Ce qu’il faut savoir sur le compte pénibilité

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Alexis Toulon et Olivier Samain , modifié à
POLEMIQUE - Manuel Valls a provoqué la fureur de la CFDT en revenant sur le compte pénibilité. La conférence sociale s’annonce explosive.

A quelques jours de la conférence sociale, les partenaires sociaux se déchirent sur le compte pénibilité. Afin de s’assurer de la présence du patronat à la table des négociations, Manuel Valls a annoncé un report partiel de sa mise en place, provoquant la colère de la CFDT. Quels sont les enjeux de la création de ce compte pénibilité et qu’est-ce qui se cache derrière cette mesure ? Europe 1 fait le point.

Pourquoi avoir créé un compte pénibilité ?

Le compte pénibilité a été mis en place à la demande des syndicats dans le cadre de la réforme des retraites menée par Jean-Marc Ayrault, voté en janvier 2014. Celui-ci avait été mis en place sous l’impulsion de la CFDT pour compenser l’augmentation de la durée de cotisation et le passage de l’âge de départ à la retraite de 60 à 62 ans. Ce compte est ouvert de manière individuelle et devait être mis en place dès le 1er janvier 2015.  Selon le ministère de la Santé, la pénibilité concerne environ un salarié sur cinq, soit “plus de 100.000 personnes” partant en retraite chaque année.

Comment ça marche ?

Les salariés dont le travail ouvre le droit à un compte pénibilité vont totaliser des points en fonction de seuils annuels. Autrement dit, plus une personne va travailler dans un cadre de risque professionnel, plus il va totaliser des points. Cela peut être par exemple un maçon ou un déménageur qui porte des charges de plus de 15 kg au moins 600 heures dans l’année. Ou un peintre en bâtiment qui travaille accroupi ou les bras en l’air au moins 900 heures par an. Ceux-ci le suivront tout au long de sa carrière et lui permettront de financer, à sa discrétion, une formation lui permettant d’accéder à un emploi moins pénible, une réduction du temps de travail avec compensation de la perte de salaire ou une anticipation de l’âge de départ à la retraite (limitée à deux ans, soit huit trimestres).

Quels sont, à la base, les facteurs de pénibilité ?

Les facteurs de risques professionnels ont été inscrits dans le Code du Travail, suite à des négociations entre les partenaires sociaux en 2008. Voici les dix éléments qui ont été retenus pour ouvrir le droit à un compte pénibilité.

-          Les manutentions manuelles de charges

-          Les postures pénibles (positions forcées des articulations)

-          Les vibrations mécaniques

-          Les agents chimiques dangereux

-          Les activités exercées en milieu hyperbare

-          Les températures extrêmes

-          Le bruit

-          Le travail de nuit

-          Le travail en équipe successive alternantes

-          Le travail répétitif (répétition d’un même geste, à une cadence contrainte  avec un temps de cycle défini)

Comment ça doit être mis en place ?

La mise en place de ce système est jugé comme extrêmement complexe par le patronat, d’où la menace d’un boycott de la conférence sociale par le Medef. Le rapport de Michel de Virville, conseiller-maître à la Cour des comptes, a simplifié les procédures. Dans un premier temps, la direction devait apprécier au jour le jour les seuils à partir desquels le salarié commençait à accumuler des points. Finalement, cette procédure n’aura lieu qu’une fois par an. Et ne devrait pas être contraignante, Michel de Virville assure que les chefs d’entreprise ont déjà une idée assez exacte de la durée d’exposition de leurs salariés à ces travaux pénibles. De plus, il n’y aura aucun formulaire spécifique à remplir, la saisie se fera directement sur la fiche de paie.

Que devraient changer les annonces de Valls ?

L’intervention de Manuel Valls, destinée à installer à la table des négociations de la conférence sociale les syndicats patronaux, modifie le texte sur la pénibilité. Au 1er janvier 2015, ce ne sont pas 10 facteurs qui seront pris en compte, mais seulement quatre (travail de nuit, travail répétitif, travail posté et travail en milieu hyperbare). L’objectif étant « d'aboutir à une généralisation en 2016, dans les meilleures conditions", selon Manuel Valls. Une reculade du gouvernement qui a provoqué vendredi la fureur de Laurent Berger, le patron de la CFDT qui dénonce une « rupture en termes de dialogue social". Dans la foulée, la ministre des Affaires sociales, Marisol Touraine, a annoncé que les points acquis par les salariés au titre de la pénibilité seraient doublés dès 58,5 ans, au lieu de 59,5 comme initialement prévu.

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