Dopage dans le rugby : l'Angleterre aussi en plein marasme

© BEN STANSALL / AFP
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La directrice de l'agence anti-dopage britannique interpelle l'opinion dans le Guardian. Elle dénonce un usage "généralisé" des stéroïdes chez les jeunes rugbymen anglais, et ce dès 14 ans.

Le spectre du dopage hante le rugby français.  A quelques jours du "crunch" contre l'Angleterre qui se tiendra samedi, le rugby français est dans la tourmente. Malmené sur la pelouse, même s'il a quelque peu relevé la tête à Rome dimanche 15 mars (victoire 0-29 contre l'Italie), il est également secoué en coulisses. L'enquête Rugby à charges, de Pierre Ballester, un livre qui dénonce l'omniprésence du dopage dans le milieu, met en cause des grands noms du XV de France, comme Philippe Sella, 111 sélections et icône des années 80-90.  

Mais l'Angleterre n'est pas en reste. Mais le rugby anglais n'est pas en reste, en atteste la sortie de Nicole Sapstead, la directrice de l'Agence anti-dopage britannique, dans les colonnes du Guardian vendredi 13 mars. La dirigeante de l'UKad explique  qu'elle constate depuis plusieurs années des "dérives" et une "explosion" du recours aux stéroïdes et aux anabolisants : "il y a quelque chose de fondamentalement malsain dans ce recours généralisé au dopage chez des jeunes qui n'ont parfois pas 14 ans", dénonce-t-elle. 

En cause selon elle, la "banalisation" de ces produits, devenus un "problème de santé publique et d'éducation". Outre le manque d'informations sur les dangers impliqués par la prise de stéroïdes sans contrôle médical, il est devenu très facile de s'en procurer sur Internet.  Si le code mondial antidopage interdit aux sportifs d'y avoir recours, les laboratoires clandestins pullulent. Et ne fabriquent pas toujours des produits qui garantissent la qualité et l'hygiène nécessaire.  

Si Nicole Sapstead affirme ne pas vouloir stigmatiser le rugby en particulier, les chiffres publiés par l'agence anti-dopage sont éloquents. Sur les 15 derniers cas de dopages constatés par l'UKad, 13 mettent en cause des joueurs de rugby. Et sur les 50 procédures de suspension engagées contres des sportifs, 28 touchent des adeptes du ballon ovale.

Pourquoi l'Angleterre a-t-elle ce problème avec le dopage ? L'Angleterre ne peut pas se rater. La mère-patrie du rugby, sport inventé par le citoyen de la couronne William Webb Ellis, devenue championne du monde 2003 par la grâce du pied magique de Sir Johnny Wilkinson, aujourd'hui retraité, accueille la Coupe du monde dans six mois. Sa Coupe du monde. Autant dire que la pression pèse lourd sur les larges épaules des joueurs du XV de la Rose. Mais pas seulement. C'est tout le rugby anglais, des juniors aux dirigeants, qui concentre ses efforts de guerre pour être au rendez-vous en septembre prochain.

C'est un problème propre à l'évolution du rugby en général. Au-delà de la proximité de la tenue d'une Coupe du monde à domicile, c'est donc un mal plus profond qui guette le rugby anglais, nourri par la professionnalisation et la recherche de meilleures performances. La directrice de l'agence observe que les efforts physiques, la violence des chocs et les gabarits toujours plus impressionnants des joueurs professionnels "influencent les jeunes joueurs" dans leur envie de recourir à ces substances, avant de conclure : "En tant que sport au sommet de sa popularité, il faut absolument que le rugby conserve ses valeurs éducatives. Il faut faire comprendre aux plus jeunes que seul le travail et l'entraînement permettent de réussir, et ce sans hypothéquer sa santé."    

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