Une chute a bouleversé sa vie : "Depuis mars 2013, je ne mange plus"

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Léa Beaudufe-Hamelin , modifié à
Marie-Pascale ne mange presque plus depuis huit ans, à cause des nombreux médicaments qu’elle a pris à la suite d’une fracture. Au micro de Sabine Marin, sur "La Libre antenne" d’Europe 1, Marie-Pascale confie également souffrir du manque de reconnaissance de sa famille qui ne croit pas à sa douleur.
TÉMOIGNAGE

En mars 2013, Marie-Pascale a fait une chute et s’est fracturé un os du pied. Elle a alors déclaré une algodystrophie, qui la fait encore souffrir huit ans après sa chute. Marie-Pascale explique qu’à cause des nombreux médicaments qu’elle a pris, elle ne mange quasiment plus depuis huit ans. Outre la douleur physique, Marie-Pascale souffre du manque de reconnaissance de sa famille qui ne croit pas à sa douleur. Sur "La Libre antenne" d’Europe 1, Marie-Pascale raconte comment cette chute a bouleversé sa vie.

"J’ai fait une grave chute en mars 2013. Depuis, je ne mange plus et je suis abandonnée par ma famille. Personne ne veut croire à ma douleur. Je suis tombée bêtement, c’était un accident domestique. Je me suis pris les pieds dans le tapis. Je me suis fracturé le cinquième métatarsien, un os du pied. J’étais sportive. J’étais une très bonne joueuse de tennis, j'étais classée. Ma vie s’est effondrée avec cette chute. J’ai fait une algodystrophie, j’ai beaucoup souffert et j’ai été mal soignée.

" Je n'ai pas mangé normalement depuis mars 2013 "

On m’a bombardée de médicaments qui m'ont détruit le foie et l'estomac. Je ne mange plus ou à peine. Les médecins ne parviennent pas à me soigner. Ils me prescrivent des médicaments pour dormir, parce que je ne dors pas de la nuit tant je souffre. Ce qui me fait le plus souffrir, c’est l’algodystrophie et le manque de reconnaissance de mes proches. Ils ne m’appellent pas. Je les appelle, mais ils ne veulent pas reconnaître ma souffrance. Quand je dis que je ne mange pas, ils ne me croient pas. 

Je n'ai pas mangé normalement depuis mars 2013. C’est très dur de ne prendre que des médicaments et de ne pas manger. J’ai certainement des carences, mais le médecin ne me fait pas de prise de sang. Je ne suis pas bien prise en charge. Je pense qu’il faut que je change de médecin. J’ai essayé l'acupuncture, mais ça n'a pas donné grand-chose. J’ai fait des séances d’ostéopathie l’été dernier. Ça a un peu soulagé mes douleurs. Ma prise en charge médicale n’est pas satisfaisante du tout.

" Mes enfants voudraient que j'aille en EHPAD "

C’est surtout le manque de reconnaissance de ma famille qui m’afflige beaucoup. Ils me trouvent bête. Je ne reçois pas beaucoup de messages de mes enfants et mes petits-enfants. C’est dur parce que mes enfants sont loin. Avant la chute, ça allait. Je me débrouillais toute seule. Je ne les appelais que le dimanche soir, je les laissais travailler. Maintenant, j’ai davantage besoin d'eux parce que je suis seule et malade. Eux voudraient que j'aille en EHPAD. J'ai 69 ans. Je n’en ai pas du tout envie. Si j’y vais, je mourrais dans la semaine.

Mes enfants en ont assez que je sois dans la demande, donc j’essaie de ne pas peser sur eux. J'essaie de me débrouiller seule. J'ai des aides à domicile qui viennent deux heures par jour, sauf le week-end. J’ai besoin d’aide, c’est une évidence. Je suis hyper algique et surtout, je m'affaiblis parce que je ne mange pas beaucoup. À cause de l’algodystrophie, tout est compliqué. Je ne peux pas me déplacer. Pour aller voir mes enfants, c'est compliqué. Je ne les vois pas beaucoup. Je ne vois pas mes petits-enfants grandir. Je les appelle en visio le weekend. Heureusement que j’ai ça.

Je n’ai pas beaucoup d’amis. Ils ne se manifestent pas. À cause de la crise sanitaire, ils restent chez eux. Mes amis ont peur du Covid-19, donc on ne se voit plus. Au premier confinement, on s'envoyait des mails, on s'encourageait. Maintenant, les gens n'écrivent et ne téléphonent même plus. J'aime téléphoner, mais les gens n’appellent plus. J’appelle, je leur laisse des messages, mais ils ne me rappellent pas. J’oublie la sonorité de la voix de mes amis. C'est terrible.

Quand j'étais jeune, je jouais du piano et j'étais dans un chœur. Tout cela me manque beaucoup. Je vais me délier les doigts et reprendre des cours. Je peux me promener à pieds, mais à part ça, je ne peux pas faire grand-chose. Je joue aux cartes sur Internet. Je regarde la télévision, mais ce n'est pas une vie que de passer de son lit à son canapé, puis de son canapé à son lit. Comment se distraire quand on est ainsi confiné et qu’on a plus la santé ?"