Médard: "Je suis plus heureux"

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Propos recueillis par SYLVAIN LABBE , modifié à
Un an de purgatoire et c'est un Maxime Médard revigoré qui a fait son retour à Marcoussis. A la veille de ses 24 ans, le trois-quarts toulousain, titularisé à l'aile pour affronter les Fidji samedi, à Nantes, a visiblement grandi. N'en déplaise à Emile Ntamack, le meilleur marqueur d'essais du Top 14 n'a pas perdu son temps lors de son éclipse internationale, lui qui avoue peut-être avoir vécu la plus riche saison de sa jeune carrière.

Un an de purgatoire et c'est un Maxime Médard revigoré qui a fait son retour à Marcoussis. A la veille de ses 24 ans, le trois-quarts toulousain, titularisé à l'aile pour affronter les Fidji samedi, à Nantes, a visiblement grandi. N'en déplaise à Emile Ntamack, le meilleur marqueur d'essais du Top 14 n'a pas perdu son temps lors de son éclipse internationale, lui qui avoue peut-être avoir vécu la plus riche saison de sa jeune carrière. Maxime, cela fait quoi de revenir en haut de l'affiche ? Je ne suis pas de retour en haut de l'affiche, je reste moi-même. Il y a deux ans, j'étais titulaire indiscutable, l'année dernière, c'était Clément (Poitrenaud), cette année, ce sera peut-être Jérôme (Porical) ou Alexis (Palisson). On ne sait jamais, après, c'est vous (les médias), qui nous mettaient en haut de l'affiche, mais aujourd'hui, je ne me considère pas comme étant en haut, je suis mon chemin et je ne suis pas tout seul sur le terrain. Ça dépendra des performances de mon équipe, avant tout. Vous êtes titulaire à l'aile pour ce premier match face aux Fidji plutôt qu'à votre poste de prédilection, l'arrière. Une déception ? Non, c'est un grand plaisir que de jouer à l'aile en équipe de France. J'ai mis un an pour revenir, donc que j'évolue à l'aile ou à l'arrière, c'est la même chose. J'ai bien sûr une préférence, mais tant que je joue, c'est le principal. Meilleur marqueur d'essais du Top 14, c'est bon pour la confiance ? Bien sûr que ces essais font du bien à la tête, mais à ce jour je vois surtout que le Stade Toulousain a bien débuter le championnat, voilà plutôt ce à quoi je m'attache. Sur mes essais, on a vu que je n'avais plus qu'à courir un paquet de fois. Moi, je n'ai pas fait grand-chose, c'est avant tout le niveau de jeu de mon équipe qui est intéressant et c'est surtout grâce à eux que je suis ici. Encore fallait-il être là au bon moment ? J'étais là parce que je courre un peu plus, que je vois un peu mieux les coups et que je suis un peu plus concentré, mais c'est surtout la marque de la confiance que m'accorde mes coéquipiers. Je ne suis pas tout seul, ces neuf essais, avant de me récompenser, sont la récompense de mon équipe. "J'étais un pauvre c.. ! " Est-ce aussi la récompense des efforts que vous avez consentis pour revenir à ce niveau ? J'ai travaillé, mais j'ai fourni du boulot plus par plaisir qu'en étant vraiment au taquet ou dans l'excès. Disons que j'ai plus fait une pré-saison loisir qu'une pré-saison « de compét ». Je ne me sens pas d'ailleurs plus fort, mais plus heureux. Il est certain que c'est peut-être mon meilleur début de saison depuis que je suis pro, mais c'est lié, je le répète, je suis plus heureux, plus libre, la preuve, j'ai le sourire. Aujourd'hui, ce qui prime, c'est la liberté sur le terrain, tout en respectant les plans de jeu. Il y a un an, vous étiez remplaçant à Toulouse contre les Springboks et très amer, pour ne pas dire en colère, de ne pas avoir pu jouer devant votre public... Ça vous inspire quoi ? Que j'étais un pauvre con ! En tout cas que je n'aurais pas dû avoir cette réaction, même si je suis compétiteur et qu'à chaud, je l'ai eu un peu mauvaise. J'étais quand même très heureux d'avoir fait partie de ce groupe de vainqueurs des Sud-Africains. Aujourd'hui, je reviens: quelque part, ça me manquait de ne plus serrer la main à Jo Maso (sourire). Je plaisante, mais c'est un grand plaisir de revenir. Je suis content de mon début de saison, que j'abordais dans le flou sans trop savoir... Cette année, j'ai des objectifs et ça me permet d'avancer. Estes-vous soulagé, à un an de l'échéance, par rapport à la Coupe du monde ? Non, Je serai soulagé le jour où la sélection tombera et j'espère y être. En attendant, je continue à pendre plaisir, à m'entraîner et à évoluer avec les potes sur le terrain, c'est le principal. Y a-t-il eu un déclic, dont vous vous souvenez ? Non, non, c'est avant tout lié aux performances, aux temps de jeu, à leur régularité. Chez moi, quand ça ne va pas, ça ne va pas. C'est le problème, je suis quelqu'un de sensible, une qualité, mais aussi un défaut avant tout. Peut-être ai-je été trop sensible l'année dernière à certaines choses, qui ont fait que j'ai réalisé une saison plus compliquée. Mais il y a des choses plus importantes. Quand Emile Ntamack dit que vous avez perdu votre temps, ça vous fait mal ou vous abondez dans le même sens ? Je ne suis pas sûr d'avoir perdu mon temps parce que j'ai observé, j'ai écouté, j'ai vu certaines choses que je ne voyais plus quand je n'étais plus en haut de l'affiche, qui m'ont permis d'en réaliser d'autres... Peut-être n'ai-je pas trop joué, mais je n'ai pas non plus perdu mon temps, tout simplement, parce que pour moi, il s'agit peut-être d'une des saisons les plus riches en tant que professionnel. Parce que c'est toujours dans la difficulté qu'on apprend certaines choses et on essaie de ne pas les rééditer après. Les deux premières années que j'étais pro, c'était peut-être logique parce que j'étais tout jeune et que j'avais du mal à saisir ce qu'était le monde professionnel. L'année, ça tenait plus à mon jeu, un peu moins d'envie, ne plus prendre de plaisir aux entraînements, sur le terrain. Ça a été riche, je me suis ressourcé et au final je suis Champion d'Europe, titulaire en finale. Donc non je ne pense pas avoir perdu mon temps. "Un esprit de revanche ne nous apportera rien" Malgré votre jeune âge, vous semblez évoquer une forme de saturation qui vous a atteint... C'est certain, qu'à 23 ans, en avoir un peu marre, c'est peut-être dur à entendre. Mais ça arrive, ce sont, je crois, les choses de la vie, vous, les journalistes, j'imagine que parfois vous n'avez plus envie d'écrire. C'est une passade. J'ai toujours eu quand j'étais jeune une saison un peu compliquée parce que je voulais changer quelque chose de mon jeu. L'année dernière, j'ai abusé de mon petit pêché mignon, qui est le petit coup de pied par-dessus. J'ai voulu faire évoluer mon jeu et ça a contribué aussi à compliquer les choses. Ce match face aux Fidji est-il selon vous un match piège ? Oui parce que les médias présentent cette équipe fidjienne comme l'équipe la plus faible de cette tournée, mais si on commence par une défaite, ça peut mal finir... Donc à nous d'être bien concentrés et intelligents pour se faire plaisir sur le terrain. Peut-être que collectivement, ils ne sont pas au point, mais individuellement, ce sont des joueurs exceptionnels. On les connaît tous, ils évoluent dans notre championnat pour une grande partie d'entre eux. Donc à nous de faire attention, on ne peut pas se permettre de se projeter déjà sur l'Argentine. En tout cas, c'est un match compliqué. Entre des néo-capés et des joueurs, comme vous, qui reviennent, n'y a-t-il pas non plus un risque de vouloir trop prouver ? Peut-être, mais je pense que vouloir trop prouver peut nous faire déjouer... Donc autant faire ce qu'on sait faire, un esprit de revanche ne nous apportera rien, il faut élever notre niveau de jeu, c'est tout.