"L'entartreur" de Raffarin conteste

"Raffarin est utilisé pour faire passer la droite comme sympathique", avait déclaré l'entartreur.
"Raffarin est utilisé pour faire passer la droite comme sympathique", avait déclaré l'entartreur. © Max PPP
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avec AFP , modifié à
Celui qui avait jeté une assiette de chantilly sera fixé sur son sort le 30 mai prochain.

Romain, 25 ans, se définit comme un "terroriste pâtissier". Membre de l'organisation "Al Qaïtarte", il avait, en février dernier, entartré l'ancien Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, lors de son passage dans le Rhône. Ce jeune homme de 25 ans a contesté vendredi devant la justice que la crème chantilly de sa tarte puisse être considérée comme une arme. "C'est la crème chantilly qui serait considérée comme une arme !", s'est offusqué Me Sylvain Cormier, à sa sortie du bureau du procureur, où son client a été convoqué selon la procédure du "plaider-coupable". "C'est une façon d'attaquer Sarkozy à travers Raffarin" et de dire le "ras-le-bol de la jeunesse", a affirmé Romain, tout en insistant sur la dimension d'"acte humoristique" de son geste.

Sa contestation de toute "violence avec arme", en l'espèce en jetant au visage "une assiette en carton remplie de chantilly" selon sa convocation, sera tranchée par le tribunal correctionnel de Lyon, le 30 mai. 

"Dada !"

Le 24 février, deux membres de l'organisation "Al Qaïtarte", accompagnés d'un cameraman, se rendent à la dédicace du livre de Jean-Pierre Raffarin. "Dès qu'on l'a aperçu, on a mis la chantilly sur les cartons, et on a foncé", a raconté Romain, étudiant en master d'anthropologie et photographe à ses heures perdues.

Son camarade vise une joue et prend la tangente, en clamant "Dada !", en référence à ce mouvement d'artistes du début du siècle. Le cameraman n'a eu que le temps de prendre une image floue avant de décamper. Une seconde après, Romain s'en est pris à l'autre côté du visage et clame "vaincra !" devant l'assemblée. Dans sa fuite, il esquive trois agents assurant la sécurité de l'ancien homme d'Etat, mais se fait plaquer au sol… par le chauffeur de Nora Berra, secrétaire d'Etat à la Santé et élue locale, qui accompagnait Jean-Pierre Raffarin.

L'interview d'"Al Qaïtarte" :

"Leçon de morale des flics"

La première garde à vue du jeune homme dure près de six heures, avec "leçon de morale des flics", a-t-il affirmé, photos et relevé d'empreintes. "Raffarin est utilisé pour faire passer la droite comme sympathique. A travers lui, nous attaquons Sarkozy que l'on ne pourrait pas approcher", assure ce garçon coiffé d'une crête iroquoise

"Al Qaïtarte", qui rassemble une quinzaine "d'activistes subversifs pâtissiers", a été fondé en 2008 autour d'étudiants en histoire de l'art à l'université Lyon II. "L'organisation" n'en est pas à son coup d'essai mais agit toujours dans la non-violence. Lors de la campagne pour les élections municipales il y a quatre ans, ils s'en étaient pris à Dominique Perben, député UMP du Rhône, semant chantilly et boules puantes dans ses meetings.

Cohn-Bendit, Collomb déjà ciblés

Les membres d'"Al Qaïtarte" se sont également tournés vers les partis de gauche, jugés "lâches" face au capitalisme, sur les questions des sans-papiers ou des centres de rétention. L'écologiste, Daniel Cohn-Bendit, le président PS de Rhône-Alpes, Jean-Jack Queyranne, ou encore le maire socialiste de Lyon, Gérard Collomb, ont notamment subi un "attentarte". L'artiste Ben, devenu "un produit marketing" selon eux, a aussi fait les frais des revendications de ces militants, admirateurs du "serial entarteur" belge Noël Godin. Comme lui, ils entendent s'attaquer au "capital image" de ces personnages publics et faire leur "contre-communication".

Romain a aujourd'hui un regret : lors de l'entartage de Jean-Pierre Raffarin, il n'a pu lancer des tracts de revendication qui proclamaient "la revanche de la France d'en bas". Il accepterait volontiers une condamnation à des travaux d'intérêt général..."dans une pâtisserie".