Méga-contrat pour Boeing et Airbus en Iran, le conflit avec les Kurdes en Turquie : les experts d'Europe 1 vous informent

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SAISON 2016 - 2017, modifié à

Axel de Tarlé, Géraldine Woessner et Sophie Larmoyer font le point sur l'actualité du jour.

Axel de Tarlé, expert économie

Méga-contrat pour Boeing et Airbus en Iran (qui porte sur près de 200 appareils).  C'est le plus gros contrat depuis près de 40 ans (depuis la Révolution Islamique de 1979). L’Iran est-il revenu dans le jeu du commerce mondial ?

Non. Mais, ce qui pose problème en Iran, ce ne sont pas les Iraniens, mais les Américains, qui ont une position très floue, en matière d'embargo. Oui, l'embargo sur le nucléaire a été levé, (suite à l'accord de juillet 2015). Mais, les Américains maintiennent un embargo sur l'Iran, pour non-respect des droits de l'homme et soutien au terrorisme. Du coup, tout le monde est très prudent.

Boeing & Airbus ont bien signé. Mais, les 2 constructeurs ont pris soin - auparavant - d'obtenir un accord des autorités américaines. En revanche, vu ce flou - embargo/pas embargo - aucune banque européenne n'accepte de travailler avec l'Iran...de peur que de se retrouver - comme pour BNP Paribas - victime d'une méga-amende de 9 milliards de dollars parce qu'elle avait osé travailler avec des pays (Iran, Cuba, Soudan) que le congrès américain avait mis sous Embargo. Donc, sans banque, c'est très difficile de faire des affaires avec l'Iran.

Oui, En l'occurrence, quand on fait du business avec l'Iran, ça ne concerne pas les Etats-Unis, ça ne concerne pas de citoyen américain. La seule faiblesse (et c'est ce qui a piégé BNP Paribas), c'est d'utiliser le dollar, la monnaie américaine.

Un rapport parlementaire (Berger/Lellouche) a été rendu sur le sujet - avec deux préconisations :
 1/ utiliser l'euro - si possible - pour travailler avec l'Iran. 
 2/ aller au conflit avec les Etats-Unis. Il faut que l'Europe fasse bloc, et dénonce cette extra-territorialité de la justice américaine.

Sophie Larmoyer, experte internationale

La Turquie à nouveau confrontée à la violence aveugle, avec ce double attentat perpétré samedi soir à Istanbul. Ce sont clairement les policiers qui étaient visés, attaque revendiquée par un groupe radical kurde.

Ce que subissent les Turcs est terrible : c’est la 17e attaque en 1 an et demi ! Et il y a deux “fronts” en quelques sortes : les attentats sont le fait, soit des djihadistes de l’Etat islamique, soit des Kurdes du PKK, ce mouvement armé séparatiste, considéré comme organisation terroriste par la Turquie mais aussi par l’Union européenne et les Etats-Unis.

Le conflit avec les Kurdes, en Turquie, remonte à plus de 30 ans !

Oui, 30 ans et 40 000 morts… Mais il y avait un cessez-le-feu, fragile, qui a volé en éclats il y a un an et demi justement. Les affrontements ont donc repris en juillet 2015, ils sont quotidiens dans le sud-est du pays, à majorité kurde. Et pour se venger, les rebelles kurdes ciblent la police et l’armée turque dans les grandes villes de l’Ouest. En l’occurrence, le groupuscule qui revendique le double attentat de samedi est lié au PKK : il s’appelle le TAK, initiales pour Faucons pour la liberté du Kurdistan. Le TAK avait déjà revendiqué des attentats à Ankara et Istanbul en février, mars et juin qui avaient fait en tout 75 morts.

Donc ces attentats n’ont rien à voir avec l’autre aspect sécuritaire du moment en Turquie : la gigantesque purge que mène le président turc depuis le coup d’Etat manqué de juillet dernier ?

Sur le papier, rien à voir. Sauf que le président Erdogan se sert de l’état d’urgence pour élargir les purges, bien au-delà de la chasse aux putchistes. Il fait taire toute voix dissidente en emprisonnant des journalistes, des intellectuels, y compris des voix pacifiques pro-kurdes.

C’est-à-dire que sous couvert de lutte contre le terrorisme, Erdogan muselle toute opposition… 

Et consolide son pouvoir, qui devient dictatorial. D’ailleurs avant-hier, quelques heures avant les attentats, il transmettait au Parlement un projet de réforme constitutionnelle qui revient à concentrer le pouvoir dans les mains du président. Si tout se passe comme il l’espère, cette nouvelle Constitution lui permettra de régner sur la Turquie jusqu’en 2029.  

Géraldine Woessner pour le Vrai faux de l'info

La ministre du logement qui s'alarme, au lendemain d'un grave épisode de pollution : “Quand vous vivez à Paris, vous connaissez 3 jours d'air pur par an.”

On ne respire à Paris que 3 jours d’air pur par an. C’est vrai ou c’est faux ?

Cela dépend de comment on définit l’air pur. Un air exempt de dioxyde d’azote, de matières particulaires… Alors oui, Emmanuelle Cosse a raison : on ne respire un tel air que 3, 4 jours par an à Paris. Après de fortes pluies, en France il n'y a guère que dans une dizaine d'endroits qu'on trouve une telle pureté, selon l'OMS,  dans le Morvan, ou à Saint-Nazaire-Le-Désert.

En fait Emmanuelle Cosse retient les normes optimales pour la santé humaine fixées par l’OMS, l'Organisation mondiale de la santé, mais ces normes, elles sont dépassées dans toutes les grandes villes. 92% de la population mondiale respire un air vicié.

Pour le président d’Airparif, parler en terme de jours d’air pur n’a donc pas vraiment de sens. D’autant moins si l’on se compare à d’autres grande villes. Pour les particules fines par exemple : la norme de l’OMS c’est 10 microgrammes par mètre-cube en moyenne. A Paris on est monté à 146 microgrammes le 1er décembre, mais la moyenne dans la capitale reste contenue à 18 microgrammes. C’est 10, 12 fois moins que dans des villes d'Iran ou d'Inde, les plus polluées.

Est-ce que vous voulez dire que ce n’est pas si dramatique ?

Pas du tout. Ça l’est, car le moindre dépassement est dangereux pour la santé. Mais il faut souligner que ces dernières années, globalement, la qualité de l’air s’est améliorée à Paris, où la pollution a été faible 230 jours cette année, contre 148 jours seulement en 2011. Même s'Il reste ces problèmes récurrents, la pollution aux particules fines, au dioxyde d’azote, causées par les pots d’échappement, le chauffage… D’autres villes, comme Tokyo, ont totalement banni les véhicules polluants. C’est pour cela qu’Emmanuelle Cosse veut interdire le diesel. Mais notez qu'à paris un quaer des particules sont aussi dues au chauffage au bois, à nos feux de cheminée. Un seul feu, une journée, c’est l’équivalent d’un moteur diesel qui roulerait 18 000 kilomètres.