Arnaud Clément : "Pour moi, la Coupe Davis est morte, c'est terrible pour le tennis"

Arnaud Clément s'insurge de la façon dont a été adoptée la réforme. © AFP
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avec Julien Froment

Vainqueur de la Coupe Davis en 2001 et capitaine de l'équipe de France de 2012 à 2015, Arnaud Clément regrette l'adoption de la réforme de la compétition et dénonce "l'influence de l'argent" dans son sport.

Dépité. Arnaud Clément était presque sous le choc jeudi, après l'approbation par la Fédération internationale de tennis (ITF) de la réforme de la Coupe Davis. Au programme : une compétition resserrée sur une semaine, dans une ville unique, avec des matches en deux sets. "Pour moi, aujourd'hui, la Coupe Davis est morte. Il n'en restera que le nom et beaucoup d'argent pour les joueurs et la fédération internationale. Je ressens une grosse incompréhension", confie, à chaud, à Europe 1, celui qui a remporté la Coupe Davis en tant que joueur en 2001 puis fut capitaine de l'équipe de France de 2012 à 2015. "La plus ancienne épreuve sportive par équipe vient d'être tuée."

"Pas un point que je trouve satisfaisant". "Je suis très triste", martèle Arnaud Clément. "J'étais un fervent opposant de cette réforme qui tue l'essence même de la Coupe Davis, à savoir les matches à domicile et à l'extérieur. Désormais, on aura systématiquement des matches à l'extérieur (la compétition se déroulera dans une ville unique, ndlr) donc ça va être difficile pour les supporters. Ils se sont exprimés d'ailleurs, et on ne les a pas entendus", regrette l'ancien tennisman. Il pointe du doigt un format "compliqué à comprendre". "Il n'y a pas un point que je trouve satisfaisant dans cette réforme : les deux sets gagnants, les phases finales sur lieu unique… C'est terrible pour le tennis", dénonce-t-il. "La Fed Cup a essayé de regrouper les phases finales il y a quelques années, ça n'a pas marché. On aurait pu s'inspirer de cet échec."

Outre le format, cette nouvelle formule garantit un prize-money mirobolant aux joueurs et aux fédérations qui participent, apporté par l'entreprise Kosmos. "L'argument c'est que les meilleurs ne jouaient pas systématiquement la Coupe Davis et que l'argent va les faire venir. Mais rien ne garantit que ce sera plus le cas avec la réforme. Si les joueurs sont blessés ou que la compétition ne s'intègre pas dans leur calendrier au bon moment, ils ne viendront pas davantage", avance Arnaud Clément.

Entendu sur europe1 :
Je vois dans cette décision l'influence d'un groupe, de l'argent, de la politique

L'ITF a "vendu son âme". Il regrette d'ailleurs "qu'il n'y ait pas eu de mobilisation supplémentaire de la part des joueurs". "Il y a de plus en plus d'argent dans le tennis et je trouvais que c'était beau d'avoir la possibilité, une fois dans l'année, de ne pas jouer pour l'argent mais pour l'amour de son pays." La fédération internationale a-t-elle vendu son âme ? "C'est complètement ce que je pense", assène Arnaud Clément. "Je vois dans cette décision des arguments qui ne sont pas les bons, l'influence d'un groupe, de l'argent, de la politique. Ça ne va pas du tout dans le sens du sportif." S'il souhaite que le temps lui donne tort ("j'en serais très heureux"), l'ex-tennisman "n'a pas le sentiment que ce soit le cas".

Arnaud Clément se montre particulièrement critique envers la Fédération française de tennis (FFT). La France a une riche histoire en Coupe Davis, faite de désillusions terribles, comme en 2002, mais aussi et surtout d'exploits et de miracles. C'est aussi grâce à cette compétition qu'elle peut organiser un Grand Chelem chaque année, puisque "le stade Roland-Garros a été construit initialement pour accueillir la Coupe Davis", rappelle-t-il. "Plus qu'aucun autre pays, la France aurait dû s'opposer à cette réforme. Mais elle a voté majoritairement 'pour' au cours d'une assemblée générale. J'ai du mal à comprendre", avoue-t-il, lui qui a vécu de magnifiques moments dans cette compétition.

"Gagner la dernière". Arnaud Clément regrette le déroulement de cette assemblée à la FFT, au cours de laquelle ce sont "majoritairement des partisans de la réforme qui ont pu s'exprimer", au détriment d'un "débat équilibré". Il dénonce de la "manipulation politique" qui ne fait "pas bon ménage avec le sport". Arnaud Clément assure qu'il regardera tout de même la première édition de cette Coupe Davis new look, en 2019, "par curiosité". "Mais avant ça, je vais essayer de profiter au maximum de la dernière Coupe Davis au format actuel, avec la France en demi-finale (contre l'Espagne, en septembre, ndlr). J'espère qu'on gagnera la dernière."