Six détenus dans 11 m2 : un rapport accablant sur le centre pénitentiaire de Guyane

Pour faire "cesser le climat de violence", Adeline Hazan juge nécessaire d'augmenter les effectifs de surveillants et que "l'autorité de la direction" soit "restaurée". © JODY AMIET / AFP
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avec AFP , modifié à

Dans un rapport publié jeudi, la contrôleure des prisons s'alarme des conditions de détention "inhumaines" à Rémire-Montjoly en Guyane.

Six détenus dans 11m2, insalubrité, violence extrême : les conditions de détention au centre pénitentiaire de Rémire-Montjoly, en Guyane, sont "inhumaines", s'alarme la contrôleure générale des prisons dans des recommandations rendues publiques jeudi.

Une dégradation après un premier contrôle. Le constat dressé lors d'une visite de cette prison du 1er au 12 octobre fait apparaître "un nombre important de dysfonctionnements graves", en violation des droits fondamentaux des personnes incarcérées, justifiant cette procédure d'urgence de la contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL), Adeline Hazan. Malgré des recommandations émises à l'issue d'une première visite dans l'établissement en 2008, "la situation s'est encore dégradée", déplore Adeline Hazan.

Un taux de remplissage de 125%. Ouverte en avril 1998, l'unique prison de Guyane souffre d'une "surpopulation chronique", malgré une "réduction notable" du nombre de détenus, passé de 907 personnes en décembre 2016 à 736 en octobre 2018 pour 614 places.  Le surpeuplement, dont le taux moyen est de 125%, commence "dès les quartiers des arrivants, dont les cellules ont été doublées", avec parfois des matelas installés au sol, constate la contrôleure générale.

Supprimer l'encellulement à six personnes. Dans la maison d'arrêt des hommes, deux à trois détenus cohabitent dans des cellules individuelles de 10 m2. Six personnes vivent dans les cellules doubles de 22 m2, réduites à 11 m2 une fois "déduite l'emprise des lits, des toilettes et de la table", écrit Adeline Hazan qui demande en "priorité" la suppression des encellulements à six personnes. Au quartier des femmes, deux mères sont détenues avec leur nourrisson, en cellule ordinaire, faute de places suffisantes à la nurserie.

"Cafards" et "aliments en décomposition". La CGLPL s'inquiète aussi de l'insalubrité des cellules et de l'hygiène "désastreuse" dans l'établissement, déjà fortement dégradé par le climat tropical. Les hommes sont contraints de se laver dans les douches des cours de promenade, "à la vue de tous" ; les "rats, cafards et autres insectes, évoluent dans les cellules et les cours de promenade, attirés par les aliments en décomposition", les détenus ne pouvant pas acquérir de réfrigérateur, note Adeline Hazan.

"Restaurer l'autorité de la direction". La prévention de la violence, érigée en priorité dans cet établissement qui a connu cinq meurtres entre 2011 et 2016 et qui reste touché par les bagarres entre détenus "dans un contexte d'inactivité généralisée", est insuffisante. Pour faire "cesser le climat de violence", Adeline Hazan juge nécessaire d'augmenter les effectifs de surveillants et que "l'autorité de la direction" soit "restaurée". En réponse à ces recommandations, la ministre de la Justice Nicole Belloubet a rappelé le projet de construction d'une maison d'arrêt à Saint-Laurent du Maroni, soit "500 places de détention supplémentaires en Guyane".