Trente imams appellent à combattre la radicalisation mais rejettent toute incrimination du Coran

Trente imams regrettent notamment que des "lectures et des pratiques subversives de l'islam" aient conduit à une "situation cancéreuse". © JEAN-SEBASTIEN EVRARD / AFP
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avec AFP , modifié à

Ces imams se disent "indignés", comme tous les "musulmans paisibles" qui "souffrent de la confiscation de leur religion par des criminels".

Trente imams de France s'engagent à combattre la radicalisation d'une jeunesse "ignorante, perturbée" et tentée de commettre des crimes "au nom de l'islam", tout en rejetant la thèse "funeste" selon laquelle le Coran appellerait lui-même au meurtre, dans une tribune publiée mardi dans Le Monde.

"Indignés, nous le sommes en tant que Français touchés par ce terrorisme ignoble qui nous menace tous. Nous le sommes aussi en tant que musulmans, comme le reste de nos coreligionnaires, musulmans paisibles, qui souffrent de la confiscation de leur religion par des criminels", écrivent ces responsables religieux, tout en prenant leurs distances avec le manifeste contre "un nouvel antisémitisme" publié dimanche dans Le Parisien et appelant à expurger certains passages du Coran.

"Le vrai sacrifice est de se donner pour les autres." Ils déplorent de voir "l'islam tomber dans les mains d'une jeunesse ignorante, perturbée et désœuvrée", emmenée par des "théoriciens d'une géopolitique du chaos [qui] lui proposent un sens dévoyé du martyr". "Le vrai sacrifice est de se donner pour les autres, comme l'a fait notre héros national, le colonel Arnaud Beltrame", écrivent ces imams, en référence au gendarme qui est mort en se substituant à un otage lors de l'attaque djihadiste de l'Aude du 23 mars.

Regrettant que des "lectures et des pratiques subversives de l'islam" aient conduit à une "situation cancéreuse, à laquelle certains imams malheureusement ont contribué, souvent inconsciemment", les signataires de cet appel mettent en garde contre les "dégâts" que ces discours peuvent provoquer, et les "effet psychologiques nocifs sur des esprits vulnérables".

"Faire preuve de plus de discernement." "Nous ne sommes pas à l'abri d'autres crimes au nom de l'islam", écrivent-ils, exhortant les imams à "résister à une orthodoxie de masse, à un populisme communautariste et aux demandes d'overdoses religieuses". Ce collectif, qui comprend les imams de Bordeaux, Nice ou Strasbourg, appelle par ailleurs "le reste de nos concitoyens, notamment les intellectuels et les politiques, à faire preuve de plus de discernement".

L'idée avancée dans le manifeste contre "un nouvel antisémitisme" que le Coran lui-même appellerait au meurtre est "d'une violence inouïe", jugent les 30 imams dans Le Monde. "Elle laisserait entendre que le musulman ne peut être pacifique que s'il s'éloigne de sa religion", écrivent-ils, dénonçant une "ignorance néfaste" et contre-productive. La "radicalité ou radicalisation doit être combattue intelligemment par tous les concernés, des politiques aux imams en passant par la famille, l'école, le sécuritaire… Que chacun assume sa part de responsabilité", écrivent les signataires.