Trop-perçus : Pôle emploi refuse un "moratoire"

ôle emploi les appelle les "indus": fin janvier 2013, environ 300 millions d'euros versés par erreur à des chômeurs n'avaient pas été recouverts.
ôle emploi les appelle les "indus": fin janvier 2013, environ 300 millions d'euros versés par erreur à des chômeurs n'avaient pas été recouverts. © MAX PPP
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Pôle emploi réclame 300 millions d'euros aux chômeurs. Les associations sont vent debout.

L'INFO. Pôle emploi réclame 300 millions d'euros aux chômeurs, au titre des "indus". Dans le jargon de l'Unedic, l'organisme qui gère l'assurance-chômage, les "indus" sont ces sommes versées par erreur aux personnes en recherche d'emploi. Les associations de défense des droits des chômeurs, reçues vendredi par le ministre du Travail Michel Sapin, réclament un "moratoire" sur ces "trop-perçus" que doivent rembourser certains chômeurs. Pôle emploi refuse, et le gouvernement tempère.

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À quoi sont dus... les "indus"? Dans la plupart des cas, indique Pôle emploi, cet argent indûment perçu est la conséquence d'une confusion ou d'un manque d'information (80% des cas) : lorsque des chômeurs oublient de préciser qu'ils ont travaillé en intérim deux ou trois jours dans le mois, par exemple. Mais il arrive également que Pôle emploi fasse des erreurs et verse, sans le devoir, trop d'argent à un inscrit. Les fraudes avérées, sont, en revanche, "beaucoup plus rares", reconnaît l'organisme.

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"Je suis victime de leur incompétence". Les montants demandés par les chômeurs peuvent aller jusqu'à 10.000 euros. Christine, qui témoigne au micro d'Europe1, s'est vue, elle, réclamer 4.700 euros. Elle vient d'être mise en demeure, avec menace de saisie sur salaire. "Je suis choquée, choquée. Je viens de recevoir un vulgaire courrier, avec un tableau, qui précise simplement les trop-perçus", s'indigne-t-elle. Christine s'estime "victime de l'incompétence de Pôle emploi" et juge donc que c'est à l'institution de se débrouiller toute seule.

Faut-il tout payer d'un coup ? Christine, par exemple, n'a pas les moyens de tout rembourser d'un coup. L'Unedic assure de son côté que des échéanciers sont proposés aux chômeurs. Et que certaines dettes peuvent être effacées, par Pôle emploi (en-dessous de 650 euros) ou des "instances paritaires régionales" qui tranchent de "manière discrétionnaire". Mais Christine assure qu'on ne lui a "pas proposé de solution" lorsqu'elle a reçu le courrier. Elle a donc décidé d'envoyer un premier chèque de 50 euros à Pôle emploi, "pour enrayer le processus" et prouver sa "bonne foi". Elle a proposé à l'opérateur public, affirme-t-elle, de verser ensuite 50 euros par mois. "Si je donne plus, je ne pourrais jamais reconstruire ma vie", assure-t-elle. Pour l'heure, Pôle emploi ne lui a pas donné de réponse, mais a "bien encaissé son chèque".

"Il n'y aura pas de moratoire"

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Les associations "en colère". Pour évoquer ces questions, Michel Sapin a réuni vendredi le médiateur de Pôle Emploi et les représentants de plusieurs associations de défense des chômeurs. Si, du côté du gouvernement on se félicite d'une réunion qui a permis "des échanges sur le fond", les associations sont, elles, beaucoup plus réservées. "Nous avons été traités avec un vrai mépris. On ne nous a rien proposé hormis une nouvelle réunion avant la prochaine conférence sociale (en juillet, ndlr)", a réagi Zalie Mansoibou, du MNCP.  "De la part d'un gouvernement de gauche, c'est hyper décevant". Pour Malika Zediri, représentante de l'Association pour l'emploi, l'information et la solidarité des chômeurs, les pouvoirs publics "ne prennent pas la mesure de la détresse sociale profonde alors que la situation appelle un plan d'urgence".

Comment résoudre le problème ? Pôle emploi s'est récemment engagé dans un "plan d'action pour l'amélioration du taux de recouvrement des indus", selon une note interne consultée par l'AFP. De plus, l'opérateur public veut s'attaquer à ces dysfonctionnements en intervenant le plus vite possible, via par exemple l'envoi de SMS au lieu de courrier. Les associations réclament, de leur côté, la suspension pure et simple de tous ces remboursements. "On demande que soit pris le temps de réexaminer les dossiers, car, dans une famille de chômeurs, c'est de l'argent dépensé : tout va à la nourriture ou à la résorption des dettes", argumente Malika Zediri, de l'Apeis.

Il faut rembourser, insiste Pôle emploi. "Il n'y aura pas de moratoire. Je ne suis pas sûr d'ailleurs qu'il faille de mesure générale. Il faut partir du principe que 'l'indu' a été perçu à tort. Même s'il n'y a pas de fraude, il n'y a pas de raison de considérer que pour l'ensemble des chômeurs, dans toutes les situations, il faille effacer cette dette", a réagi vendredi soir sur Europe 1 Jean Bassères, directeur général de Pôle emploi. "Ce qu'il faut faire, c'est, légitimement, avoir le remboursement de ces indus. Mais c'est surtout traiter au mieux la situation individuelle des personnes", poursuit Jean Bassères. Et d'enchaîner : "c'est pour cela qu'on insiste beaucoup sur la nécessité de bien faire connaitre aux chômeurs les circuits de décision, puisque nous nous pouvons mettre en place des plans de règlement". "Nous pouvons, avec les partenaires sociaux, également mettre en place des remises de dette. Tout l'objectif de Pôle emploi est de traiter le plus finement possible, en fonction de la situation des chômeurs, le problème des indus", assure le directeur de Pôle emploi.