Travail le dimanche : quel impact économique ?

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Damien Brunon , modifié à
DECRYPTAGE - Alors que la question du travail dominical fait débat, quelles en seraient les retombées économiques ?

L’INFO. La justice avait décidé qu’ils devraient désormais fermer le dimanche, mais 14 des 15 magasins Castorama et Leroy Merlin concernés par le jugement ont tout de même accueilli des clients dimanche. La fronde des enseignes de bricolage du groupe Mulliez pose à nouveau la question de l’ouverture dominicale des magasins et des inégalités liées à la législation actuelle.

Une législation injuste ? A l’heure actuelle, le principe de base est inscrit dans l’article 3132-3 du Code du Travail (lien): le repos hebdomadaire doit être donné le dimanche. L’idée a d’ailleurs été récemment confirmée par la Cour de cassation dans un jugement datant du 17 octobre 2012.

Des dérogations sont toutefois prévues pour certains types de commerce comme la restauration, les musées, les entreprises de presse ou l'ameublement et depuis la loi Mallié de 2009 dans les zones d’intérêt touristique et les Périmètres d’Usage de Consommation Exceptionnel (PUCE). La décision se fait au niveau de la préfecture de région et peut parfois être injuste. “On peut avoir deux magasins à 100 mètres l’un de l’autre, l’un a le droit d’ouvrir et l’autre non”, illustre pour Europe1.fr Thierry Vallat, avocat spécialiste du droit du travail.

Un intérêt économique. Selon Agnès Verdier-Molinié, directrice de la Fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques (iFRAP), la libéralisation du travail dominical serait un vrai plus pour l’économie. "Nous avons estimé qu'ouvrir le dimanche, et on parlait aussi de 24h/24 7j/7, pourrait créer 200.000 emplois potentiels, et 11 milliards de recettes nouvelles pour les caisses sociales”, explique-t-elle au micro d’Europe1.

"On veut protéger les salariés contre eux-mêmes"par Europe1fr

Bénéfique pour la consommation. A priori difficiles à imaginer, ces chiffres trouvent une logique dans trois axes. Tout d’abord, l’ouverture dominicale permettrait une meilleure consommation des touristes en France. Elle éviterait dans un second temps à des frontaliers d’aller trouver des magasins ouverts chez nos voisins européens.

Enfin, et c’est probablement l’effet inattendu du travail dominical : l’extension des heures d’ouverture augmente la consommation. “Un certain nombre d’études empiriques suggèrent que l’extension des horaires d’ouverture des magasins pourrait inciter les individus à consacrer une partie plus importante de leur temps à faire leurs courses et à consommer davantage”, développe le blog Ecopublix en 2009 en s’appuyant sur une étude néerlandaise. A l'inverse, d'autres répliquent que ce n'est pas le nombre de jours ouverts qui compte mais le budget : si on n'a pas d'argent, rajouter une journée d'ouverture n'aura aucun effet, si ce n'est étaler sur sept jours des dépenses auparavant faites sur six jours.

Mais des conséquences sociétales. Malgré les effets positifs sur la consommation, le travail dominical soulève tout de même des inquiétudes. “Les populations qui travaillent le dimanche sont souvent précarisées, ça dépend vraiment des magasins mais parfois, les employés sont corvéables à merci”, affirme l’avocat Thierry Vallat.

Une étude américaine montrait également au milieu des années 2000 que la légalisation du travail dominical aux Etats-Unis avait fait baisser la fréquentation des lieux de cultes de 5%. Parallèlement, il avait fait augmenter la consommation de drogue et d’alcool entre 5% et 15% dans la population. Si ces conclusions ne peuvent pas être étendues à la France, elles montrent tout de même les risques éventuels que peut avoir une telle législation sur la société.