Des Bleus à livre ouvert

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S.L. , modifié à
Surgi cette semaine, à la veille de l'ouverture du Tournoi des Six Nations, dans la panoplie des Bleus à Marcoussis, le livre de jeu confié par Marc Lièvremont et son staff à leurs joueurs se veut une somme sur le projet de jeu de l'équipe. Une réponse apportée à la demande exprimée par des Tricolores en quête de repères plutôt que de principes, trop vagues, après la déroute face à l'Australie.

Surgi cette semaine, à la veille de l'ouverture du Tournoi des Six Nations, dans la panoplie des Bleus à Marcoussis, le livre de jeu confié par Marc Lièvremont et son staff à leurs joueurs se veut une somme sur le projet de jeu de l'équipe. Une réponse apportée à la demande exprimée par des Tricolores en quête de repères plutôt que de principes, trop vagues, après la déroute face à l'Australie. "En novembre, on avait des grands principes..." Avant d'être rattrapé par le mauvais sort et de devoir plier bagages mardi, la mort dans l'âme, David Skrela rappelait par ces quelques mots l'impression le flou artistique qui, en novembre dernier, avait fini par rattraper des Bleus, bien en peine de réciter un projet de jeu que le staff tricolore tentait en vain de leur proposer. Jusqu'à la sortie de route monumentale vécue face à l'Australie, sorte d'accident industriel pour un groupe soudain incapable d'interpréter un discours et une stratégie devenus plus opaques que jamais. Passés le traumatisme et les tensions, il a alors fallu aux entraîneurs des Bleus revoir leur copie. Ou plutôt la préciser, à la demande même de leurs joueurs, soucieux d'obtenir une feuille de route intelligible, claire et surtout concrète. D'où la naissance à l'aube de ce Tournoi 2011 d'un livre de jeu, qui dès le rassemblement des troupes à Marcoussis, aura été remis à chacun des trente sélectionnés rassemblant, dixit Lièvremont "tout ce qu'on a vu depuis le début". Soit trois ans de travail tactique compilé dans cette somme à destination des dépositaires du jeu que le sélectionneur souhaite mettre en place en vue de la Coupe du monde. Rougerie: "Ça me rappelle un peu l'école (rires)..." "Ça permet à chacun d'analyser les spécificités à son poste, les repères majeurs et grandes lignes réclamées dans le jeu, schémas, lancements de jeu, combinaisons...", détaille Damien Traille, pas le moins perdu des joueurs français à l'automne en sa qualité d'ouvreur et de chef d'une attaque déboussolée. "Tout y est, et ça nous permet d'échanger ensuite entre joueurs ou avec le staff sur des questions que l'on peut avoir", ajoute le Biarrot, qui suggère encore: "Ou si on estime qu'il y a des modifications à apporter..." N'en déplaise à son sélectionneur, prompt dès le début du rassemblement, dans un souci de réaffirmer son autorité, à opposer une fin de non-recevoir à toute idée d'amender le livre. Pourtant, l'équipe de France ne demande qu'à prendre le projet à bras le corps. "Dans le carnet ou cahier de jeu, il y a tout ce qu'il faut en termes d'attaque et de défense, tout ce dont on a besoin", confirme encore Aurélien Rougerie. "Ça nous fait faire nos devoirs à la maison, ça me rappelle un peu l'école (rires)", plaisante le Clermontois. "J'en plaisante, mais c'était tout à fait nécessaire et utile. C'est une nouveauté comme ça sur tableau noir. On en avait bien besoin pour avoir des repères communs. Ce n'est pas le fait de se réapproprier le projet de jeu parce qu'il y a quand même eu un Grand Chelem l'an dernier sur le même projet, simplement il existait ce besoin d'avoir un peu plus de repères quand ça va vite face aux grandes nations." Comme lorsque les Wallabies vous déboulent dessus et vous transpercent aux quatre coins du terrain... Si l'appropriation du projet de jeu est dépassée, ce livre est une bonne piqûre de rappel. "Un projet de jeu, il faut que les joueurs le fassent évoluer, qu'ils se l'approprient aussi. Peut-être qu'on n'a pas su le faire à un moment donné entre le staff et les joueurs, explique Vincent Clerc, absent face à l'Australie en novembre. Cette défaite a servi à ça au moins. Il y a un cadre, on nous propose des choses, mais les joueurs doivent s'approprier le truc. Les joueurs doivent être responsabilisés et apporter des choses à ce projet, à cette équipe. Chacun doit pouvoir amener un peu à ce projet, une orientation, une envie. C'est peut-être plus clair aujourd'hui dans la tête des joueurs, c'est plus facile de communiquer. La défaite a permis de communiquer. On ne repart pas de zéro, mais avec un état d'esprit différent." Et si les joueurs sont seuls sur le terrain, c'est toute la chaîne tricolore qui devrait pouvoir bénéficier de cette mise au point. "Marc (Lièvremont) va pouvoir faire le lien entre les avants et les trois-quarts, ce qui est parfois le plus dur à trouver", estime Clerc. S'il n'a pas vocation à devenir la bible du rugby français, ce livre du jeu doit au moins avoir le mérite de permettre à Dusautoir et ses coéquipiers de se faire leur propre religion.