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INTERVIEW E1 - François Hollande a menacé le patronat de légiférer si ce dernier ne réforme pas le code encadrant la rémunération des grands patrons. Tout sauf une première.

Un "Golden hello" de 4 millions d'euros pour le nouveau patron de Sanofi en 2015, un salaire de 15 millions accordé au Pdg de Renault-Nissan malgré le vote négatif des actionnaires en 2016, etc. : les polémiques sur la rémunération des grands patrons se suivent et se ressemblent, obligeant à chaque fois le gouvernement à menacer d'instaurer de nouvelles régulations. Ce qu'a une nouvelle fois fait François Hollande, invité mardi d'une matinale spéciale sur Europe 1.

"Il y aura des conséquences" si rien de change. "Je considère qu’il faut rémunérer la réussite, le talent, et que M. Tavares (Pdg de PSA, ndlr) et M. Ghosn (pdg de Renault-Nissan) ont redressé leur entreprise. Mais jusqu’à un certain point. Il m’avait été dit par le Medef qu’il y aurait un code de bonne conduite. Je demande qu’il s’applique. S’il ne s’applique pas, il y aura des conséquences", a prévenu François Hollande. Sauf que ce fameux code de conduite, le code Afep-Medef, a été justement appliqué à la lettre : si les actionnaires sont consultés, leur vote n'est pas contraignant et le conseil d'administration peut passer outre. C'est exactement qu'il s'est passé dans le cas de Carlos Ghosn.

Le président de la République a donc invité les organisations patronales à réformer ce code pour que le vote des actionnaires devienne contraignant. "Quand les assemblées générales d’actionnaires disent 'nous voulons limiter la rémunération', alors toute décision de l’assemblée générale sera exécutoire. C’est maintenant aux autorités du patronat, des employeurs d’avoir cette exigence morale et à la loi d’intervenir s'il ne se passe rien", a-t-il déclaré.

Quel action du gouvernement depuis 2012 ? Suite à la polémique sur les 16 millions touchés par le patron de Publicis en 2012, le gouvernement avait déjà menacé d'agir. Finalement, seuls les patrons du secteur public ont été concernés, avec un salaire limité à 450.000 euros par an. Pour le secteur privé, le gouvernement a fait le choix de l'autorégulation : les organisations patronales de l'Afep et du Medef ont mis en place leur propre code de bonne conduite. Ce qui n'a pas empêché de nouvelles polémiques d'éclater : en 2015, le Pdg de Vivarte a quitté une entreprise au bord de la faillite avec un chèque de 3 millions d’euros, l'ancien PDG de PSA a bien touché une retraite-chapeau alors qu'il y avait publiquement renoncé auparavant, tandis que le Pdg d'Alcatal-Lucent a bénéficié d'une prime alors que l'entreprise, en difficulté, a été rachetée par un concurrent.

A chaque fois, le gouvernement a multiplié les déclarations indignées et invité le patronat à plus de responsabilité. Mais, comme l'avaient fait les autres gouvernements avant lui, aucune loi n'a été votée. La balle est donc dans le camp du patronat, qui souhaite préserver l'autorégulation et prépare une nouvelle version du code Afep-Medef pour cet été. A moins que l'Europe n'agisse d'ici là et impose une consultation obligatoire et contraignante des actionnaires.

Pour rappel, voici les cinq patrons du CAC 40 les mieux rémunéré en 2014. Avec 17 millions d’euros accordé en stock-options, le patron d'Altice-Numericable aurait du dominer ce classement mais sa société n'étant pas côtée en France, il n'a pas été retenu. En moyenne, un patron du CAC 40 a gagné 4,2 millions d’euros de rémunération totale en 2014, soit l'équivalent de 2.906 Smic brut.

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