Cap sur la Nouvelle-Zélande

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LAURENT DUYCK , modifié à
Le Tournoi des Six Nations 2011 s'est refermé dimanche sur une deuxième place inespérée pour le XV de France, qui a su réagir contre le Pays de Galles. Cap désormais sur la Coupe du monde 2011. Quand, comment et avec qui Marc Lièvremont, le jusqu'au-boutiste, se projette-t-il vers le rendez-vous néo-zélandais ? Tour d'horizon à moins de six mois de l'événement.

Le Tournoi des Six Nations 2011 s'est refermé dimanche sur une deuxième place inespérée pour le XV de France, qui a su réagir contre le Pays de Galles. Cap désormais sur la Coupe du monde 2011. Quand, comment et avec qui Marc Lièvremont, le jusqu'au-boutiste, se projette-t-il vers le rendez-vous néo-zélandais ? Tour d'horizon à moins de six mois de l'événement. Le calendrier jusqu'à la Coupe du monde Marc Lièvremont l'a confirmé dimanche, il livrera bien sa liste pour la Coupe du monde le 11 mai prochain, un groupe de 30 joueurs auquel s'ajoutera une liste cachée de 10 hommes, qui ne seront sollicités qu'en cas de blessures. Mais le sélectionneur devra attendre le 28 juin pour avoir ses joueurs à disposition. Commencera alors deux mois plein de préparation à Marcoussis, entrecoupés de deux stages, le premier au Chambon-sur-Lignon (Haute-Loire) du 9 au 19 juillet, avec deux rencontres amicales contre l'Irlande (le 13 à Bordeaux et le 20 à Dublin) au programme, le second à Falgos (Pyrénées-Orientales) du 25 au 31 juillet, censés remettre les joueurs au niveau physiquement, et pourquoi pas offrir le temps au staff de proposer un jeu compréhensif et accepté de la majorité. La suite du programme et notamment la date du départ pour la Nouvelle-Zélande n'a pas encore été communiquée. Une chose est sûre, les Bleus ont rendez-vous le 10 septembre contre le Japon pour débuter leur Mondial. Un groupe de 30 déjà connu ? Avec les rappels de Julien Tomas, invité à remplacer Dimitri Yachvili, blessé, et de Fabrice Estebanez, qui a profité de concours de circonstances (blessure de Mermoz, convocation de Rougerie et éviction de Jauzion), 31 joueurs auront participé à ce Tournoi des Six Nations. David Srekla, appelé dans les 30, mais blessé avant le premier match, n'a pas joué. D'autres joueurs peuvent-ils encore espérer jouer la Coupe du monde ? Oui. Au moins un, en la personne de Dimitri Szarzewski, en rééducation, mais qui a déjà sa place réservée. Lui aussi blessé en préambule au Tournoi, Romain Millo-Chluski peut lui aussi espérer. Malzieu, Picamoles, Fritz, Dupuy, Porical, Andreu, Lauret, voire Bastareaud, peuvent-ils profiter de la défaite de Rome ? Marc Lièvremont, qui a promis de ne pas nous (la presse) aider dans ce jeu de supputations et d'interrogations, a manié le chaud et le froid. "Le match d'hier (samedi) va compter. Mais celui de Rome aussi. J'ai dit que tout était remis en question par rapport à certains engagements que j'avais pris vis-à-vis des joueurs", a-t-il rappelé dimanche avant d'envoyer un message aux six sacrifiés romains: "S'ils avaient été sur le terrain (contre le Pays de Galles), le résultat aurait été le même." A une cinquantaine de jours de l'annonce, le sélectionneur hésite-t-il lui-même sur certains postes ? "Ça sera difficile. Je n'ai pas énormément d'interrogations, mais ça ne sera pas facile de choisir", répond-il. Ce qui laisse supposer que son groupe sera très proche de celui convoqué pour le Tournoi. Mais ce ne sont que des supputations... Quel jeu en Nouvelle-Zélande ? Marc Lièvremont en est convaincu, le rugby qui gagnera la Coupe du monde sera un rugby d'attaque. Autrement dit le jeu proposé aujourd'hui par la Nouvelle-Zélande et l'Australie. Cette conviction, renforcée par le changement de règles adopté l'été dernier, qui favorise dans les regroupements l'équipe avec le ballon, colle bizarrement avec sa vision du rugby. Sélectionneur de la rupture, il avait fait de ce rugby d'attaque à zéro coup de pied son crédo pour trancher avec son prédécesseur, Bernard Laporte, promu dans le gouvernement de Nicolas Sarkozy. Des ambitions qui se sont soldées par deux troisièmes places dans les Tournois 2008 et 2009. Avant que, à la demande de certains de ses joueurs, il ne revienne à un jeu plus direct en 2010, marche-arrière récompensée par un Grand Chelem. Samedi contre le Pays de Galles, c'est encore dans le combat, et grâce à un rugby minimaliste, que les Bleus se sont retrouvés après leur déroute italienne. Et pourtant Marc Lièvremont n'en démord pas. "Fondamentalement, ni mes idées sur le jeu ni mes idées sur les hommes n'ont réellement changé en trois ans", souffle-t-il. Et prévient: "J'ai dit aux joueurs que je continuerai à les écouter et à les entendre. Ils sont dans des clubs avec des contextes et organisations complètement différentes. Mais dès le 28 juin, il va falloir qu'ils m'entendent aussi. Et si je dois me planter, au moins que je me plante avec mes idées." Un encadrement figé ? Vous l'aurez compris, Marc Lièvremont n'est pas homme à abandonner. Ni à démissionner... "Le renoncement ne fait pas partie de mon vocabulaire", disait-il au soir de la défaite de l'équipe de France en Italie. Conforté dans ses fonctions, moins par la performance du XV de France contre les Gallois que par l'intervention jeudi dernier de son président, Pierre Camou, le sélectionneur est désormais guidé par la seule Coupe du monde, son réel objectif depuis trois ans. La sortie de route romaine n'y changera finalement rien. Alors que certains réclamaient sa mise sous tutelle, ou du moins le concours d'entraîneurs expérimentés comme Fabien Galthié (Montpellier), Guy Novès (Toulouse), Philippe Saint-André (Toulon) ou encore Patrice Lagisquet (libre), c'est en patron, parce qu'il l'a décidé, que Marc Lièvremont mettra le pied en Nouvelle-Zélande. Tout juste a-t-il rappelé qu'il n'était pas si seul. Ni dans la difficulté - "J'ai été très épaulé, très encouragé, très secondé durant la semaine", assure-t-il - ni pour décider même s'il n'a jamais fait référence à ses adjoints, Emile Ntamack et Didier Retière, définitivement relégués dans la coulisse. C'est avec Fabien Pelous, Philippe Sella et Jean-Claude Skrela, conviés à dîner la semaine dernière à Marcoussis, qu'il a décidé de "se projeter sur le groupe pour la Coupe du monde". Trois hommes écoutés. "On va continuer à échanger tout au long des semaines qui vont suivre", promet-il. Comme il appellera Thierry Dusautoir, son capitaine et relais auprès de son équipe. "Ce n'est pas parce que je l'écoute et je l'entends que je tiendrai forcément compte de son avis", précise-t-il. Tout est dit... Lièvremont, le jusqu'au-boutiste Que ce soit dans ses convictions ou dans son rapport à la difficulté, Marc Lièvremont ne lâche jamais rien. C'était le cas quand il était joueur. Ça l'est encore aujourd'hui. Mais puissance dix. "Quand tu es joueur, tu ne ressens pas les émotions de la même manière. J'ai déjà vécu en tant que joueur des défaites où j'ai eu honte, où j'étais en colère. Mais en tant qu'entraîneur, les émotions sont décuplées", rappelle-t-il. Au bout de trois ans, l'intéressé aurait pu se lasser. Il n'en montre rien. "Mes parents s'inquiètent pour ma santé mentale, mais je vis les choses passionnément et avec beaucoup de plaisir, même dans la rage, dans la colère et dans la tristesse", assure-t-il. "Je me suis toujours senti fort même quand ça grêle dur. J'ai l'impression que plus je prends de coups, plus je me sens déterminé." Jamais son mode de fonctionnement, qui "évolue sans cesse", promet-il, n'avait été aussi durement remis en question, que ce soit de la part des médias ou des membres de la "grande famille du rugby". Et pourtant, Marc Lièvremont se tient à sa ligne de conduite. "Je me suis promis pas mal de choses il y a trois ans en acceptant cette mission. D'une part d'aller au bout de mes convictions et de cette mission. Et surtout de ne pas tomber dans une quelconque forme d'aigreur et de ressentiment. Je me sens aujourd'hui apaisé, serein et extrêmement déterminé." Une droiture qui force le respect. Reste à savoir si elle l'aidera à conduire le XV de France à la victoire en Nouvelle-Zélande.