L'anti-obsolescence, une tendance en plein développement

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Le propriétaire du Fairphone a la possibilité de changer lui-même toutes les pièces. © JUSTIN TALLIS / AFP
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Carole Ferry, édité par R.Da.
Alors que le gouvernement a ouvert la chasse à l'obsolescence programmée, de nombreux fabricants, français notamment, cherchent à faire durer leurs produits plus longtemps mais aussi à développer les services de réparation.

L'obsolescence programmée est dans le collimateur de la justice française. La France est à ce jour le seul pays au monde à avoir introduit cette notion dans le droit en tant que délit. Epson et Apple sont les deux premières marques visées par des enquêtes. De quoi faire monter une nouvelle tendance, celle de l'anti-obsolescence programmée, avec des produits fabriqués pour durer le plus longtemps possible.

Changer les mentalités. L'idée est d'arrêter de jeter dès qu'un objet ne marche plus et d'essayer de le réparer. SEB, fabriquant français d'électroménager, est l'un des pionniers dans le domaine. Il y a dix ans, le groupe promet à ses clients que tous ses produits seront réparables et transforme même l'une de ses usines des Vosges en centre de stockage pour les pièces de rechange. L'argument de vente fonctionne, mais les réparations ont augmenté de 15% seulement, car le réflexe du consommateur reste souvent : "c'est trop compliqué, ça va coûter cher". Le défi que se fixe désormais Alain Pautrot, le vice-président en charge de la satisfaction des consommateurs chez SEB, c'est de faire changer les mentalités : "Un exemple, qui nous parait important, c'est celui du grille-pain. On devrait pouvoir proposer une réparation forfaitaire sur le grille-pain autour de 22 à 25 euros", explique-t-il. "C'est vrai que l'on trouve des grille-pain d'entrée de gamme à des prix inférieurs. Mais si l'on a payé son grille-pain 40 ou 50 euros, on a envie de le conserver, et dans beaucoup de cas le consommateur se dit que finalement, ce n'est que 25 euros".

SEB va également ouvrir d'ici quelques semaines des ateliers où ses clients pourront réparer eux-mêmes fer à repasser, sèche-cheveux, etc. La motivation n'est pas toujours le coût, mais aussi la volonté de moins jeter pour préserver l'environnement.

Développer de nouvelles technologies. Un autre géant de l'industrie travaille sur cette idée : le groupe  Michelin qui conçoit en ce moment le pneu du futur. Il devra durer la vie de la voiture. Plus besoin de le changer ni quand il sera usé, ni pour rouler sur la neige, il suffira de rajouter de la gomme autour grâce à une imprimante 3D. Faire durer les produits plus longtemps oblige ainsi à développer de nouvelles technologies. Ainsi, deux ingénieurs se triturent les méninges depuis trois ans pour fabriquer "L'Increvable", une machine à laver qui doit durer toute une vie. Leur défi consiste à rendre toutes les pièces accessibles pour qu'elles puissent être changées facilement. Même Emmanuel Macron leur a rendu visite le mois dernier, preuve que le concept est dans l'air du temps. Seul bémol : pour le moment, ils ne trouvent aucun industriel prêt à relever le défi à leurs côtés.

Un mouvement en plein essor. C'est le même problème pour le Fairphone, cet anti-Iphone. Sur le papier l'idée semble formidable : le propriétaire peut changer toutes les pièces, et a la garantie qu'aucun enfant n'a aidé à le fabriquer. Sauf que pour un peu plus de 500 euros, les performances ne sont pas vraiment au rendez-vous. De nouveaux modèles devraient sortir dans les mois qui viennent. Si industriels et ingénieurs tâtonnent encore, fabriquer plus solide pour durer plus longtemps est une tendance qui a bien le vent en poupe.