Mendier avec ses enfants, est-ce illégal ?

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Malgré un arsenal juridique impressionnant, la mendicité des mineurs est difficile à punir.

La justice belge vient de donner raison à une jeune femme de 20 ans qui faisait la manche avec ses deux filles âgées de 3 ans et de 7 mois à Bruxelles. "La circonstance qu'une jeune mendiante ayant des enfants en très bas âge les garde auprès d'elle lorsqu'elle sollicite la générosité des passants (…) ne constitue pas une infraction pénale", a indiqué la chambre constitutionnelle, qui a acquitté la jeune femme. Mais qu’en est-il en France ?

"La France est dotée d’un véritable arsenal juridique en matière de mendicité et plus précisément en ce qui concerne les mineurs", explique Frédéric Pichon, spécialiste du droit pénal. Le cas de la jeune maman en Belgique ne pourrait donc pas se produire en France.

"Mais il est clair qu’il existe un problème en matière d’application, souligne le spécialiste, si vous arrêtez une maman qui fait la manche avec son bébé et que vous la placez en garde à vue, que faire de l’enfant ?", s’interroge Frédéric Pichon. Si les textes existent, rien ne semble prévu pour assurer leur application.

Le point sur ce que disent les textes :

Qu’appelle-t-on mendicité ? La mendicité est tout simplement le fait de demander l'aumône. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, une personne qui fait la manche « n’est pas nécessairement un sans domicile fixe et tous les SDF ne sont pas des mendiants », explique Sabine Haddad, avocate au barreau de Paris.

Est-elle légale ? Oui, la mendicité est légale, mais elle n’est pas autorisée partout. "L'exercice de la mendicité ne constitue plus un délit depuis l'entrée en vigueur du nouveau code pénal au début des années 1990", explique Sabine Heddad. Mais les maires disposent du droit de contrôler la mendicité sur leur commune.

Mendier avec ses enfants est-il légal ? Dans les textes ce n’est pas la mendicité qui est condamnable, mais la notion d’exploitation et de manque de soins sur mineurs. Explications : "Le fait, par un ascendant légitime, naturel ou adoptif ou toute autre personne ayant autorité sur un mineur de quinze ans, de priver celui-ci d'aliments ou de soins est puni de sept ans d'emprisonnement et de 10.0000 euros d'amende", stipule l’article 227-15 du code pénal. "Constitue notamment une privation de soins le fait de maintenir un enfant de moins de six ans sur la voie publique ou dans un espace affecté au transport collectif de voyageurs, dans le but de solliciter la générosité des passants".

A cela s’ajoute la notion d’exploitation. La loi du 18 mars 2003 précise que "l'exploitation de la mendicité est punie de cinq ans d'emprisonnement et d'une amende de 75.000 Euros lorsqu'elle est commise à l'égard d'un mineur".

"Le problème n’est donc pas dans les textes", souligne Frédéric Pichon, "mais dans l’interprétation ou l’appréciation du délit", souligne-t-il, car il peut être difficile de prouver une privation de soins. "De plus, il existe une très grande tolérance en France", conclut l’avocat.