Mauricio Pochettino 30:57
  • Copié
Colin Abgrall
Actuel entraîneur du Paris Saint-Germain et ancien capitaine du club de la capitale, Mauricio Pochettino est l’invité exceptionnel d’Europe 1 Sport. Depuis le camp des loges, centre d'entraînement du club, il a répondu ce samedi aux questions du journaliste et éditorialiste Jacques Vendroux, de Lionel Rosso et du consultant Europe 1 Jimmy Algerino. À retrouvez en intégralité dans Europe 1 Sport, présenté par Lionel Rosso.
EXCLUSIF

Assez rare dans les médias, l'entraîneur argentin de 50 ans a accordé une interview exclusive à Europe 1. Après avoir remporté le championnat de France, son premier en tant qu’entraineur et le 10e de l'histoire du club, Mauricio Pochettino, en poste depuis janvier 2021, revient sur sa saison et celle de ses joueurs, analyse le football français, décrypte sa gestion de l’effectif, évoque son avenir et également les supporters parisiens.

Sur le 10e titre de champion de France : "C’était un rêve"

"C’est une belle satisfaction. Je suis très heureux et fier. C’était un rêve. Je suis arrivée ici en 2001 comme joueur. Nous n’avions pas eu l’opportunité de remporter le championnat. Aujourd’hui, ce rêve s’est réalisé. Je suis très content de remporter un titre avec le Paris Saint-Germain, le 10e titre est une très bonne chose pour le club. "

Son bilan en tant qu’entraineur : "Le 10e titre ne doit pas être sous-estimé"

"Les attentes étaient élevées. Il est clair que l'objectif principal du Paris Saint-Germain ces dernières années a été la Ligue des champions, mais le 10e titre d'un club de 50 ans ne doit pas être sous-estimé. 50 ans d'histoire, 10 titres. Je pense que cela nous place dans une bonne position en France et il est vrai que cela peut sembler peu pour un club comme le PSG qui veut toujours gagner la Ligue des champions. Parfois, cela nous joue des tours. Je pense que nous devons donner de la valeur à ce titre car nous devons cimenter l'histoire du club avec des titres. Je suis arrivé l'année dernière, l'équipe était troisième au classement, avec beaucoup de problèmes, avec 12 joueurs blessés, le COVID... nous n’avons pas gagné le championnat et c'était une grande frustration. C'est pourquoi il faut lui donner de la valeur, même s'il est vrai que la déception a été grande de ne pas gagner la Ligue des champions."

La valeur de ce titre dans sa carrière : "Un titre gagné par l’équipe"

"C'est un titre que j'aimerai toujours en tant que coach. J'ai été dans des équipes comme l'Espanyol Barcelone, Southampton et Tottenham où il est très difficile de gagner un titre de champion... c'est la première fois que j'ai la chance de le faire, avec le Paris Saint-Germain, et pour moi c’est très spécial. C'est un titre gagné par l'équipe, remporté par les 30 joueurs. La participation de tous les joueurs est fondamentale"

Son regard sur le football français : "Il faut lui accorder beaucoup de crédits"

"Nous sommes dans le pays champion du monde et parfois, en parlant du championnat français, on le minimise alors qu'il faut lui accorder beaucoup de crédit. La France est une pépinière de joueurs incroyables. L'équipe nationale obtient de grands résultats. Il y a de grands entraîneurs comme Didier Deschamps et de nombreux joueurs français jouent dans le monde entier. Je pense que le football français est sous-estimé. Quand vous travaillez ici, vous vous rendez compte que c'est un football agressif, un football dynamique, un football très physique. La France est l'un des principaux pays qui alimente les grands championnats. Le championnat français a un niveau très élevé."

Comment il gère toutes les rumeurs : "Je le prends naturellement et calmement"

"Je suis une personne calme. Je suis une personne qui donne de l'importance aux choses qui le méritent vraiment. Je ne suis pas seulement calme dans le football mais aussi dans la vie de tous les jours. Je comprends qu'être au Paris Saint-Germain signifie être très exposé. Qu'il y a beaucoup de rumeurs... Je le prends naturellement et calmement. Lorsque je me suis préparé à devenir entraîneur, en espérant entraîner un jour un club comme le Paris Saint-Germain, toute mon expérience en tant que joueur, la préparation que j'ai eue et l'expérience que j'ai acquise dans les clubs précédents m'ont aidé à voir les choses calmement et à avoir une vision plus juste de la réalité des choses, à ne pas vivre des réalités parallèles qui m'affectent de manière négative."

Sur son avenir : "Je donnerai mon point de vue"

"Il me reste une année de contrat si c'est ce que vous voulez dire. Mon désir et le défi de commencer une nouvelle saison sont intacts, indépendamment de toutes les rumeurs qui peuvent exister. Bien sûr, il y a aussi la direction du club qui prend toujours les décisions. Qui sont toujours respectables. Ce sont eux qui doivent décider du nouveau projet et, logiquement, moi, en tant qu'entraîneur, je donnerai mon point de vue et je participerai également en expliquant le passé, en expliquant la situation actuelle et ce que pourrait être la situation future."

Sur ses autres passions : "J’aime le rugby"

"Ma passion c’est le football et ma famille. Le football et mes amis. Le football et mon pays, où mes parents et grands-parents ont grandi. Le pays où je suis né. C'est ma passion. Il y a d'autres sports que j'aime. J'aime le rugby parce que je pense que le rugby transmet certaines valeurs qui seraient très bienvenues dans le football. J'avais l'habitude d'en parler, quand j'étais footballeur ici au PSG, et il y avait Fabien Galthié, qui était capitaine du Stade Français ainsi que Diego Dominguez et beaucoup d'autres joueurs. J'ai toujours dit, quand j'étais capitaine du PSG et que Fabien et Diego étaient les capitaines du Stade Français, que nous devions transférer les valeurs, le sentiment de groupe et d'appartenance à une équipe au football. Même si c'est un sport différent avec des caractéristiques différentes."

Sur ses idoles : "Maradona avait un charisme et une énergie impressionnante"

"Mon idole a toujours été Diego Maradona. Ce n'était pas seulement mon idole quand j'étais petit et que je le regardais jouer. J'ai grandi en pensant à Maradona et lorsque j'ai eu l'occasion de le rencontrer et de jouer avec lui, il est devenu bien plus qu'une idole. J'ai appris à le connaître de plus près. Il vous faisait sentir comme si vous étiez son coéquipier. Je me souviens du premier jour où je l'ai vu, j'étais au Newell’s Old Boys. La première chose qu'il  m’a dit c'est : 'tu vas être mon coéquipier et tu vas être le meilleur joueur à ton poste en Argentine'. Maradona avait un charisme et une énergie impressionnante. C'est un joueur unique, non seulement par son talent mais aussi par son leadership et sa valeur humaine."

Sur les problèmes avec les supporters : "C’est quelque chose qui vous affecte"

"Bien sûr, ce n'est pas quelque chose d'agréable à vivre. Nous avons connu des matchs au Parc des Princes où vous êtes triste parce que vos fans n'encouragent pas l'équipe. C'est quelque chose qui vous affecte. Mes enfants sont des fans du Paris Saint-Germain et de l'Espanyol parce que leur père y a joué. Mes enfants avaient toujours rêvé de venir au Parc des Princes. Nous avons toujours parlé de l'atmosphère ici et cette situation me rend triste, elle m'affecte parce que j'étais un joueur du PSG et maintenant je suis entraîneur dans ce club. J'espère que ce sera résolu. Je pense que c'est le souhait de tout le monde. Il faut chercher à se comprendre afin d'atteindre les objectifs que nous nous sommes fixés."

Sur sa gestion des stars et de l’effectif : "Ce qui a manqué, c’est le temps"

"Je pense que les choses se sont bien passées. Il n'y a pas eu de problèmes. Le football a besoin de temps. Le timing est différent d'un club à l'autre. Je pense que l'équipe se serait progressivement améliorée comme elle l'a fait lors des derniers matchs. Il faut remettre les choses dans leur contexte et expliquer les circonstances. Regardons en arrière. Lorsque nous avons joué le trophée des champions à Tel Aviv contre Lille, la moitié de l'équipe était en vacances. Nous avons joué avec des jeunes comme Kalimuendo, qui jouent aujourd'hui à Lens, et d'autres joueurs qui s'entraînaient depuis un jour ou deux comme Danilo ou comme Kimpembe... nous avons perdu. Et lors de la conférence de presse, on me demande si je me sens menacé en tant qu'entraîneur.  Je pense qu'ils sortent les choses de leur contexte dès le début."

"Ensuite, il y a eu quelques matchs internationaux. Les joueurs partent et reviennent. Nous jouions tous les deux ou trois jours et en plus de tout cela vient le COVID, les blessures, les suspensions. Nous avons eu très peu de temps pour que tout se mette en place et pour que nous réalisions une performance collective, ce qui est le plus difficile. Il faut du temps pour les individualités et pour que cela se traduise sur le terrain par un jeu collectif, il faut des heures ensemble et nous n'avons pas eu cela. Tout n'a pas été trop mauvais. Il existe un processus où ce qui a manqué, c'est le temps. Beaucoup de gens disent que le Paris Saint-Germain n'a pas besoin qu'on lui donne du temps. Mais vous pouvez donner du temps à Liverpool, vous pouvez donner du temps à Manchester City ou Chelsea. Il est important que nous comprenions que le contexte n'était pas le plus propice pour que ces joueurs parviennent à cette union collective et soient capables de performer. Ce n'est pas une excuse, mais c'est un exercice de réflexion que nous devons faire. Nous devons maintenant penser à de nombreuses autres choses qui doivent être corrigées, qui doivent être faites différemment à l'avenir. Nous le savons très bien, et le club le sait très bien. Il y a des choses qui doivent changer dans un avenir immédiat."

Sur les critiques envers Lionel Messi : "La saison prochaine sera différente"

"Tu ne peux pas parler de Messi de cette façon. C'est comme quand je parle de Maradona. Je ne parle pas d'un joueur ordinaire. Messi est au même niveau que Diego Maradona. Il est clair que le passage de Barcelone au Paris Saint Germain a été un changement dans lequel un processus d'adaptation a été nécessaire. Certaines circonstances ne lui ont pas permis de se sentir aussi à l'aise qu'à Barcelone où il avait passé 20 ans. Où il avait été le porte-drapeau du club. Juger Messi de cette manière est injuste. Je n'ai aucun doute sur sa qualité. Messi a suffisamment de talent pour faire ce qu'il a à faire. Il va le faire. La saison prochaine sera une saison complètement différente pour lui. Ce fut une année d'apprentissage, et pas seulement au niveau professionnel en venant au Paris Saint-Germain, dans un nouveau championnat et avec de nouveaux coéquipiers, mais aussi au niveau familial. Il faut en tenir compte. C'est un bouleversement important qui peut affecter un joueur."