Grève des fonctionnaires : 139.000 manifestants dans toute la France, 130 personnes interpellées à Paris

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La manifestation parisienne s'est tendue à l'avant du cortège peu avant 16 heures. © Eric FEFERBERG / AFP
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et Thibaud Le Meneec, avec Guillaume Biet et AFP , modifié à
Les fonctionnaires sont descendus dans la rue mardi pour protester contre le projet de refonte du service public. Des heurts ont éclaté peu avant 16h en marge du cortège parisien, entre individus encagoulés et forces de l'ordre.

C'est jour de grève dans la fonction publique. Les fonctionnaires étaient appelés à descendre dans la rue par l'ensemble des syndicats du secteur afin de protester contre la réforme du service public en cours d'élaboration et la suppression progressive de 120.000 postes. Avec plus de 130 manifestations organisées dans toute la France, de nombreux fonctionnaires ont défilé dans la rue. Des perturbations étaient aussi prévues, notamment dans les écoles et les transports. Une journée à suivre en direct sur Europe1.fr.

Les infos à retenir :

  • Neuf syndicats de la fonction publique lançaient un appel unitaire à manifester
  • Plus de 130 manifestations ont eu lieu dans tout le pays avec 139.000 manifestants 
  • Près de 130 personnes ont été interpellées après des échauffourées et l'occupation d'un lycée

Du monde dans la rue, moins dans les services publics

Après le 10 octobre et le 22 mars, il s'agissait de la troisième journée de débrayage des fonctionnaires. Comme en octobre (mais pas en mars) les fédérations CGT, CFDT, FO, Unsa, FSU, Solidaires, CFTC, CFE-CGC et FA de la fonction publique, représentant les 5,7 millions d'agents publics, ont lancé un appel unitaire. La mobilisation, qui se présente "sous les meilleurs auspices" au vue des "remontées", selon Jean-Marc Canon (CGT), entend ainsi peser sur le rendez-vous salarial prévu mi-juin avec le gouvernement, alors que tous les syndicats dénoncent un manque de dialogue social

Union des leaders syndicaux. Pour la première fois depuis 2010 et les manifestations contre la réforme des retraites, les leaders des trois principales centrales syndicales, en l’occurrence Philippe Martinez (CGT), Laurent Berger (CFDT) et Pascal Pavageau (FO), sont apparus ensemble en tête de cortège, parti à 14 heures de la place de la République pour rallier la place de la Nation. Un renfort de poids pour les syndicats de la fonction publique.

Pascal Pavageau (FO), Philippe Martinez (CGT) et Laurent Berger (CFDT)

Incidents. Plusieurs dizaines de personnes encagoulées ont vandalisé des enseignes à l'avant du cortège parisien. Peu avant 16h, des heurts ont éclaté avec les forces de l'ordre, avec notamment des jets de projectile. Au total, 24 personnes ont été interpellées en marge de la manifestation, a indiqué la préfecture de police. Selon un bilan de la préfecture, "8 personnes dont 2 membres des forces de l'ordre ont été blessées légèrement lors de la manifestation".

Après dispersion du cortège, plusieurs dizaines de personnes ont pénétré dans le lycée Arago, dans le 12e arrondissement, avant d'en être évacuées par les forces de l'ordre. 101 personnes ont ainsi été arrêtées dans le lycée, dans "un premier temps pour contrôle d'identité", a précisé la préfecture.

Entre 15.000 et 50.000 manifestants. Au total, selon un comptage réalisé par le cabinet Occurrence pour un collectif de médias dont Europe 1 fait partie, 16.400 personnes ont foulé le pavé à Paris. La Préfecture de police a compté pour sa part 15.000 manifestants. Selon FO, ils étaient 50.000. La CGT, dont un représentant était au côté d'Occurrence en tant qu'observateur, a fait état d'une première estimation à 30.000 manifestants.

Côté politique, l'union était bien moins visible que chez les syndicats. Venu défiler contre le projet de loi, le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure a été violemment pris à partie par des manifestants qui l'ont hué. Il a dû être exfiltré du cortège peu après son arrivée.

À Marseille, facteurs, étudiants, enseignants et retraités ont manifesté dans la matinée, de même qu'à Lyon, où ils étaient 4.500 selon la police. Souvent rejoints par des étudiants, des lycéens ou des cheminots, les fonctionnaires étaient 4.300 à Nantes, 2.500 à Grenoble, 2.700 à Caen, 2.000 à Limoges, 2.200 à Périgueux, 2.800 à Rennes ou encore 500 à Auch, selon la police. Au total, 139.000 personnes ont défilé dans toute la France, selon le décompte du ministère de l'Intérieur.

Services publics perturbés. Qui dit manifestations de fonctionnaires dit perturbations dans les services publics. L'accueil des tout-petits dans les crèches a été perturbé avec des horaires d'ouverture restreints, ou des fermetures partielles ou totales. Côté maternelles et écoles primaires, on annonce 20% de grévistes. Dans les transports, la Direction générale de l'aviation civile a recommandé aux compagnies aériennes de réduire de 20% leur programme de vols. Le secteur de l'énergie est également mobilisé et des coupures de courant sont possibles localement.

Que contient le projet de loi du gouvernement ?

La grogne des fonctionnaires n’est pas nouvelle. Dès la campagne présidentielle, Emmanuel Macron avait annoncé vouloir alléger la fonction publique pour faire des économies de fonctionnement. Depuis, l'exécutif a successivement confirmé la suppression de 120.000 postes de fonctionnaires d'ici 2022 et annoncé la ré-instauration du jour de carence, le gel du point d'indice servant au calcul de leur rémunération, ainsi que le report d'un an du plan de revalorisation des carrières (PPCR).

Une "attaque" du statut. À l'ouverture officielle des négociations fin mars, toutes les organisations ont dénoncé les orientations du gouvernement, qui constituent selon elles une "attaque" du statut de fonctionnaire : simplification du dialogue social, extension du recours aux contractuels, part accrue de rémunération au mérite et accompagnement des mobilités de carrière, y compris vers le secteur privé. Ces mesures, qui doivent déboucher sur un projet de loi au 1er semestre 2019 et auxquelles s'ajoutent les inquiétudes entourant le futur rapport d'experts CAP 22, ont continué d'attiser la tension qui règne depuis l'arrivée au pouvoir d'Emmanuel Macron.