Natacha Polony, La Revue de presse 06.04.2016 1280x640 6:37
  • Copié

La presse quotidienne revient une nouvelle fois ce mercredi sur l'évasion fiscale de nombreuses personnalités au Panama.

Ce matin en Une de vos journaux le feuilleton continue :
Le Monde : Les comptes Offshore des proches de Marie Le Pen. 
Le Canard Enchainé : Evasion fiscale : Balkani se défend : "C’est la faute de ma femme, elle a confondu Paname et Panama !"
Et le dessin de Vuillemin en Une de Charlie Hebdo, les bourgeoises à collier de perles et les gros fumeurs de cigares manifestant contre le terrorisme fiscal avec des panneaux «"je suis Panama, "Même pas peur", "Ils ne changeront pas notre mode de vie".
Pendant ce temps, Libération évoque les concessions du gouvernement à la jeunesse pour faire passer la loi Travail : opération déminage.
Et l’Opinion pose la question : faut-il payer pour réformer ?

Panama

Au deuxième jour, certains semblent déjà blasés, un peu lassés par ce principe du feuilletonnage. "Ces révélations à suspens, résume Florence Chédotal dans La Montagne, tiennent en haleine notre voyeurisme, nous scandalise raisonnablement, mais nous ne étonne pas plus que ça". Mais dans le Canard Enchainé, on s’amuse surtout de voir la France réinscrire en vitesse le Panama sur la liste des paradis fiscaux. En 2011, il était déjà sorti de la liste noire et c’est au mois de février que le groupe d’actions financières, un organisme intergouvernemental de l’OCDE l’avait sorti de la liste grise. Comme l’explique le Canard, le site du quai d’Orsay à la rubrique "La France et le Panama" nous donne la clé de cette mansuétude. 20 grands groupes français sont implantés dans le pays avec une forte accélération ces dernières années. Et la filiale luxembourgeoise de la Société Générale qui œuvre au Panama pour le rayonnement de la France bancaire ? Vouloir faire croire, comme le Secrétaire d’état au budget, que son administration a découvert à la lecture du Monde les exploits des sociétés françaises relève de la plaisanterie.

Référendum aux Pays Bas

Cela vous avait sans doute échappé, parce que ça avait totalement échappé à la presse jusqu’à présent, il y a un référendum aux Pays bas. Un référendum sur l’accord européen avec l’Ukraine. C’est le Figaro et Le Monde qui en font état et nous expliquent que les souverainistes de tous bords veulent alerter sur ce qui ressemble aux prémices d’une adhésion de l’Ukraine à l’UE. De quoi relancer le climat de nouvelle guerre froide. C’est dans ce contexte que le magazine Causeur consacre son numéro à l’Europe. Avec un sondage : 53 % des Français sont opposés au maintien dans l’espace Schengen. Mais on y découvre surtout  le portrait d’une jeunesse qui ne ressemble ni à ses ainés europtimistes cravatés ni aux altermondialistes à keffieh. Ils sont à Science-po ou à l’EHESS, et ils expriment sans complexe leur amour de la nation et leur rejet d’une Europe devenue anti-sociale. De Lenny, jeune communiste nostalgique d’un PCF qui, dans les années 70, appelait à produire français, au jeune président de la section PS de normale sup, Simon Olivennes qui cite Dupont Aignan ou Mélenchon et sa formule sur les gens qui s’opposent au déménagement du monde. Le choc des générations, mais à l’envers.

Mode islamique

La polémique n’en finit pas mais Libération lui donne un tour nouveau à travers une tribune de la députée EELV Esther Benbassa qui nous explique que, finalement, le voile n’est pas plus aliénant que la mini-jupe qui ne serait qu’un symbole du modèle de séduction capitaliste imposé par les hommes. Heureusement, juste à côté, un texte de Martine Storti invite à se mettre du côté de celles qui n’ont pas le choix. "Porté ici, le voile peut signifier, pour d’autres femmes là-bas, une caution à ce qu’elle refusent, cet enfermement qui est un enfermement dans le sexe, une négation de la personne, un interdit de liberté". Elle note surtout que c’est bien le capitalisme qui récupère la mode islamique pour faire de l’argent. Pendant ce temps, le Figaro nous explique que les écoles musulmanes inquiètent le gouvernement. En France, ouvrir une école hors contrat est plus facile que d’ouvrir un débit de boissons, note le journal. Une stratégie d’entrisme, un projet sur 20 ans, prévient un ancien frère musulman. Avec la bénédiction, donc, de certaines féministes.

Lawrence d’Arabie

Le magazine Citizen K retrace l’épopée du légendaire symbole de la révolte arabe. Il faut lire ce récit pour comprendre ce que fut l’histoire du Moyen-Orient, Churchill expliquant qu’il a créé la Jordanie avec un crayon un après-midi au Caire, cette somme d’aveuglement et d’intérêts divers qui aboutissent aux catastrophes d’aujourd’hui.

Disparition des espèces

"Précédant l’hirondelle, précédant la jonquille et peu après le perce-neige, le crapaud ordinaire salue l’arrivée du printemps à sa manière". Qui est l’auteur de cet hymne à un animal qui, "contrairement à l’alouette et à la primevère a rarement reçu la faveur des poètes" ? Georges Orwell. Ce sont les pages Sciences et médecine du Monde qui nous alertent sur la disparition des amphibiens, particulièrement sensibles à la pollution et qui cite cet éloge du crapaud ordinaire et à travers lui cet amour de la nature d’un auteur qui appuyait son socialisme sur la méfiance envers le progrès technique aliénant, destructeur de la beauté du monde et de la vie simple.

 

Il y en a d’autres qui sont persuadés d’avoir sauvé la nature. Et ça vaut bien un prix Nobel de la paix.  Le Parisien consacre un article à trois de nos grands hommes dont le point commun est qu’ils se verraient bien couronnés par le comité d’Oslo. Laurent Fabius, Jean-Louis Borloo et Philipe Douste-Blazy. La COP 21, l’électricité pour l’Afrique et les médicaments pour les  pays pauvres. Parce qu’ils le valent bien. Leur entourage laisse entendre, l’air de rien, que leur nom circulerait. Laurent Fabius aurait même de solides réseaux qui pourraient suggérer à Sean Penn ou Leonardo Dicaprio d’envoyer une petite lettre au comité Nobel. Quand on a renoncé à l’Élysée (enfin, quand on a été forcé de faire une croix dessus) on n’a pas pour autant atteint la sagesse.