AAA : l’apocalypse n’a pas eu lieu

Une semaine après avoir été dégradée par l'une des trois grandes agences de notation, la France continue à pouvoir emprunter de l'argent sur les marchés.
Une semaine après avoir été dégradée par l'une des trois grandes agences de notation, la France continue à pouvoir emprunter de l'argent sur les marchés. © MAXPPP
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Une semaine après la dégradation de la note de la dette française, le pays n'a pas sombré.

Vendredi soir, l’agence de notation Standard & Poor’s semait la zizanie en privant la France de son AAA, la meilleure note possible qui lui permet d’emprunter de l’argent sur les marchés au meilleur taux. Pourtant, une semaine plus tard, la France n’a pas sombré et pour cause : les marchés avaient anticipé cette dégradation et la Banque centrale européenne (BCE) est venu au secours de la zone euro.

La France dégradée, la France humiliée

Depuis les derniers soubresauts de la crise de la dette cet été, tous les observateurs craignaient que la France ne perde son précieux sésame. Nicolas Sarkozy en fit même une priorité, érigeant le triple A en "patrimoine nationale".

L’opposition n’a donc pas manqué de railler le gouvernement lorsque la France a été dégradée, François Hollande martelant que "la bataille" du triple A "a été perdue", avant d’ajouter : "c'est la crédibilité de la stratégie conduite depuis 2007 qui est mise en cause". Une pique à laquelle François Fillon a répondu en déclarant que "la France est un pays sûr".

Les marchés avaient déjà prix de l’avance

Une semaine plus tard, l’Etat continue pourtant d’emprunter dans des conditions favorables et n’a pas subi de hausse des taux d’intérêt. La France n’a pourtant pas redressé ses comptes en sept jours, l’explication est à chercher du côté des marchés.

Les yeux fixés sur nos comptes et nos déficits, les financiers avaient déjà intégré dans leurs calculs la dégradation de la note française, d’autant que l’agence Moody’s avait tiré un coup de semonce dès le 18 octobre 2011. Elle avait alors annoncé qu’elle s’accordait trois mois pour réétudier la note souveraine française, faisant un peu plus grimper des taux d’intérêt déjà en hausse depuis la crise grecque de l’été dernier.

La Banque centrale européenne entre en action

La France a également bénéficié de l’intervention massive mais discrète d’un acteur de poids : la Banque centrale européenne (BCE). Cette dernière s’est résolue à faire tourner la planche à billet pour prêter à bas coût de l’argent aux banques afin qu’elles rachètent des emprunts grecs, italiens ou encore espagnols.

"Peu de gens ont réalisé que depuis le discours de Mario Draghi (patron de la BCE), tout a changé en Europe", a décrypté l'économiste Jacques Attali, vendredi matin sur Europe 1. "Il a décidé, et c’est vraiment une nouvelle considérable, d’acheter absolument tout ce qui était sur les marchés. La Banque centrale a mis plus d’argent pour sauver l’euro que la banque centrale américaine ne met pour sauver le dollar", a détaillé l’économiste, avant d’y voir "un changement absolument radical".

C’est ce "changement absolument radical" qui a permis de stabiliser les "mauvais élèves" de la zone euro, dont la rechute aurait entraîné la France. Nicolas Sarkozy a donc pu répondre jeudi à l’opposition, accusée d’avoir joué "un spectacle parfois indécent". Ce n’est pas pour autant l’action du gouvernement qui a été déterminante, mais plutôt l’anticipation des financiers et l’action de la BCE.