Air France : le CE dans l'impasse

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Sophie Amsili et Mélanie Taravant , modifié à
Le Comité d'entreprise, en déficit de 5 millions d'euros, a été placé en redressement judiciaire.

Paradoxalement, ce sont souvent les comités d'entreprise (CE) les mieux lotis qui font naufrage. Le tribunal de grande instance de Bobigny a ainsi placé mardi le CE d'Air France en redressement judiciaire.

A quoi sert un comité d'entreprise ? Composé de représentants élus du personnel et éventuellement de représentants syndicaux, le comité d'entreprise (CE) est informé et consulté sur les questions touchant au fonctionnement de l'entreprise (conditions de travail, situation financière de l'entreprise…). Il est également chargé d'organiser des activités sociales et culturelles pour les salariés.

Avion Air France

Une ardoise de 15 millions d'euros chez Air France. Le CCE d'Air France, qui gère les activités sociales et culturelles des 53.200 salariés de la compagnie aérienne, est confronté à de fortes turbulences depuis la découverte en 2009 d'un déficit cumulé de 15 millions d'euros sur la période 2005-2008. Il avait été sauvé in extremis de la cessation de paiement en juillet 2012, grâce au vote d'un plan de départs volontaires associé à un emprunt. Ce plan restant insuffisant, "le tribunal a décidé de convertir la procédure de sauvegarde, enclenchée le 5 février, en placement en redressement judiciaire, conformément à la demande de l'administrateur judiciaire" du CCE, a précisé une source proche du dossier.

Des précédents. Avant le CE d'Air France, ceux d'EDF, de la RATP  ou encore de la SNCF ont souffert de problèmes récurrents de gestion qui ont, pour certains, enfoncé leurs comptes dans le rouge au fil des années. Le CE d'EDF, par exemple, a déjà affiché par le passé jusqu'à 100 millions d'euros de déficit. A Air France, on parle d'un trou de plus de 10 millions d'euros.

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Ces dérapages sont suffisamment importants pour que la brigade financière ouvre une enquête. Et la gestion s'avère parfois bien opaque. On découvre par exemple des écrans plats payés avec la carte bleue du CE et des petits fours à 447.000 euros pour la fête de fin d'année du CE de la RATP...

Un moyen de pression pour la direction. De son côté, les directions d'entreprise trouvent leur compte avec ces dérapages, estime Nicolas Perruchot, député Nouveau Centre et auteur d'un rapport sur les dérives des comités d'entreprise. "C'est devenu une pratique assez courante d'utiliser les dérives de ces comités d'entreprise pour mettre la pression sur les syndicats et ainsi acheter une relative paix sociale", assure-t-il à Europe 1.  " Fermer les yeux, voire boucher les comptes. C'est un moyen pour ces présidents d'entreprises d'avoir une pression qui ne dit pas son nom " A la clé : la signature de réformes ou de conventions.

Des dysfonctionnements. A cela s'ajoutent d'autres dysfonctionnements dans les CE. Difficile de s'improviser expert comptable du jour au lendemain, confie ainsi à Europe 1 un responsable d'un CE qui n'avait pas appris à gérer de si grosses sommes. Autre problème : beaucoup de CE sont en sureffectif. Celui d'Air France, par exemple, compte près de 20 personnes en trop. Or, par principe, les syndicats ne veulent pas de plan social. Ils espèrent qu'un plan de départs volontaires suffira pour renflouer les caisses définitivement.