Israël : les femmes disent "non"

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Des centaines de laïques ont manifesté contre les ultra-orthodoxes qui prônent la ségrégation.

Le climat est particulièrement tendu depuis quelques jours à Beit Shemesh, une ville située à 30 km de Jérusalem, en Israël. Des centaines de militants de la laïcité ont manifesté mardi contre les discriminations à l'égard des femmes imposées par une frange radicale d'habitants ultra-orthodoxes.

Cette ville nouvelle de 80.000 habitants, en majorité des juifs orthodoxes, est en effet depuis plusieurs jours le théâtre de violences entre une fraction de religieux radicaux et forces de l'ordre. Un policier a été légèrement blessé par un jet de pierre et plusieurs manifestants interpellés. Europe1.fr résume les enjeux de cette mobilisation en faveur du droit des femmes.

Qu'exigent les ultra-orthodoxes ? Ces derniers réclament une séparation stricte entre hommes et femmes, exacerbant ainsi les tensions jusqu’aux échauffourées. Munis de pancartes, ils ont réclamé dimanche que les femmes ne s’arrêtent pas devant une synagogue. À Beit Shemesh, les "harédim"  (craignant Dieu), demandent aussi aux femmes de se vêtir "modestement", c’est-à-dire en se couvrant les bras et les jambes.

Sur quels textes religieux s'appuient les ultra-orthodoxes ? Les ultra-orthodoxes s’appuient sur la Halakha, la Loi juive, mais en font une interprétation très rigoureuse. Alors que le Loi juive prône la séparation des hommes et des femmes sous certaines conditions bien précises, les ultra-orthodoxe veulent la généraliser dans l’ensemble des lieux publics. Ils sont notamment à l’origine de la ségrégation sur les lignes de bus qu’ils empruntent, pratiquée depuis 1980. Certains publicitaires ont par ailleurs fait disparaître les images de femmes des affiches dans les quartiers à majorité ultra-orthodoxe, notamment à Jérusalem.

Ils "ne reconnaissent pas le droit à l'égalité, et donc les droits des femmes, pourtant inscrits dans la loi fondamentale israélienne. La tendance des ultra-orthodoxes est à la radicalisation. Et l'Etat ne fait rien pour inverser cette tendance", regrette Frances Raday, professeure émérite de droit à l'université hébraïque de Jérusalem, spécialisée dans le droit des femmes.

Que répondent les manifestantes ? La dirigeante de l'opposition parlementaire, Tsipi Livni, a participé mardi au rassemblement de Beit Shemesh et a dénoncé "les extrémistes qui veulent imposer leurs vues à tous". Des manifestants ont également brandi des pancartes où on pouvait lire : "nous ne deviendrons pas un autre Téhéran", allusion aux règles strictes imposées aux Iraniens par les dirigeants de la République islamique.

Comment réagit le gouvernement israélien ? Dimanche, le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, s'est engagé à faire cesser les actes de ségrégation et la violence des ultra-orthodoxes à l'égard des femmes. Il a également réaffirmé qu'Israël est un Etat "démocratique, occidental, libéral".

"Nous combattons pour préserver l'âme de la nation et la nature de l'Etat", a renchéri le président Shimon Peres mardi lors d'un événement organisé dans sa résidence officielle et retransmis par la télévision. "Toute la nation devra se mobiliser pour sauver la majorité des griffes d'une petite minorité, qui met à mal nos valeurs les plus sacrées. (...) Personne n'a le droit de menacer une petite fille, une femme ou qui que ce soit, en aucune manière", a-t-il ajouté. "Ils ne sont pas les seigneurs de cette terre."

Quel est le poids des ultra-orthodoxes en Israël ? Près de 9 % de la population israélienne ferait partie de cette mouvance, indique La Croix. Mais, avec une moyenne de sept enfants par famille - contre trois pour les autres familles juives israéliennes - cette proportion devrait passer à 15 % en 2025, selon les prévisions du gouvernement relayées par le Jérusalem Post.