Derrien: "Il y a un délai"

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Thomas Siniecki , modifié à
Consultant pour Sports.fr, Bruno Derrien revient sur l'arbitrage de la 9e journée de Ligue 1. L'ancien directeur de jeu éclaire notamment sur la panne de courant qui a interrompu Caen-Nice (1-1), ou encore sur la conduite à adopter lorsque des joueurs entrent dans la surface avant le tir d'un penalty. L'ex-arbitre parle également des matches internationaux.

Consultant pour Sports.fr, Bruno Derrien revient sur l'arbitrage de la 9e journée de Ligue 1. L'ancien directeur de jeu éclaire notamment sur la panne de courant qui a interrompu Caen-Nice (1-1), ou encore sur la conduite à adopter lorsque des joueurs entrent dans la surface avant le tir d'un penalty. L'ex-arbitre parle également des matches internationaux. Bruno, le fait le plus insolite de ce week-end a été marqué par la panne de courant lors de Caen-Nice (1-1)... Les consignes sont très claires à ce sujet, et M. Billot les a très bien appliquées. Dès que les projecteurs s'éteignent, l'arbitre déclenche son chronomètre, et il y a un délai maximum de 45 minutes. Si avant ce délai, la panne est réparée, on reprend pour le temps restant. Si la panne excède les 45 minutes, le match est remis à une date ultérieure car il a été interrompu en seconde période. La commission compétente peut décider de reporter, mais aussi estimer que le club hôte est responsable de la panne de courant. Chaque club doit avoir des groupes électrogènes, c'est un peu compliqué... En Espagne, ils refont jouer le temps manquant, alors qu'en France c'est la totalité du match. Et si certains projecteurs seulement tombent en panne ? Il y a un grand précédent: Marseille-Milan en 1991. Les Italiens sont rentrés au vestiaire mais l'arbitre leur a demandé de continuer le jeu, estimant que les conditions étaient jouables. L'UEFA a ensuite condamné Milan à un an de suspension de Coupe d'Europe et Marseille était qualifié. Là, M. Billot n'avait pas le choix, les quatre étaient éteints (rires) ! L'Auxerrois Anthony Le Tallec a-t-il été signalé hors-jeu à tort à Saint-Etienne (1-1) ? Oui, il n'est pas hors-jeu. C'est ric-rac, certains assistants lèvent vite le drapeau, d'autres moins. Beaucoup commencent à prendre des risques, en laissant l'action se dérouler un peu, mais certains ont conservé ce réflexe d'agir trop vite. Il y a eu les deux exemples aussi à Paris, les deux fois contre Gomis. En début de match, l'assistant a levé vite et l'attaquant lyonnais n'était pas hors-jeu, c'était l'inverse ensuite en seconde période. Le Tallec comme Laurent Fournier ont assez vertement critiqué l'arbitre. L'entraîneur bourguignon s'était déjà montré assez peu diplomate à Lorient (1-1), ça commence à faire beaucoup, non ? Je n'ai pas vu si les Auxerrois ont vraiment été victimes d'erreurs. Laurent Fournier est un bon coach, qui est en train de réussir à Auxerre et qui était déjà performant lorsqu'il s'est fait virer du PSG. Il est entraîneur comme il était joueur, c'est un sanguin. Il est passionné, brut de décoffrage. Il a horreur de l'injustice, mais il va trouver le bon tempo. Il vaut mieux d'ailleurs, on l'a déjà vu dans le passé par exemple avec Antoine Kombouaré, qui est forcément plus serein depuis que les résultats sont meilleurs. La pression fragilise tout le monde, ça met sur les nerfs. Concernant le hors-jeu de Le Tallec, il y a eu une histoire sur ce fait de jeu précis à propos de la partie du corps à considérer en jeu ou non... Les bras ne doivent pas être pris en considération. S'ils sont devant, ils ne sont pas considérés, à l'inverse des jambes ou du torse. Là, c'était ric-rac, on peut considérer qu'il était pratiquement sur la même ligne. Mais pour l'assistant, ça va extrêmement vite, et il a l'intime conviction que le joueur est devant au départ... "M. Lannoy n'est pas arrogant, ni suffisant" Lors du match PSG-Lyon (2-0), quid du coup franc accordé à Javier Pastore, alors que la faute de Jimmy Briand sifflée par M. Lannoy est clairement dans la surface ? Il n'y a pas péril en la demeure car il n'y a pas eu d'incidence, mais ça aurait pu faire polémique. M. Lannoy était bien placé, parfois c'est difficile quand on est ric-rac et que les fautes sont commises sur les lignes. Toutefois, ces dernières font partie de la surface, et quand il y a faute sur la ligne, on considère donc qu'il y a penalty. Mais là ce n'est pas le cas, Pastore est un mètre à l'intérieur ! L'arbitre avait pourtant un bon positionnement, il était sur le côté gauche. Il y avait aussi eu un petit contact avant sur Bastos, qui a eu le tort d'exagérer, d'en rajouter, ce qui a eu l'effet inverse sur M. Lannoy. Je pense qu'il aurait pu ne rien siffler contre Bastos... A l'inverse du Bordelais Yoan Gouffran, dont la simulation devant le gardien est manifeste. M. Turpin l'a bien décelée et il a mis un carton jaune. Vous êtes toujours aussi convaincu par le comportement de Pastore ? Ce n'est pas un tricheur, c'est vraiment génial pour les arbitres. Il tient debout, et puis c'est un type sain, il le porte sur lui. Ce n'est pas un tordu, il a l'air gentil et agréable. Il ne cherche pas la faute, il ne conteste pas. Il avait aussi été victime d'une grosse faute à Montpellier avec M. Duhamel, un coup de pied. Mais il n'est pas vindicatif. Une star comme ça, qui n'en rajoute pas, ne vient pas provoquer, c'est super. M. Lannoy s'est montré très diplomate au moment d'une petite altercation sur un corner entre Bafétimbi Gomis et Zoumana Camara, pour calmer les deux joueurs. Faut-il s'adapter au caractère des joueurs au cas par cas, vu que les deux sont plutôt tranquilles ? La qualité de M. Lannoy, c'est qu'il n'est pas arrogant, ni suffisant. Il ne fait pas de grands gestes, de menaces. Il a entièrement raison. Il y a des joueurs avec qui il faut élever la voix, pour montrer qu'on est là. Avec d'autres, il faut savoir trouver le bon tempo. Je pense qu'il en est capable, car il les connaît à force. En Italie, l'Intériste Chukwuma Obi a été expulsé pour deux cartons jaunes contestables contre Naples (0-3). Sur le deuxième, sa faute était en fait en dehors de la surface, mais l'arbitre a bien signalé un penalty. Et sur ce coup de pied de réparation, Campagnaro a suivi et marqué après l'arrêt du gardien, alors que le Napolitain était déjà entré dans la surface avant le tir du penalty... Si on regarde bien toutes les exécutions de penalty, et si on est puriste, ils seraient presque tous à refaire. Quant au gardien, ça relève plus du travail de l'arbitre assistant, placé sur la ligne de but. L'arbitre principal doit à la fois avoir un oeil sur les joueurs, sur le tireur, sur le ballon, et après sur le gardien. C'est beaucoup... C'est pour ça qu'il doit se reculer pour élargir son champ de vision. Mais il y a des choses tolérables et intolérables. Quand des joueurs des deux camps sont pratiquement au niveau du botteur au moment de la frappe, ce n'est plus jouable. Quand le gardien détourne, ou si le poteau dévie, sur un autre attaquant qui marque, c'est là que ce n'est plus normal. Comme des défenseurs de l'Inter sont rentrés aussi, cela aurait dû être à refaire. S'il n'y avait eu que des attaquants, cela aurait été coup franc indirect à l'endroit où ils sont entrés. Bien sûr, s'il n'y a que des défenseurs mais qu'il y a but, celui-ci est accordé. Enfin, alors que les matches internationaux se profilent, comment se passent les désignations pour les arbitres français ? C'est la commission d'arbitrage de l'UEFA qui s'en charge. Quand les équipes n'ont plus rien à jouer, ils peuvent mettre un jeune arbitre. Quand c'est un match au couteau, décisif pour la qualification, comme ce sera sûrement le cas pour France-Bosnie, l'UEFA met ses meilleurs arbitres. Côté français, M. Lannoy et M. Duhamel sont les deux seuls dans la top list. M. Fautrel ou M. Turpin pourraient aussi arbitrer, mais des matches sans la qualification en jeu. Après la top list, il y a la première liste, puis les top 1, les top 2, les top 3 et les top 4. Et pour arriver en top list, il faut avoir moins de 38 ans, car l'UEFA veut rajeunir l'arbitrage, avec des arbitres de 32-33 ans qui puissent faire plusieurs années. Après 38 ans, on peut rester en top list, mais on ne peut plus y être promu... Ce qui veut dire qu'on a déjà trois Français qui n'y seront jamais: M. Fautrel, M. Ennjimi et M. Chapron. C'est dommage. On est dans une volonté totale de rajeunissement, même en France. C'est la sélection par l'âge... Alors que si on a 38 ans, si on peut faire quatre ou cinq ans de Ligue des champions, si on a des qualités, on peut servir. Et la limite pour les matches internationaux est de 45 ans, alors que certains sont en pleine force de l'âge, préparés et expérimentés.