Acquittés d’Outreau à la barre : "on ne devrait pas être là"

Karine Duchochois, l'une des dix acquittés de l'affaire OUtreau, venue témoigner au procès de Daniel Legrand fils.
Karine Duchochois, l'une des dix acquittés de l'affaire OUtreau, venue témoigner au procès de Daniel Legrand fils. © DAMIEN MEYER / AFP
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Lionel Gougelot avec CB
Karine Duchochois raconte son incompréhension d’être entendue à la barre pour défendre Daniel Legrand, jugé pour des faits de viols pour lesquels il a été acquitté il y a dix ans.

Ils sont tous venus témoigner, mais ne comprennent pas la tenue de ce troisième procès dans l’affaire Outreau. Alors que la dernière semaine du procès de Daniel Legrand fils a débuté à Rennes, dix des treize acquittés du plus grand fiasco judiciaire français défilent à la barre lundi et mardi. Entre colère, tristesse et amertume, les acquittés ont raconté leur incompréhension d’avoir été impliqués dans cette affaire de pédophilie, il y a plus de 10 ans. Tous ont affirmé avoir la certitude de ne pas connaître Daniel Legrand fils, jugé devant la cour d'assises des mineurs d'Ille-et-Vilaine pour des viols qu'il aurait commis alors qu'il avait moins de 18 ans. Des faits identiques à ceux pour lesquels il a été acquitté en 2005.

"Ce procès ne devrait pas avoir lieu". Karine Duchochois, une des acquittés de l’affaire Outreau, aujourd’hui chroniqueuse justice à France Info, estime que ce troisième procès n’aurait jamais dû avoir lieu. "Je ne comprends pas ce que je fais là. On ne devrait pas être là. Ce procès ne devrait pas avoir lieu. On joue sur des dates. Daniel Legrand a été jugé, on ne devrait pas être là", martèle l’ex-compagne de David Brunet, un autre acquitté de l’affaire.

"Ces gens qui n’acceptent pas que l’on puisse dire qu’ils ont commis autant d’erreurs". Pour Karine Duchochois, la tenue de ce troisième tient du fait de l’acharnement judiciaire de certaines associations malintentionnées. "Derrière tout ça, il y a cette association, ces syndicats, qui ont voulu, avant que l’on ne puisse plus parler d’Outreau, avant qu’il y ait prescription dans trois ans, remettre dans la tête de tout le monde : ‘vous voyez, à Outreau, ils ne sont pas tous aussi innocents que ça. Ces gens qui n’acceptent pas que l’on puisse dire qu’ils ont commis autant d’erreurs. Pour moi, ce sont ces gens-là qui ont emmené ces enfants ici", estime la mère de famille de 37 ans.

"Ces enfants, je ne leur en veux pas du tout". Car, aujourd’hui, Karine Duchochois n’en veut pas aux enfants, notamment aux quatre fils Delay, qui, en 2001, ont été à l’origine de l’affaire Outreau, en accusant une vingtaine de personnes de viols. Finalement, 13 des 17 accusés avaient été acquittés au terme de deux procès, en 2004 et 2005 à Saint-Omer. "Ces enfants, je ne leur en veux pas du tout, je l’ai dit. Ce sont des enfants qui ont vécu des choses horribles, qui ont très certainement, à un moment, mélangé la vérité et le mensonge, qui sont aujourd’hui manipulés", commente-t-elle encore.

"C’est utile que les acquittés viennent". Aujourd’hui, la mère de famille qui tente de renouer un lien avec son fils qui lui avait été enlevé dès sa mise en examen, espère que les jurés prendront toute la mesure de ce qu’ont vécu les acquittés d’Outreau. "C’est utile que les acquittés viennent, pour que les jurés entendent et voient ce que l’on a vécu. S’il est condamné, il y a vraiment un problème avec notre justice", s’alarme-t-elle. Et de répéter encore une fois, pour être sûre que le message passe : "Moi, j’ai dit à Daniel Legrand qu’il ne fallait pas qu’il se fasse de souci, parce que tout le monde sait très bien qu’il ne devrait pas être là."