Sourdes, elles sont privées d'avion

Le groupe a pu enregistrer ses bagages à l'Aéroport de Marseille (ci-dessus)
Le groupe a pu enregistrer ses bagages à l'Aéroport de Marseille (ci-dessus) © Maxppp
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et Nathalie Chevance, correspondante d'Europe 1 à Marseille, et AFP , modifié à
18 personnes n'ont pu prendre leur avion dimanche à Marseille pour "des raisons de sécurité".

Ils se sont vus refuser l'embarquement en raison de leur handicap. Un groupe de 22 voyageurs, dont 18 personnes sourdes et muettes, n'a pas pu prendre dimanche à Marseille le vol d'Air Méditerranée pour la Turquie pour "des raisons de sécurité".

Le vol étant prévu dans la nuit de dimanche à lundi à 5 heures du matin, "tout le groupe a pu enregistrer sans problème et leurs valises sont parties en soute", a expliqué Fabienne Guiramand, interprète en langue des signes, dont la mère faisait partie du groupe.

Un problème de sécurité évoqué

"Le pilote a décidé qu'il n'avait pas à prendre ce groupe de personnes sourdes, considérant d'une part qu'il n'avait pas été prévenu et d'autre part qu'il y avait un problème de sécurité", a raconté à Europe 1, Fabienne Guiramand.

"Ce n'est pas le cas des personnes sourdes. Elles sont tout à fait capables d'intégrer les consignes de sécurité qui sont dispensées par les hôtesses dans un avion. Elles maitrisent le français écrit. Elles ont juste une autre langue qui est la langue des signes. Elles sont tout à fait autonomes et capables d'intégrer les consignes de sécurité. Si le pilote est effectivement le seul maître à bord pour évaluer les risques, il aurait dû se déplacer et au moins rencontrer les personnes. Je trouve que c'est un manque de respect profond. Ce qu'il n'a pas fait du tout", regrette-t-elle.

"C'est un manque de respect profond" :

Des "personnes à mobilité réduite"

"Les malentendants sont considérés comme des personnes à mobilité réduite, et nous devons mettre en place des personnels supplémentaires dans ces cas-là", a expliqué Anne Loubet, directrice générale de la compagnie, à Libérationqui révélait l'affaire mardi soir.

La compagnie se défend en précisant qu'il y avait aussi dans le groupe des personnes sourdes et aveugles. Une information totalement fausse. Dans ce cas, il aurait fallu effectivement un encadrement spécifique.

La famille de Marcelle déplore cette mauvaise foi et demande, comme les autres, le remboursement du voyage. Pour elles, il y a eu discrimination. Le groupe compte également porter l'affaire devant l'ex-Halde (Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité) désormais fondue dans le nouveau poste de Défenseur des droits.

Incompréhensible pour Bachelot

La ministre des Solidarités, Roselyne Bachelot, a pour sa part, demandé mercredi au Défenseur des droits "un point sur les discriminations que subissent encore les personnes handicapées dans l'accès aux transports". "Dans un vol aérien, une personne sourde est dans la même situation qu'une personne qui ne comprend pas la langue de l'équipage. Devrons-nous désormais réserver l'accès à bord aux seules personnes qui parlent l'anglais ou le français ?", s'est interrogée la ministre, qui a dit "ne pas comprendre qu'en 2011 de telles discriminations se produisent encore". Le Défenseur des droits, Dominique Baudis, a annoncé mercredi soir se saisir du dossier.