Hôpitaux: des bugs informatiques mortels ?

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Sophie Amsili , modifié à
Après la mort d'une patiente, la ministre de la Santé a assuré sur Europe 1 que "si des logiciels dysfonctionnent, ils seront retirés".

La réponse. "Si des logiciels dysfonctionnent, ils seront évidemment retirés." La ministre de la Santé Marisol Touraine a voulu apporter une réponse ferme mercredi matin sur Europe 1 à l'affaire révélée par Le Parisien-Aujourd'hui en Francedaté du jour. Le quotidien rapporte le cas de Lydia Cohen, 72 ans, morte à l'hôpital André-Mignot de Versailles en novembre 2011. Son allergie à un antibiotique, l'amoxicilline était bien notée dans son dossier médical, mais le logiciel utilisé pour les prescriptions n'a pas intégré cette donnée. Un bug qui a coûté la vie de la patiente.

"Il n'est pas acceptable que la vie de patients ou l'avenir des patients soient mis en danger pour cette raison", a affirmé Marisol Touraine. "Il va falloir regarder très précisément ce qui s'est passé", a-t-elle poursuivi. "Si une enquête est nécessaire, elle sera évidemment lancée".

>> Revoir l'interview de Marisol Touraine, ministre de la Santé :

Les allergies ne sont pas intégrées. Un dysfonctionnement tel que celui dont a été victime Lydia Cohen ne serait pas exceptionnel, d'après le rapport de la commission régionale de conciliation et d’indemnisation (CRCI) des accidents médicaux d’Ile-de-France paru en mars et que Le Parisien-Aujourd'hui en France s'est procuré : "la plupart des systèmes informatiques disponibles dans les hôpitaux ne sont pas actuellement performants pour permettre une alerte. En effet, l’information allergie ne peut être intégrée et connectée à une prescription afin de générer une alerte". Les auteurs du rapport résument : "ces systèmes, en place dans de nombreux établissements, n'assurent pas une sécurité fine, en particulier dans le domaine des éventuelles allergies."

"Un bouc émissaire facile" ? L'Agence nationale de sécurité du médicament, citée par le quotidien, reconnaît avoir "reçu plusieurs dizaines de signalements de dysfonctionnements sur ces logiciels depuis 2012", sans faire de mort. De leur côté, les sociétés informatiques se défendent : "l'erreur zéro n'existe pas, même en informatique !", souligne Yannick Motel, directeur délégué de la fédération Lesiss qui représentent les éditeurs de logiciels de santé. "Attention à ne pas chercher un bouc émissaire facile. Je rappelle qu'il y a plus de 18.000 morts chaque année à cause de problèmes de médicaments."

Une certification en 2015. Ces bugs pourraient être réglés par une certification des logiciels mais celle-ci ne sera pas effective avant 2015. Dans tous les cas, ils ne remplaceront pas les médecins, a souligné Marisol Touraine sur Europe 1 : "la prescription reste un acte individuel et le logiciel d'aide à la prescription ne peut pas se substituer à la prescription personnalisée, individualisée, par le médecin", a-t-elle rappelé. "Je ne voudrais pas qu'à travers cette affaire, on jette, une fois de plus, un soupçon sur la manière dont les patients sont accueillis dans les hôpitaux où un travail très remarquable se fait."