Honoraires : les médecins dans le viseur

Le Conseil de l'ordre va être amené à se positionner par rapport aux pratiques de 29.000 médecins en France, soit un quart des praticiens qui utilisent les dépassements d'honoraires.
Le Conseil de l'ordre va être amené à se positionner par rapport aux pratiques de 29.000 médecins en France, soit un quart des praticiens qui utilisent les dépassements d'honoraires. © MAXPPP
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avec Eve Roger , modifié à
Le Conseil de l'Ordre va rendre sa position sur les dépassements d'honoraires de certains praticiens.

700 euros pour une consultation chez un cancérologue à l'hôpital, 5.000 euros pour une opération de prothèse à la hanche… Une petite minorité de médecins explosent régulièrement les tarifs en toute impunité. Selon les informations d'Europe 1, le Conseil national de l'Ordre des médecins va rendre public, mardi, sa position vis-à-vis des dépassements d'honoraires et présenter quelques recommandations.

Qui pratiquent ces dépassements d'honoraires ?

Le Conseil de l'Ordre va être amené à se positionner par rapport aux pratiques de 29.000 médecins en France, soit un quart des praticiens qui utilisent les dépassements d'honoraires.

Tous les médecins, inscrits en secteur 2, ont le droit de fixer leurs prix librement et de faire payer leurs patients au-delà du prix remboursé par la Sécurité sociale. Mais depuis 10 ans, les dépassements ne cessent d'augmenter : 900 millions d'euros en 1990 contre plus de 2,5 milliards aujourd'hui. Cet argent, qui entre dans les caisses des médecins, reste à la charge des mutuelles ou des malades eux-mêmes. Les dernières études montrent que, plus les dépassements sont élevés, plus les patients rechignent à aller se faire soigner.

Qui est responsable ?

Il s'agit d'abord de certains médecins spécialistes. Par exemple, la moitié des ophtalmologues, gynécologues, oto-rhinos sont aujourd'hui en secteur 2. Certains facturent la consultation plus de 100 euros alors que la Sécurité sociale ne rembourse que 23 euros. Les chirurgiens installés en libéral, sont également concernés alors que près de 85% d'entre eux sont inscrits en secteur 2. Pour 10% d'entre eux, les dépassements atteignent même 240% en moyenne du prix de la Sécurité sociale.

Enfin, certains médecins hospitaliers, comme par exemple ces professeurs de médecine qui ont des consultations privées à l'intérieur des hôpitaux publics, demandent dix à douze fois le  prix fixé. Une opération du genou, par exemple, peut être facturée 6.000 euros alors qu'elle n'est remboursée qu'à 555 euros.

En 2011, 250 médecins libéraux et 28 praticiens hospitaliers se sont fait rappeler à l'ordre par l'assurance maladie parce qu'ils dépassaient les limites.

Quelles solutions ?

Le Conseil de l'Ordre est chargé de faire respecter le code de déontologie médicale. L'article 53 précise que le médecin, lorsqu'il fixe ses tarifs, doit faire preuve de "tact et de mesure". Les pouvoirs publics attendent du Conseil de l'Ordre qu'il instaure des chiffres et des montants précis.

Mais pour Odile Plichon qui vient de publier le Livre noir des médecins stars, ce "flou convient bien au Conseil de l'Ordre". "Cela lui évite de trop sanctionner certains médecins. C'est un peu compliqué dans sa culture. Il y a vraiment obligation aujourd'hui, puisqu'on ne peut pas faire confiance à la nature humaine, de dire : le tact et la mesure, c'est 3 fois ou 5 fois le tarif Sécu. Je crois que ça serait sain pour tout le monde", affirme-t-elle au micro d'Europe 1. 

Pour cette journaliste, la solution pour "ces médecins qui dérapent" : "faire attention à la personne qu'on a face à soi, quitte à demander énormément à un émir qui a plein d'argent et à ne rien demander, ou à appliquer le tarif Sécu, à ceux qui ont de gros problèmes financiers", ajoute-t-elle. 

Le gouvernement a d'ores et déjà prévu de s'attaquer aux dépassements d'honoraires. Dans les prochains jours, Marisol Touraine, la ministre de la Santé, va entamer des négociations avec les syndicats de médecins, en espérant obtenir avant la fin de l'année, un encadrement des tarifs du secteur 2 par spécialités mais également par régions.