Manaudou, un retour en questions

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LAURENT DUYCK , modifié à
Il a fallu qu'elle l'officialise dans les colonnes du Journal du Dimanche pour que la natation tricolore ne parle plus que de ça. Deux ans et demi après avoir quitté les bassins, Laure Manaudou, 24 ans, a décidé de renouer avec la compétition. Une annonce diversement accueillie que la star dit avoir mûrement réfléchie. Reste à savoir ce qu'elle peut espérer de ce retour.

Il a fallu qu'elle l'officialise dans les colonnes du Journal du Dimanche pour que la natation tricolore ne parle plus que de ça. Deux ans et demi après avoir quitté les bassins, Laure Manaudou, 24 ans, a décidé de renouer avec la compétition. Une annonce diversement accueillie que la star dit avoir mûrement réfléchie. Reste à savoir ce qu'elle peut espérer de ce retour. Quelles sont ses motivations ? Retirée officiellement des bassins depuis le début de l'année 2009 mais absente mentalement depuis son terrible échec aux Jeux olympiques de Pékin et voire même avant, Laure Manaudou a eu besoin d'un break d'un an et demi pour retrouver l'envie de replonger. "Elle a bien mûri sa décision, elle a mis du temps à réfléchir. Elle a pris le temps surtout. Elle n'a pas été dans la hâte", explique Frédérick Bousquet, son compagnon. Ce dernier n'est pas étranger à son retour. Parce qu'au contact du Marseillais, la star de la natation française a trouvé un équilibre et un relatif anonymat en s'installant dix mois sur douze aux Etats-Unis. Et c'est en accompagnant le père de sa fille sur les compétitions que l'idée de revenir l'a titillée. "En entendant la petite musique avant les courses, je me suis dit que je me verrais bien à la place des nageuses qui allaient prendre le départ", a-t-elle expliqué au Journal du Dimanche. L'art de Brett Hawke, qui s'occupe déjà à l'année de Bousquet, aura été de ne pas forcer sa charge d'entraînement pour ne pas la dégoûter, même si elle est passée par des phases de découragement. Pas de quoi entamer son goût de la compétition qui ne l'a jamais quittée. "J'ai toujours envie de gagner", a-t-elle répété. Moins de se retrouver sous les feux des projecteurs, pour preuve sa relative discrétion dimanche (elle s'est confiée au JDD, à RTL et à France 2), même si elle a bien choisi son moment pour annoncer son retour. Un timing qui interroge sur ses motivations contractuelles... "Je n'ai jamais nagé pour l'argent", se défend-elle. Mais avec une image toujours aussi forte en France, qui "dépasse les frontières de la natation" pour reprendre les termes de Philippe Lucas, Manaudou peut venir reprendre une part du gâteau que se partagent aujourd'hui Alain Bernard, Camille Lacourt ou encore Yannick Agnel. Comment ce retour a-t-il été accueilli ? D'une polémique sur le relais 4x100 mètres à l'annonce du retour de Manaudou, le week-end n'a laissé que peu de place à la performance, pourtant à la hauteur avec Cielo, Agnel ou encore Muffat. "Je pensais que vous alliez me parler de ma course. Ce que je pense de son retour ? Rien de spécial", s'en est d'ailleurs agacée cette dernière. Irritation semblable chez les responsables de la Fédération française venus dimanche en fin de matinée faire le bilan de l'Open EDF, mais harcelés de questions sur la bombe Manaudou. "Moi, je suis plus projeté sur les championnats du monde que sur l'Open EDF", a tenté d'éluder Christian Donzé, le DTN. Comme si l'ombre Manaudou, qui a accaparé les médias dimanche, était pesante... "Ce n'est pas de sa faute non plus, on ne peut pas lui en vouloir", l'a défendue Muffat, radoucie dans l'après-midi. "Son retour ne peut être que bénéfique pour l'équipe." Un sentiment finalement partagé par beaucoup de nageurs, d'Agnel à Duboscq, en passant par Castel et bien sûr son frère Florent. "C'est vrai que ce serait sympa de faire Londres ensemble", s'est-il amusé, disponible pour parler de sa soeur. Même Lucas, son ancien mentor, s'il donne l'impression de ne pas s'en intéresser, se félicite de ce retour. "C'est un plus pour tout le monde, pour la natation féminine, mais aussi pour la natation en général et même le sport français. Elle est tellement médiatique que ça va encore faire parler de la natation", résume-t-il. Reste à savoir si le cas Manaudou n'éclipsera pas les performances de ses petits camarades. Que peut-elle espérer ? "Les Jeux de Londres, je tenterai seulement si je m'en sens capable. Je ne reprendrai pas le risque de clamer haut et fort que je vais être championne olympique." Consciente mieux que quiconque de la difficulté de retrouver le rythme d'une championne, Laure Manaudou fait profil bas sur ses ambitions. Hier consacrée sur 400 mètres, la championne olympique 2004 ne s'y frottera plus. "C'est trop long...", souffle-t-elle. Place au 200 mètres. "Il faut être réaliste, elle a de meilleures chances sur 200, explique son entraîneur, Brett Hawke. Elle est taillée pour ça. Elle a une bonne pointe de vitesse et une belle endurance. On va essayer de gagner une place dans le relais français pour les Jeux olympiques. C'est le premier objectif. Ensuite, on réfléchira à ses chances individuelles." Philippe Lucas, qui ne veut pas se mouiller, se montre tout aussi prudent: "Sur le potentiel qu'elle avait, elle peut encore faire de très belles choses. Mais dire si elle va faire un titre olympique ou des médailles, je ne peux pas répondre." Les Championnats de France de Dunkerque (18-25 mars), qualificatifs pour les JO de Londres, seront pour elle une étape cruciale pour s'étalonner, notamment par rapport à Camille Muffat sur 200 mètres. Un rendez-vous où elle sera extrêmement attendue. Protecteur, Bousquet lance un message à la presse et au public: "J'espère juste qu'il n'y aura pas trop d'attente sur elle et qu'elle pourra refaire son petit chemin tranquillement comme elle a fait ces derniers mois. Tout de suite, on attend d'elle trop de choses. C'est ça qui l'effraie." Un cirque qu'elle devra de nouveau appréhender pour espérer gagner son pari.