Malzieu: "On a l'expérience"

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Propos recueillis par LAURENT DUYCK , modifié à
Pas plus touché que ça par sa non-sélection pour la Coupe du monde puisqu'il s'y attendait, Julien Malzieu est pleinement concentré sur les échéances de son club. Auteur d'un nouvel essai vendredi, lors de la victoire en barrage de l'ASM contre Biarritz (27-17), concrétisation de la réaction d'orgueil auvergnate en seconde période, l'ailier international se projette déjà sur la demi-finale contre Toulouse.

Pas plus touché que ça par sa non-sélection pour la Coupe du monde puisqu'il s'y attendait, Julien Malzieu est pleinement concentré sur les échéances de son club. Auteur d'un nouvel essai vendredi, lors de la victoire en barrage de l'ASM contre Biarritz (27-17), concrétisation de la réaction d'orgueil auvergnate en seconde période, l'ailier international se projette déjà sur la demi-finale contre Toulouse. Julien, votre coéquipier Pedro Ledesma disait, pour le citer, que vous seriez chiants à jouer en phase finale. C'est confirmé ? C'est sûr que personne ne nous voyait en demi-finale après notre saison en demi-teinte. On a un groupe qui depuis quatre ans maintenant joue des phases finales. On commence à avoir l'expérience de ces grands rendez-vous. Encore plus depuis notre titre de champion en titre, on aborde ces matches de façon plus sereine. On l'a montré contre Biarritz malgré une première période pas à notre avantage. On a su relever la tête pour l'emporter. Comment expliquez-vous cette première période poussive de l'ASM ? On a peut-être trop voulu jouer à la baballe, se faire des passes trop faciles. On n'est pas assez rentré dans la défense adverse, on n'a pas assez gardé le ballon pour multiplier les temps de jeu. On a voulu trop vite prendre les intervalles, trop vite marquer. Mais l'important est d'avoir su rectifier le tir et garder un peu plus le ballon en seconde période. Y a-t-il eu des doutes, de la peur même, à la mi-temps au moment de vous retrouver dans les vestiaires ? Quand on est mené de cette manière après avoir pris deux essais en contre (3-17), on doute, oui. C'est inévitable, même si on est resté assez calme. Le coach a pris la parole, nous a rassurés, en disant qu'on était capable de renverser le score. Les cadres ont tenu le même discours. On ne s'est pas affolés. On a l'expérience maintenant des matches couperets. Cette envie de repartir de l'avant était la plus forte. "Quand je marque cet essai, je suis content, mais ça s'arrête là, je n'ai pas de pensée pour le sélectionneur" Bien aidés par le public de Marcel-Michelin... Oui, on avait la chance de jouer devant notre public et pour la dernière de la saison on n'avait vraiment pas envie de passer à côté. Le public, notamment en seconde période quand il a senti qu'on reprenait la main sur le match, a poussé très fort derrière nous. Je n'en ai pas parlé avec les copains, mais pour moi, c'est une des plus grosses ambiances à laquelle j'ai eu droit depuis que je joue à Clermont. C'est une des premières fois où j'ai vraiment senti le stade en ébullition. C'était assez impressionnant. Exceptionnel ! Lors de cette seconde période, on a vu l'ASM tenir le ballon pendant de longues minutes, imposer une série de pick-and-go impressionnante. Vous êtes-vous senti invincibles à ce moment-là ? Invincibles non parce que personne ne l'est. Mais on sait que c'est notre force de garder le ballon et d'enchaîner les temps de jeu. On avait décidé d'insister là-dessus au retour des vestiaires, de mettre à mal les Biarrots pour les faire craquer. Les avants ont pris les choses en main sous la baguette de Morgan (Parra). Il y a eu des séquences de près de deux minutes ! Quand vous êtes en face, ça marque forcément... Ça rassure ! Et derrière ça nous a permis de trouver des intervalles. Vous-même avez inscrit le troisième essai, celui de la qualification. L'avez-vous vécu comme un pied-de-nez à votre non-sélection pour la Coupe du monde ? Comme je l'ai beaucoup dit, dans ma tête, c'était clair, je n'allais pas figurer dans ce groupe de 30 pour la Coupe du monde. Après, c'est vrai que l'on n'est jamais à l'abri d'une bonne nouvelle. Mais c'était clair. L'annonce est tombée et je n'y étais pas, ça a conforté ce que je pensais. Après, je n'ai pas de raison d'être aigri. Je ne joue pas pour montrer quelque chose à quelqu'un, je joue avant tout pour moi, pour me faire plaisir, en prendre avec les copains et prouver à mes entraîneurs qu'ils ont raison de me faire confiance. Ce qui me fait vivre, c'est Clermont. J'ai construit ma carrière ici. C'est mon club. Quand je marque cet essai, je suis content, mais ça s'arrête là, je n'ai pas de pensée pour le sélectionneur. "Les trois finales perdues nous ont fait mal, mais ont aussi permis de nous resserrer" Vous parliez de confiance de vos entraîneurs. L'absence de Rougerie a poussé Vern Cotter à vous mettre en première ligne. Cela a-t-il changé votre façon d'aborder les choses ? C'est vrai que Vern a mis un peu le doigt là-dessus, mais ça n'a rien changé pour moi. Parce qu'il a des leaders dans le jeu qui sont déjà là aussi, notamment Brock James, le tacticien, le patron des lignes arrière. Leader ou pas, on l'écoute. Même quand Aurélien était là. Après, j'essaye d'apporter un peu plus de confiance et de sérénité aux plus jeunes. Mais ça passera avant tout par mes performances sur le terrain, pas par de grands discours, parce que je ne sais pas faire... La solidarité qui s'exprime à Clermont, que l'on a encore vu à l'occasion des blessures de Rougerie et Domingo, est-elle votre meilleure arme ? J'espère qu'on a d'autres armes à faire valoir (sourire). Mais c'est vrai que ça fait partie de nos forces. Depuis cinq ans, l'ossature n'a pas beaucoup bougé. Des liens très forts se sont créés. Il y a une forte affection entre nous. Les trois finales perdues nous ont fait mal, mais ont aussi permis de nous resserrer. Puis, le titre nous a permis de franchir un cap encore dans ces rapports. Et puis, le départ de nombreux en fin de saison soude encore un peu plus le groupe. Mais je ne doute pas que cette histoire, cette âme, soit présente dans tous les collectifs... Même si j'espère qu'elle est un peu plus forte chez nous. Vous voilà en demi-finale, n'auriez-vous pas préféré rencontrer Toulouse en finale ? Je préfère les rencontrer tout de suite, ça veut dire qu'on ne les retrouvera pas en finale (sourire). C'est vrai que, pour moi, c'est la meilleure équipe actuellement en France. Mais je suis très content de les retrouver. D'autant que Toulouse nous réussit plutôt bien en demi-finale (victoire 19-9 en 2009, victoire 20-15 en 2007). J'espère que ça ne va pas s'arrêter là. Ça va se jouer sur des détails. A ce stade-là, je ne vois pas quelle équipe pourrait révolutionner son rugby. Ça va se jouer sur l'envie, sur la discipline, sur les basiques, qui font la beauté de notre sport. Si on reproduit la même première période que contre Biarritz, ça ne passera pas contre Toulouse. Avec leur expérience, la moindre erreur contre eux peut nous coûter cher. Ça doit nous servir, on est prévenu.