertines, il a martelé lors du procès qu'il ignorait la qualité de prostituées, embauchées et payées par des amis, de certaines femmes qu'il rencontrait. Et les trois semaines d’audience n’ont pas permis de prouver que Dominique Strauss-Kahn avait bien connaissance de leur réelle profession ou ait été témoin de la moindre rémunération de ses jeunes femmes.

2 ans de prison avec sursis requis contre David Roquet et Fabrice Paszkowski. Quant aux deux entrepreneurs nordistes Fabrice Paszkowski et David Roquet, amis du « roi de la fête », le ministère public avait requis contre eux deux ans de prison avec sursis et 20.000 euros d'amende. Les deux hommes soupçonnés d’avoir co-organisé des soirées libertines avec des prostituées s’étaient défendu en affirmant n'avoir été que de simples clients de la prostitution. David Roquet, ex-directeur de la société Matériaux Enrobés du Nord, une filiale du groupe de BTP Eiffage dans le Pas-de-Calais, est notamment suspecté d'avoir réglé, au titre de frais professionnels, des dépenses liées à des soirées libertines avec des prostituées, auxquelles participait DSK.

15 mois de prison avec sursis requis contre René Kojfer. Et puis il y a ceux par qui tout a commencé, les fameux "hommes du Carlton". Parmi eux, René Kojfer, ancien chargé des relations extérieures de l'hôtel de luxe, qui fut le premier protagoniste du dossier à être mis en examen, en octobre 2011. "Il a été moralement et personnellement touché de cette incrimination quand même relativement infamante, de se voir poursuivre pour des faits de proxénétisme", relate l’avocat Hubert Delarue, à propos son client de 73 ans. L’homme aurait été l’instigateur du réseau du Carlton, mettant en relation prostituées et entrepreneurs de la région. Quinze mois de prison avec sursis et 2.500 euros d'amende ont été requis à son encontre.

Prison ferme réclamée contre "Dodo". Mais surtout, il y a son ami d'enfance, Dominique Alderweireld, alias "Dodo la Saumure". Ce prévenu haut en couleur est le seul contre qui de la prison ferme, un an, a été requis -outre une amende de 10.000 euros-, compte tenu de ses antécédents judiciaires. Propriétaire de plusieurs établissements de prostitution en Belgique le long de la frontière française, il est suspecté d'avoir envoyé depuis la Belgique des prostituées dans la région lilloise, ainsi qu'à Paris et aux États-Unis. Sa compagne et partenaire en affaires, Béatrice Legrain, est accusée des mêmes faits.

La voix des prostituées entendue. Plus prolixes que la défense, les parties civiles se sont, de leur côté, d'ores et déjà félicitées de la parole donnée aux prostituées venues témoigner à la barre en février dernier. "Les réquisitions demandent la relaxe pour la quasi-totalité des prévenus. Le Mouvement du Nid reste partie civile. On attend avec sérénité et impatience la décision", a confié Me Emmanuel Daoud, conseil de cet organisme spécialisé dans la défense des prostituées.

"On peut au moins se féliciter de l'écho de ce procès dit du Carlton puisqu'en deuxième lecture, on a réintroduit la pénalisation des clients sur le projet de loi" destiné à renforcer la lutte contre la prostitution, ajoute l'avocat. Ironie de l'actualité, ce projet de loi sur la prostitution sera examiné le même jour à l'Assemblée, vendredi.