Parra: "Je ne suis pas 10 et 9"

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Propos recueillis par SYLVAIN LABBE, envoyé spécial , modifié à
S'il a réussi une rentrée remarquée face au Japon à un inhabituel poste d'ouvreur, où il fut toutefois formé, Morgan Parra n'aspire en aucune manière à cultiver cette polyvalence et ne jure que par son poste de demi de mêlée, où il retrouvera un statut de titulaire dimanche, à Napier, face au Canada. A une semaine du choc face aux All Blacks, Parra revient en force.

S'il a réussi une rentrée remarquée face au Japon à un inhabituel poste d'ouvreur, où il fut toutefois formé, Morgan Parra n'aspire en aucune manière à cultiver cette polyvalence et ne jure que par son poste de demi de mêlée, où il retrouvera un statut de titulaire dimanche, à Napier, face au Canada. A une semaine du choc face aux All Blacks, Parra revient en force. Morgan, comment avez-vous vécu votre entrée en jeu à l'ouverture face au Japon, saluée par tous comme ayant été décisive ? Aujourd'hui, je n'ai peut-être pas tourné la page, mais tu ne peux pas te permettre dans une compétition de rester sur l'euphorie d'avoir joué quinze minutes, même si ça s'est bien passé. Je ne me suis pas posé de questions, j'ai essayé de rentrer dans un match compliqué et d'apporter de l'enthousiasme, essayé de faire ce que j'ai faire, tout simplement. Maintenant, je n'ai pas envie de rester sur ça, de me dire que ça s'est bien passé, que j'ai joué n°10 et que c'est un poste que j'apprécie, non ! Aujourd'hui, je n'évolue pas à deux postes, qui font de toi le bon remplaçant de base. Je ne suis pas dix et neuf. Le poste que j'apprécie, c'est le neuf, celui où j'ai l'habitude de jouer, c'est demi de mêlée et aujourd'hui, j'ai envie d'évoluer en neuf et de me faire plaisir. C'est pour tout ça que je n'ai pas envie de reparler du Japon ou de rester longtemps sur ce poste parce que ce n'est pas le mien. Pensez-vous jouer dimanche face aux Canadiens votre titularisation une semaine plus tard pour jouer les Blacks à l'Eden Park ? Je vais rester dans l'état d'esprit que j'ai depuis un mois. Je ne suis pas dans l'optique de gagner ma place individuellement, de pouvoir faire des choses hors du commun ou de jouer ma carte personnelle d'une manière ou d'une autre. Aujourd'hui, j'ai envie de jouer collectif, de jouer avec ceux qui n'ont pas joué, essayer de se servir de la frustration qu'on a pu avoir en étant remplaçants ou hors du groupe lors du premier match, essayer de l'apporter sur le terrain tous ensemble contre le Canada et de gagner parce qu'on est dans une compétition. Il ne s'agit plus de bien jouer ou faire bien les choses, il s'agit de gagner et de gagner jusqu'au bout. Aujourd'hui, je rentre sur le terrain pour gagner. " Il y a des choses qui ont été dites..." Vous cherchez bien tout de même, comme tout bon compétiteur, à prendre le poste de demi de mêlée dans cette Coupe du monde ? Je cherche à être n°1 comme tout demi de mêlée et comme tout joueur. Aujourd'hui, ce qui me fait plaisir, c'est que la concurrence est saine, on travaille ensemble que ce soit avec "Yach'" ou les n°10, essayer de bosser ensemble, de communiquer, de partager et de trouver des facilités sur le terrain. On n'est pas là pour se mettre des bâtons dans les roues, chacun a sa chance et on verra bien après le choix des coachs. Quelles impressions retirez-vous des premières analyses vidéo des Canadiens ? C'est une équipe complète, assez solide dans l'ensemble, peut-être moins joueuse que le Japon, mais avec d'autres arguments. Ce qui fait leur force, c'est d'imposer un gros combat. On le sait, on est prévenus. La semaine dernière, ça nous a servi de leçon, à nous de ne pas commettre les erreurs qui ont pu être commises sur la préparation collective ou individuelle. On s'est peut-être trompés inconsciemment et pris les Japonais à la légère en pensant peut-être qu'on pourrait plus jouer au ballon ; et on a vu que ce n'était pas le cas, qu'il fallait rester sur les choses qu'on sait faire et ne pas tenter tout et n'importe quoi. Il y a des choses qui ont été dites entre les joueurs, entre le staff et les joueurs. Dimanche, vous serez aussi à la manoeuvre avec Aurélien Rougerie, promu capitaine. Vous allez vous sentir à Clermont ? Oui, je suis content pour lui. Je pense qu'il le mérite aussi, c'est quelqu'un d'exemplaire sur le terrain et en dehors, ce qui fait que le brassard de capitaine lui revient. C'est quelqu'un que j'ai l'habitude de côtoyer, je sais comment il bosse avant les matches en tant que capitaine, comment il est sur le terrain. Maintenant, ce n'est pas ça qui nous fera gagner le match. Que ce soit Thierry (Dusautoir) ou Aurélien le capitaine, ça ne change rien. "Avec François (Trinh-Duc), à force, on se connaît" L'équipe tourne encore beaucoup avec onze changements, mais vous retrouvez François Trinh-Duc pour la seizième fois. C'est un avantage ? C'est sûr qu'à force, on se connaît. François est quelqu'un que j'apprécie aussi sur le terrain comme en dehors, donc il est certain qu'il y a des automatismes qui se créent plus facilement qu'avec d'autres n°10. Il y a un trait récurrent de la culture française qui est de désigner les charnières coupables dès qu'il y a un mauvais match... Votre avis sur la question ? C'est souvent ce qui arrive. Mais c'est pareil dans les deux cas, je crois, quand tout va mal, c'est la charnière et quand tout va bien, c'est aussi la charnière (sourires). On a toujours plus de responsabilités que d'autres ; aujourd'hui, la charnière dirige le jeu, essaye d'apporter un plus, c'est ce qui fait qu'on soit peut-être un peu plus stressés sur le jeu. Mais aujourd'hui, j'essaye de ne plus me poser ces questions, j'essaye de rentrer, de prendre du plaisir et de l'enthousiasme, de me régaler. Serait-il imaginable dans un souci de stabiliser cette charnière de vous voir avec Dimitri (Yachvili) solliciter Marc Lièvremont afin qu'il tranche une bonne fois pour toutes ? Chacun son boulot, moi, je suis joueur et ce n'est pas mon souci.