Déficit structurel, ce concept qui fait peur

Le pacte budgétaire européen impose à tous les Etats-membres un déficit structurel maximum de 0,5 %.
Le pacte budgétaire européen impose à tous les Etats-membres un déficit structurel maximum de 0,5 %. © MAXPPP
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Thomas Morel , modifié à
KEZACO - le traité budgétaire prévoit d'encadrer le déficit structurel. Qu'est-ce que c'est ?

Le Parlement entame mardi les discussions autour du projet de traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance, le TSCG, plus communément appelé pacte budgétaire. Au cœur du débat, l'épineuse question de la règle d’or budgétaire. Elle prévoit que les États signataires s’engagent à ne pas dépasser un déficit structurel de 0,5 % du PIB. Ce "déficit structurel" ne correspond pas au simple déficit budgétaire. Explications.

Une définition pour commencer. Le traité budgétaire donne bien une définition du déficit structurel, mais elle n'est pas vraiment à la portée du commun des mortels. Selon l'Article 3 de ce texte, le déficit structurel correspondrait au déficit normal du budget, "corrigé des variations conjoncturelles, déduction faite des mesures ponctuelles et temporaires". Comprenne qui peut.

Christian de Boissieu

Christian de Boissieu, président du Conseil d’Analyse Économique, interrogé par Europe1.fr, en donne une explication plus claire : "La conjoncture a une forte influence sur le déficit public d’un pays. En période de forte croissance, il y a plus de rentrées fiscales puisque les entreprises marchent à plein, et moins de dépenses sociales puisqu’il y a moins de chômeurs. Au contraire en période de crise économique, il y a moins de recettes fiscales et plus de dépenses sociales. Le déficit structurel consiste à gommer les effets de la conjoncture, qu’elle soit bonne ou mauvaise". Les seuls éléments qui entrent en compte sont donc les politiques publiques appliquées par le gouvernement.

Comment évaluer ce déficit structurel ? Pour le calculer, il faut établir un point de référence, un chiffre-clé de l’économie qui correspond à une année moyenne. On détermine ensuite quel serait le niveau du déficit public si notre chiffre restait le même année après année, au lieu d’évoluer comme il le fait normalement.

Par exemple, on peut choisir comme point de référence un taux de chômage. "Dans notre cas, cela consiste à déterminer quel serait le niveau de chômage en France lors d’une année moyenne", détaille Christian de Boissieu. On pourrait - mais ce n’est qu’un exemple - choisir un taux de 7 %. En partant de cette référence, on recalculerait le solde budgétaire année après année en considérant que le taux de chômage est tout le temps fixe à 7 %.

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© REUTERS

Et pourquoi le fixer à 0,5 % ? "Il n'y a pas de modèle mathématique qui permette de déterminer le juste niveau de déficit", constate le président du Conseil d'analyse économique. De fait, l'Allemagne, dans sa Constitution, a inscrit que le déficit structurel de Berlin ne devait pas dépasser 0,35 %. Dans tous les cas, ces chiffres sont considérés comme étant à un niveau soutenable pour l'économie d'un pays, mais c'est plus une évaluation au doigt mouillé qu'un pur raisonnement mathématique.

Pourquoi il pose problème. Le principal problème du solde structurel, c’est qu’il faut déterminer une base de calcul commune. On peut choisir le taux de chômage comme référence, mais on peut tout aussi bien choisir n’importe quel autre chiffre-clé de l’économie. A l’arrivée, on se retrouve avec des résultats qui peuvent varier du tout au tout. "La Commission à Bruxelles a une méthode, la Cour des comptes a la sienne, la direction du Trésor en a une troisième et certains pays en Europe ont la leur", reconnaissait la semaine dernière Jérôme Cahuzac, le ministre du Budget, aux députés de l’Assemblée Nationale. "C’est un concept difficile, il y a autant de méthodes de calcul que d’institutions aujourd’hui, confirme Christian de Boissieu. Fixer une limite au déficit structurel plutôt qu’au déficit normal, c’est préférable, mais c’est aussi beaucoup plus compliqué."