Coupe du monde 2022 : la France «jamais meilleure que dans l'adversité», certifie Djorkaeff

Youri Djorkaeff a été champion du monde avec les Bleus en 1998
Youri Djorkaeff a été champion du monde avec les Bleus en 1998 © AFP
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avec AFP
Champion du monde 1998, Youri Djorkaeff a évoqué pour l'"AFP" la capacité de rebond des Bleus, "jamais meilleurs que dans l'adversité", au point que l'ex-attaquant, aujourd'hui conseiller football du président de la Fifa Gianni Infantino, voit des motifs d'espoirs dans les difficultés françaises avant le Mondial au Qatar.

Le début de la Coupe du monde doit forcément réveiller en vous des souvenirs particuliers...

"Il y a une chose qui fonctionne et qui fonctionnera toujours, c'est la magie de la Coupe du monde. C'est unique. Elle fait rêver, elle fait parler, elle fait réfléchir. Mais la chose la plus importante à mes yeux, c'est que la Coupe du monde unifie. Dès que le premier match va commencer, tout un pays va être derrière son équipe. Il y a très peu d'événements qui réussissent à avoir cet impact et cette force. C'est extraordinaire."

À titre personnel, qu'est-ce qui reste de votre sacre en 1998 ?

"Plein de maillots et plein de chaussures (rires). A chaque match, je prenais une paire nouvelle. Il n'y a bien sûr que des bons souvenirs mais ce qui reste, c'est la force de la Coupe du monde, la force de notre victoire, la force d'un groupe et d'une nation. En un mois, on a réussi à provoquer une vague, une communion, ce qui était très rarement arrivé en France."

On est champion du monde à vie?

"Oui. C'est bon ça (rires). On fait partie d'un club très fermé, très peu de pays ont été champions du monde. On en ressent d'autant plus l'impact quand on la gagne à la maison. C'est à vie. Quand je croise quelqu'un dans la rue, il me dit encore +merci+. Je me souviens quand j'étais môme de mes premières images de la Coupe du monde, c'était en 1974. Je me souviens de la cérémonie d'ouverture avec les ballons qui s'ouvraient, puis il y a eu les "papelitos", ces papiers que les supporteurs jetaient des tribunes durant le Mondial-1978 en Argentine. J'ai grandi avec toutes ces images et à un moment donné, tu te retrouves au centre de l'action avec ce trophée incroyable, ce Graal. Les images des champions défilent dans ta tête, Maradona, Pelé, Beckenbauer, et tu te dis: "oui, je fais partie de l'histoire"."

Le Mondial au Qatar a lieu en plein milieu de la saison avec très peu de temps de préparation pour les équipes. Qu'est-ce que cela pourrait changer ?

"Pour certains joueurs, la préparation avant la Coupe du monde est généralement trop longue et ils peuvent se poser beaucoup de questions. Pour la France, qui a des blessés et des nouveaux joueurs, c'est mieux d'avoir une préparation courte. Il n'y aura pas le temps de gamberger, les joueurs vont vite entrer dans le vif du sujet. D'habitude en fin de saison, on doit puiser dans notre énergie pour préparer la Coupe du monde. Là, on arrive en pleine saison et les joueurs seront en pleine forme, on aura une compétition incroyable, qui sera très, très disputée et d'une qualité physique incroyable. Les cinq changements en cours de match risquent aussi de favoriser les grosses équipes."

Comment jugez-vous les chances de la France ?

"On se pose beaucoup de questions, il y a des doutes autour de l'équipe de France et c'est normal. Mais on n'a jamais été meilleurs que dans l'adversité. C'est le prétexte pour souder le groupe très rapidement. En 1998, notre jeu et le sélectionneur (Aimé Jacquet) étaient attaqués et ça nous a soudés."

Quelles sont les forces et faiblesses de la France de Didier Deschamps ?

"Sa force, c'est sa palette de joueurs offensifs. Ils sont tous différents les uns des autres et ça donne plein d'options à l'entraîneur. On se pose plus de questions sur la défense et le milieu de terrain. Tout le travail de Deschamps sera de trouver le bon équilibre. On défend notre titre aussi et c'est très compliqué. Nous, on l'a vu en 2002. Il y avait une flamme en 1998 et en 2018 et il faudra la retrouver. La base n'est pas aussi solide qu'en 2018 mais l'expérience de Deschamps sera très importante. En 2018, il y avait une certaine baraka et une certaine insouciance mais quatre ans après, c'est plus difficile. Le rôle des leaders sera primordial."

Le Mondial au Qatar est précédé de nombreuses polémiques. Qu'est-ce que cela vous inspire?

"Les polémiques sont là aussi pour faire avancer le débat. Il y a eu des réactions des instances et des institutions. Le sport est devenu tellement important que chaque parti politique veut s'accaparer un slogan, une idée, une polémique. Il faut faire attention et il faut préserver le sport. On est à deux ans des Jeux olympiques à Paris et je m'inquiète du peu d'engouement que cette Coupe du monde suscite. Moi j'ai envie que ça commence et que l'on parle football."

Vous regrettez les appels au boycott ?

"On ne peut pas faire un appel au boycott, pas maintenant. La Coupe du monde a été attribuée il y a dix ans et il y a eu des avancées et des progrès."