Bazar en Bourse : "Pas un krach mais une correction"

Wall Street a encore plongé sévèrement jeudi.
Wall Street a encore plongé sévèrement jeudi. © Bryan R. Smith / AFP
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Emmanuel Duteil, avec , modifié à
A Wall Street comme à Paris, les bourses mondiales sont embarquées dans un tour de montagnes russes depuis quelques jours. Une période de correction inévitable mais pas inquiétante pour autant.

Mais à quoi joue la bourse ? Depuis le début de la semaine, les principales places financières mondiales font le yo-yo, à commencer par Wall Street : -4,6% lundi, +2% mardi, -0,08% mercredi, -4% jeudi… la bourse américaine est très volatile. Dans son sillage, le CAC 40 aussi est embarqué dans un tour de montagnes russes (-1,48%, -2,35%, +1,82%, -1,98% sur la même période). Que signifie ce rythme cardiaque erratique ? Faut-il craindre un krach boursier ?

Pas un krach… "La définition du krach, c’est -20% et pour l’instant Wall Street a perdu au plus fort 10%, donc on reste dans le domaine de la correction", assure d’emblée Grégori Volokhine, président de la société de bourse Meeschaert Financial Services, à New York. Pas d’inquiétude à avoir donc, la prochaine crise financière n’est pas pour demain. "Les marchés n’ont fait qu’effacer quelques mois de hausse", abonde François Chaulet, directeur général de la société de gestion Montségur Finance.

Mais alors pourquoi un tel affolement chez les traders ? "Les marchés financiers ont changé d’allure. Jusqu’ici, ils étaient anesthésiés par des banquiers centraux très actifs, avec des politiques extrêmement accommodantes", explique François Chaulet. "Désormais, on revient dans l’ancien paradigme, une économie où quand il y a de la croissance, les prix montent, les salaires montent et donc les taux d’intérêts ne peuvent pas rester à zéro, voire négatifs." Les banques centrales sont chargées de réguler les taux pour éviter un emballement. Le retour de la croissance a entraîné une remontée des salaires et de la consommation et donc un risque d'inflation. Pour limiter la hausse des prix, les taux remontent après 35 ans de baisse.

… juste un retour à la réalité. Les deux analystes insistent sur un point, certes paradoxal mais bien réel : ce qui fait monter les craintes des investisseurs, ce sont les bonnes nouvelles économiques. "Tout le monde était enthousiaste grâce au retour de la croissance en Europe, notamment en France, de la baisse du chômage, mais aussi du fait de l’expansion des profits aux États-Unis grâce à la baisse des impôts", liste Grégori Volokhine. La bonne santé de l’économie mondiale a donc poussé les investisseurs à la faute.

Entendu sur europe1 :
La volatilité peut perdurer quelques jours voire quelques semaines

"Jusqu’à vendredi dernier, tout le monde avait fait le pari d’un marché qui continuerait à monter sans soubresaut. Et quand tout le monde est du même côté du bateau, il se renverse", image l’analyste new-yorkais. Dans les faits, deux mouvements se sont croisés au mauvais moment : d'un côté, l'économie mondiale se porte de mieux en mieux mois après mois. De l'autre, malgré cette dynamique positive, les banques centrales continuaient de maintenir les taux d'intérêt très bas pour encourager la reprise. Les investisseurs ont donc cru que la situation continuerait telle quelle…

Ajustements en urgence. Résultat, quand la remontée des taux d’intérêts s’est concrétisée après des mois et des mois de reports consécutifs, les financiers ont été pris par surprise. Concrètement, les soubresauts observés sont donc des ajustements effectués en urgence. "Ce n’est pas l’ambiance qui change, plutôt des facteurs techniques qui interviennent. Des immenses fonds d’investissement avec des centaines de milliards de dollars doivent changer leur stratégie d’investissement puisqu’ils ont subi les événements. Ces soubresauts, surtout en fin de séance, ce sont des ajustements de ces fonds d’investissement", explique Grégori Volokhine.

Encore des soubresauts à prévoir. Alors que se profilait vendredi une dernière séance dans le rouge à New York comme à Paris, que faut-il attendre des prochains jours ? "Cette correction est significative, elle va amener un régime de marchés différents. Le régime de volatilité peut perdurer quelques jours voire quelques semaines", avance François Chaulet. "Les marchés vont sans doute continuer à monter mais plus en ligne droite comme ils en avaient pris l’habitude ces dernières années. Les soubresauts vont continuer en s’atténuant progressivement", précise Grégori Volokhine.

Il faut donc attendre que tout le monde revienne au milieu du bateau pour espérer connaître une période plus stable. "Une fois que le calme sera revenu, on pourra reconstruire sur les bases fondamentales que doivent suivre un marché : la santé de l’économie et des entreprises dans lesquelles on investit", conclut l’analyste basé à New York. Un retour à la réalité un peu chaotique mais nécessaire.