A base de testostérone

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SYLVAIN LABBE, envoyé spécial , modifié à
Communication resserrée, entraînements bouclés et musclés, discours minimalistes sur les intentions comme sur le jeu: l'équipe de France, à l'heure d'entamer la préparation de son quart de finale de Coupe du monde face à l'Angleterre, est passée à la fois en mode furtif et de combat. Un seul leitmotiv: "La vérité est sur le terrain". Adeptes de grands discours, passez votre chemin, les Bleus font table rase de leur encombrant passé.

Communication resserrée, entraînements bouclés et musclés, discours minimalistes sur les intentions comme sur le jeu: l'équipe de France, à l'heure d'entamer la préparation de son quart de finale de Coupe du monde face à l'Angleterre, est passée à la fois en mode furtif et de combat. Un seul leitmotiv: "La vérité est sur le terrain". Adeptes de grands discours, passez votre chemin, les Bleus font table rase de leur encombrant passé. Une page blanche. C'est à peu de choses près ce que les joueurs de l'équipe de France prétendent offrir en cette semaine décisive qui mène les Bleus vers un quart de finale de Coupe du monde face à l'Angleterre samedi, à Auckland. "Notre Coupe du monde commence samedi". Un slogan récurrent et qui tourne en boucle depuis mardi, dans la bouche de joueurs tous branchés sur le même thème. On pourrait croire qu'ils ont bien révisé: Ça veut juste dire qu'on est sur la même longueur d'ondes, bizarrement, répond Pascal Papé. On appréciera la précision. A l'évidence enfin conscients de la grosse boulette commise face aux Tonga, les Tricolores ont pourtant choisi de ne pas la ressasser, mais bien de tirer un trait sur un passé trop lourd à assumer. Il y aurait donc un avant et un après Wellington. Plus rien ne sera comme avant chez les Bleus. Avant d'en juger samedi sur la pelouse de l'Eden Park, on ne peut que le constater dans l'image que renvoie ces Tricolores quand de l'autre côté de la rue, les Anglais, pourtant soumis à la loupe grossissante des tabloïds anglais, affiche leur sérénité en pleine rue. Des joueurs français qui se ferment comme des huitres face à la plus anodine des questions et défilent désormais face à la presse en rang d'oignons, loin des rapports privilégiés et des conversations entre quatre yeux encore en vigueur la semaine dernière. Un monde perdu, pourrait-on dire... Un rugby aseptisé. A l'anglo-saxonne en quelque sorte. Papé: "Le jeu, on n'en a rien à secouer" Justement, à les entendre, c'est à l'anglaise que les Bleus prétendent se refaire. Du combat, rien que du combat, encore du combat: "Le jeu, ça ne sert à rien d'en parler. Le jeu, on n'en a rien à secouer. Je préfère qu'on mette ce qu'il faut pour faire un match de rugby, après, le jeu viendra tout seul. Ce n'est pas notre priorité. Notre but, c'est de retrouver notre agressivité." Une ambition minimum, mais qui nécessite des précautions maximales avec la fermeture au public de l'entraînement d'ordinaire dévolu au public et aux supporters des Bleus, sur un terrain bouclé par la police. Quinze minutes d'échauffement et basta ! Circulez, il n'y a rien à voir... On s'inquiète tout de même pour un Maxime Médard et une ligne de trois-quarts réduite elle aussi à ce programme minimum. On a tort. "Nous, on veut gagner ce match, renchérit l'arrière des Bleus. Si on gagne ce match sans jeu, ce n'est pas grave. On veut passer ce quart de finale, point barre. On pense d'abord au combat, le reste, on verra après..." A prendre les clés du camion, selon le voeu de leur sélectionneur, les joueurs auraient donc enfin fait ce fameux choix de réduire la voilure et de revenir aux fondamentaux tellement galvaudés jusqu'à présent. "Je veux que définitivement ils valident et qu'ils fassent les choses avec conviction, avait prévenu Marc Lièvremont. Les contenus, peu importe, c'est un match à enjeu, qu'on matche et qu'on gagne, comme on l'a fait face à l'Angleterre (lors du Grand Chelem 2010), avec un rugby quasiment à zéro passe, pourquoi pas..." Et Imanol Harinordoquy, qui le premier a choisi de muscler son jeu comme son discours (voir par ailleurs), de répondre en écho: "Ça veut dire qu'il faut qu'on se responsabilise, que s'il y a des choses qu'on ne sent pas, on ne les fait pas, qu'on rentre sur le terrain avec plus de conviction, si c'est revoir nos schémas de jeu à la baisse, faire moins de jeu ou plus de jeu, on le fera, en tout cas, faire des choses simples et maîtrisées, que tout le monde soit OK sur ce que l'on fait." La recette prônée par les Bleus est vieille comme le rugby. On pourrait dire aussi que la ficelle est un peu grosse pour espérer prendre la Rose à son propre jeu, même si après tout cette équipe de France, une fois n'est pas coutume, est sur ce Mondial plus disciplinée que son homologue anglaise et se paye même le luxe d'avoir les buteurs les plus en réussite du tournoi. Le mot de la fin pour un Harinordoquy au casque lourd de rigueur pour s'adresser à la presse: "Vous nous faites beaucoup parler, c'est bien, mais on ne s'est peut-être pas beaucoup parlé jusqu'à présent (entre joueurs). On s'est un peu plus parlé dernièrement, mais on a besoin d'actes sur le terrain. Le dire, c'est bien, mais le faire, c'est mieux. [...] L'équipe de France a été performante quand elle ne se posait pas de questions et qu'elle était combattante." Et Papé d'aouter: "On n'a plus trop envie de parler, plutôt envie d'agir." La semaine s'annonce très longue...