Servane est parvenue à soigner son alcoolisme : "C’est une maladie"

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Léa Beaudufe-Hamelin , modifié à
Au micro de "La Libre antenne", Servane témoigne de son alcoolisme et de la bataille qu’elle a menée et continue de mener pour se soigner. Elle évoque les origines de son alcoolisme, et raconte à Olivier Delacroix comment celui-ci a affecté sa vie familiale, sociale, sportive et professionnelle.
TÉMOIGNAGE

Après un mariage compliqué, Servane est tombée dans l’alcoolisme. Elle est parvenue à en sortir après avoir pris conscience, avec l’aide de son médecin, qu’elle devait se soigner. Au micro de "La Libre antenne", sur Europe 1, Servane évoque son alcoolisme passé, dans lequel elle a basculé sans s’en rendre compte. Elle raconte à Olivier Delacroix la bataille qu’elle a menée pour s’en sortir, bien qu’elle ne se considère pas complètement abstinente aujourd’hui.

"Je suis alcoolique, abstinente pendant de plus ou moins longues périodes. Se soigner, cela passe par l’acceptation. L’acceptation, c’est se dire : oui c’est une maladie, non ce n’est pas normal, mais ce n’est pas mal. C’est un gros boulot que j’ai fait il y a une dizaine d’années. Je me suis dit que ma consommation n’était pas normale, ça me gênait pour le sport et dans ma vie quotidienne. J’en ai parlé à mon médecin. Je ne remercierai jamais assez mon médecin traitant de l’époque qui a trouvé les mots. Il est passé outre la fonction et les apparences, et a mis les mots là-dessus.

" Je suis descendue très bas et très vite "

C’est ce qui m’a fait réagir. Il fallait que je fasse quelque chose. Je n’ai pas de famille à part mon fils. Je me suis dit : ‘Il faut que je me batte pour mon fils’. J’avais l’impression de m’être battue toute ma vie. Mon fils avait son père, ses grands-parents, donc je pensais qu’il n’avait pas besoin de moi. J’ai pensé que j’étais une mauvaise mère. Cela a duré quelques années. Je suis descendue très bas et très vite. C’est une maladie. C’est insidieux.

L’origine c’est un mariage qui ne se passe pas bien. Petit à petit, j’en suis arrivée à me dire : ‘Je ne suis pas une bonne mère, je ne suis pas bonne dans ce que je fais professionnellement, je ne suis pas bonne dans ce que je fais dans mes loisirs’. À l’époque mon fils était bébé. C’est arrivé très vite. La façon dont j’étais traitée me conduisait à me dénigrer. Depuis le temps que je travaille sur les causes de mon alcoolisme, je sais que ça vient de là. Perte totale de confiance et grosse capacité à me dénigrer.

" C’est venu très insidieusement "

À ce moment-là de ma vie, tout avait la même importance. Les choses qui maintenant me semblent dérisoires étaient aussi importantes que les choses qui me semblent encore maintenant primordiales. Tout était sur le même plan. J’ai coulé parce que quand l’on n’arrive pas à distinguer le bien du mal, tout devient grave, tout devient faute et tout devient mal. Je vais boire un petit coup pour me remonter en rentrant du boulot.

Ça commence par un verre de trop le weekend, puis le lundi c’est le verre qui permet d’affronter le mardi, et le mardi ce sont deux verres qui permettent d’affronter le mercredi… C’est venu très insidieusement, mélangé à d’autres soucis. Je n’ai pas vu les choses arriver. Il a fallu que ce médecin traitant me dise clairement les choses. Il m’a dit : ‘Vous êtes une super maman, une super sportive, mais en même temps vous êtes en train de tout rater. Il faut vous faire soigner’.

" On finit par mentir pour pouvoir se droguer "

Une fois que j’en ai pris conscience, je suis passée par cure et post-cure. Ce qui m’a sauvée c’est une post-cure en particulier, axée sport. Je me suis redécouverte. Je suis restée trois mois là-bas. J’étais loin de là où j’habitais, dans un environnement différent. Je suis plutôt mer et je me suis retrouvée à la montagne. J’ai pris conscience que je me sous-estimais, mais que finalement on se sous-estime tous. On prend des références tellement supérieures à nous, que l’on ne peut que se mettre en position d’échec dès le départ.

J’ai fait ce qu’il fallait pour reprendre le travail, reprendre le sport, retrouver une vie sociale. On se coupe des autres très rapidement. On ment. En ce qui concerne la forme d’alcoolisme qui m’a touchée, il fallait que je sois seule. Je ne voulais pas me montrer ivre hors des circonstances autorisées, hors des fêtes. Il ne fallait pas que l’on me voie. C’est terrible socialement, on finit par mentir pour pouvoir se droguer.

Je ne peux plus dire que je suis abstinente. Je l’étais complétement il y a trois mois. L’abstinence s’est rompue momentanément. Je suis suivie. Les psychiatres et addictologues me disent c’est un moment à passer, ça va revenir. De toute façon, s’il y a rechute, ça n’a rien à voir avec ce que c’était. J’ai été obligée d’être arrêtée professionnellement très longtemps. J’ai arrêté le sport très longtemps.

Ce que je vis actuellement ne m’empêche pas de travailler. Je ne vais pas boire si je travaille le lendemain. Je sens comme une mesure par rapport ce que j’ai pu connaître dans la déchéance. C’est une déchéance à nouveau, mais elle est moindre. Il est important de faire face au problème. Moi, cela m’a pris douze ans. Faire face, c’est déjà se l’avouer. Cela m’a pris douze ans de m’avouer que j’avais un problème."