Les Etats-Unis légifèrent contre la "vengeance porno"

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Charles Carrasco , modifié à
L'Etat de New York envisage de mettre en place une loi contre la diffusion de "sextapes" après une rupture par exemple.

L'INFO. Plusieurs Etats ont décidé de passer à l'action pour lutter contre un phénomène qui prend de l'ampleur. Une loi sur la "vengeance porno", une pratique qui consiste à diffuser sur le web des "sextapes" et "sexpics" de son ex-partenaire plaqué ou trompé, est entrée en vigueur la semaine dernière en Californie. L'Etat de New York l'envisage à son tour. Car le phénomène est sérieux.

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Hunter Moore, le roi du "revenge porn". Beaucoup de sites Internet ont surfé sur ce phénomène ces dernières années. Certaines personnes peu scrupuleuses en ont même fait leur business. C'est le cas de Hunter Moore, qui était surnommé en 2010, "l'homme le plus haï d'Internet". Il a créé isAnyoneUp, un site sur lequel il publiait sans vergogne des photos compromettantes proposées par les internautes. Rapidement, le site a enregistré des pics de 300.000 clics par jour pendant que son fondateur empochait de coquettes sommes d'argent provenant de la publicité. Mais le roi du "revenge porn" a été obligé de mettre ce premier site aux oubliettes sous la pression des opposants.

Il a ensuite décidé de créer un nouvel espace sur la Toile, du même acabit, HunterMoore.tv. Mais Anonymous s'en est mêlé et a publié sur Internet son adresse et d'autres informations personnelles. L'intéressé n'avait pas l'air de s'en inquiéter : "ma vie est publique. Mon numéro de téléphone est sur Instagram. Je ne suis pas un pédophile qui se cache derrière un ordinateur. Ils (les hackers d'Anonymous, ndlr) me rendent encore plus célèbre. Le trafic vers mon site augmente, je vends davantage de t-shirts", avait-il assuré avec aplomb au magazine Forbes.

Des victimes dont la vie est gâchée. Mais la "vengeance porno", toute virtuelle qu'elle est, a des conséquences bien concrètes sur la vie de ses victimes. En Floride, une femme a vu son existence ruinée, un an après sa séparation avec son petit-ami. Elle a découvert des photos d'elle nue sur ces sites spécialisés. Mais ce n'est pas tout : son email ainsi que l'adresse de son lieu de travail étaient indiqués. Les clichés ont été publiés sur près de 200 sites au total ! Des sites lui ont même demandé de changer de nom afin de mettre fin à cet harcèlement.

> Ecoutez son témoignage sur CNN :

New York prévoit une législation plus stricte... Les slogans de ces sites spécialisés qui ont fleuri sur la Toile sont assez explicites : "salissez, avant d'être sali". Des portails ont même pris la désagréable habitude de demander à certains internautes de l'argent contre le retrait de documents compromettants. New York a donc décidé, cette semaine, de passer à l'action. "La vengeance porno peut ruiner des vies de famille, des carrières", s'inquiète le sénateur Phil Boyle à l'origine d'un projet de loi. "Ce phénomène grandit et de plus en plus de femmes sont violentées et exploitées par des ex-petits amis ou des ex-maris. Ces images privées deviennent virales dans le monde entier et ces femmes n'ont pas de recours légal", déplore-t-il.

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Ce sénateur veut donc protéger les victimes. La loi prendrait en compte les photos prises par la victime elle-même, car selon Phil Boyle, "80% sont des autoportraits". "Si une jeune femme prend une photo d’elle-même, qu’elle l’envoie à son petit ami, puis que plusieurs années après, ce dernier la publie en ligne, cela tombera sous le coup de la loi. C’est une grande avancée dans la législation", a-t-il affirmé à une radio locale. Les personnes s'adonnant à la "revenge porn" risqueraient ainsi jusqu'à 1.000 dollars d'amende et un an de prison.  D'autres législateurs new-yorkais envisagent des sanctions encore plus dures.

... que l'exemple californien. Cette loi new-yorkaise ne tombe pas du chapeau. Sa lointaine voisine, la Californie sur la côte ouest, a déjà une loi en ce sens qui est entrée en vigueur la semaine dernière. Elle définit la "vengeance porno" comme étant la publication "d'images nues" d'une autre personne "avec l'intention de provoquer une détresse émotionnelle importante ou une humiliation". Les auteurs de ces faits sont passibles de six mois de prison et de 1.000 dollars d'amende. La loi exige également que ces publications soient accompagnées d'informations d'identification personnelle de l'auteur. En revanche, les "autoportraits", donc la majorité des cas, ne tomberaient pas sous le coup de la loi, ce qui suscite de nombreuses critiques, rapporte CNN. Pour la CCRI, une association de défense des libertés sur Internet, "cette loi ne va pas assez loin". Encore une fois aux Etats-Unis, c'est le principe des libertés individuelles qui a fait pencher la balance des législateurs.