Discrimination : EasyJet devant la justice

La compagnie aérienne à bas coûts easyJet est poursuivie par trois handicapés à qui l'accès à un avion avait été refusé.
La compagnie aérienne à bas coûts easyJet est poursuivie par trois handicapés à qui l'accès à un avion avait été refusé. © Reuters
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Frédéric Frangeul avec agences , modifié à
Trois clients handicapés qui se sont vu refuser l’accès à un avion ont porté plainte.

La compagnie aérienne EasyJet a-t-elle fait preuve de discrimination à l’égard de plusieurs clients handicapés ? La question est au cœur des débats depuis vendredi au tribunal de Bobigny, où la compagnie aérienne est poursuivie par trois clients handicapés. Parce qu'ils n'étaient pas accompagnés, l’accès à un avion leur avait été refusé à l'aéroport de Roissy, le 12 janvier 2009 ainsi que les 9 et 19 novembre 2009.

Une peine amende de 70.000 euros a été requise à l'encontre de la compagnie. EasyJet, qui comparaît pour la première fois devant un tribunal correctionnel pour ce délit, doit également être jugée à Paris en mars 2012 dans une procédure similaire. Le jugement sera mis en délibéré.

Une discrimination

Selon le procureur, Abdelkrim Grini, les "faits reprochés sont graves" car ils "portent atteinte à la dignité humaine". EasyJet met en place "une politique commerciale agressive qui consiste à compresser au maximum les coûts d'exploitation et si pour cela il faut avoir une politique discriminatoire, tant pis", a-t-il déclaré.

"C'est de la discrimination totale, c'est écoeurant. Ils ont tort, il faut qu'ils assument leur boulette", a souligné Laurent Giammartini, un des trois plaignants en fauteuil roulant, qui a déjà voyagé seul dans plusieurs compagnies.

De son côté, Karine Viera, 32 ans, en fauteuil roulant depuis 16 ans, a tenu à rappeler qu'elle est "autonome dans son quotidien" avec "un enfant d'un an à charge", et "conduit une voiture". "Je ne vois pas en quoi je diffère des autres passagers ?", s'est-elle interrogée, avant de souhaiter que "cela ne se reproduise plus".

La compagnie évoque des raisons de sécurité

Avec ces refus d'embarquement, la compagnie britannique affirme qu'elle s'est conformée aux réglementations européenne et britannique et évoque des raisons de sécurité. "Une réglementation européenne autorise les compagnies à refuser qu'une personne handicapée embarque si elle n'est pas accompagnée, s'il y a un risque pour la sécurité", avait dit l'avocat d'EasyJet Me Philippe Van der Meulen.

"Il faut que les passagers handicapés puissent mettre eux-même le masque à oxygène, le gilet de sauvetage, mettre et enlever la ceinture de sécurité, comprendre les instructions en cas d'urgence et évacuer par leurs propres moyens", a ajouté un responsable des opérations à terre d'EasyJet, interrogé par le tribunal.

Selon l’avocat de la compagnie aérienne, "chaque année, EasyJet embarque environ 350.000 personnes à mobilité réduite, qui sont accompagnées ou qui sont suffisamment autonomes pour embarquer seules et évacuer l'appareil rapidement en cas de problème".  Le Défenseur des droits est partie civile dans ce procès.

Air France condamnée en 2009 pour des faits similaires

En février 2009, Air France avait été condamnée par la cour d'appel d'Aix-en-Provence, dans les Bouches-du-Rhône, à verser 2.000 euros de dommages et intérêts à un couple de malvoyants qui l'avait assignée pour discrimination et auquel elle avait refusé de vendre des billets parce qu'ils étaient accompagnés d'un enfant de six mois.