Bernard pris dans les remous

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Laurent DUYCK , modifié à
Hier icône incontestée de la natation française, fort de son statut de champion olympique, Alain Bernard a chuté de son piédestal. Passé à côté des Championnats de France et non qualifié sur 100m pour les Mondiaux, l'Antibois est confronté aujourd'hui à l'émergence de nouveaux talents, Yannick Agnel et Camille Lacourt en tête, ce dernier n'ayant pas hésité à le remettre en place.

Hier icône incontestée de la natation française, fort de son statut de champion olympique, Alain Bernard a chuté de son piédestal. Passé à côté des Championnats de France et non qualifié sur 100m pour les Mondiaux, l'Antibois est confronté aujourd'hui à l'émergence de nouveaux talents, Yannick Agnel et Camille Lacourt en tête, ce dernier n'ayant pas hésité à le remettre en place. Il devait être la vedette du jour, l'unique tête d'affiche d'un film en 3D projeté dans la soirée sur la façade de la Cinémathèque à Paris (voir par ailleurs), l'occasion de redorer un statut érodé par ses récentes contre-performances aux Championnats de France de Strasbourg. Il aura finalement été plongé bien malgré lui dans un feuilleton de bas-étage. La faute à ses déclarations sur le cas de Yannick Agnel, lequel laisse depuis plusieurs jours planer le doute sur sa participation au relais 4x100 mètres des Mondiaux de Shanghai (24-31 juillet). "C'est aberrant de vouloir faire l'impasse sur le relais", avait réagi l'Antibois la semaine dernière à l'occasion d'une conférence de presse séchée par le Niçois. "C'est carrément inconcevable. J'ai envie de lui dire de bien réfléchir. Ça me semble un peu égoïste. J'espère que je me trompe..." Une réprimande d'un aîné à l'encontre d'un jeune homme encore neuf dans ce milieu de requins. "Il y a eu une incompréhension par rapport à ce que j'ai dit, nuance-t-il aujourd'hui sans regretter ses propos. Je n'accable pas Yannick, loin de là, je le respecte, je lui demande juste de bien réfléchir. Si j'avais été dans sa situation il y a quelques années et qu'un Frédérick Bousquet ou un Julien Sicot m'avaient fait cette remarque, j'aurais réfléchi à ce qu'ils auraient pu dire." Muet depuis cette sortie confraternelle, l'intéressé a peut-être profité de la semaine pour méditer les conseils de son compatriote avant de prendre la parole vendredi lors d'un point presse prévu de longue date. Mais les Bleus, qui se retrouvaient ce jeudi soir à Paris à deux jours de l'Open de France, n'ont pas attendu pour venir à son secours. Lacourt met les pieds dans le plat Alors que Fabien Gilot et Frédérick Bousquet avaient tenté d'arrondir les angles, tout en disant comprendre le gamin désireux de défendre pleinement ses chances sur les épreuves individuelles (200 et 400m nage libre) quitte à priver le relais d'un maillon essentiel, Camille Lacourt, pourtant pas concerné par le sujet, n'a lui pas hésité à mettre les pieds dans le plat, au risque de "foutre la merde" au sein du collectif bleu. "C'est un peu l'hôpital qui se fout de la charité. Je n'ai pas envie de critiquer Alain mais ses remarques n'avaient pas lieu d'être", a attaqué le dossiste marseillais sans langue de bois. "Il a eu des mots assez durs envers Yannick alors que lui a l'honnêteté de dire qu'il ne veut pas participer au relais s'il n'est pas à 100%. Certains auraient dû faire pareil et ne devraient pas parler avant d'être eux-mêmes irréprochables." Une allusion directe aux Championnats d'Europe de Budapest où, désireux d'exorciser le douloureux souvenir des JO 2008, Bernard avait fait le voeu de clore le relais. Avant de se rater, condamnant la France à la deuxième place derrière la Russie... "Je me sens responsable. J'ai pénalisé le reste de l'équipe. J'assume. Je ne vais pas me cacher", avait-il fait face. Les propos de Lacourt ravivent aujourd'hui cette plaie sur laquelle Romain Barnier, le bouillant entraîneur du Cercle des Nageurs de Marseille (CNM), n'a pas hésité à remettre un peu de sel. "Je n'ai pas trop apprécié les propos d'Alain Bernard. Ça sonnait un peu donneur de leçon", a-t-il déclaré, s'amusant de la franchise de son dossiste, lui qui a toujours prôné la liberté de parole, quitte à se fâcher avec les instances fédérales. "Ça me fait chier ces propos, ça va nous compliquer la tâche. On n'a pas besoin de se faire ça entre nous." Une double sortie qui ressemble étrangement à une nouvelle coalition marseillaise contre le vilain petit canard Bernard, lequel avait claqué la porte du CNM en 2006 pour suivre son entraîneur Denis Auguin. "On dirait... Mais bon, c'est fait, c'est fait. On a été viré, on est parti s'entraîner ailleurs. C'est comme ça, qu'on gagne ou pas", balaie l'Antibois qui ne veut pas ajouter la polémique à la polémique. "On est à un mois des championnats du monde, une période un peu critique. C'est dommage d'essayer de lancer des polémiques là où il n'y en a pas forcément." Et le champion olympique du 100 mètres d'appeler à la sagesse: "On devrait en discuter entre nous, on décide qui veut faire quoi et on vous fait un retour d'une décision commune. On est cinq dans cette aventure du relais. Ça ne sert à rien de s'exprimer sur des hypothèses." Les protagonistes devaient se retrouver ce jeudi soir à l'Insep pour confronter leurs points de vue. Tout champion olympique qu'il est, pas sûr qu'Alain Bernard pèse alors du même poids que par le passé...