Ce rapport qui ambitionne de reconnecter les hauts fonctionnaires avec le terrain

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Olivier Samain, édité par Romain David

Un rapport remis mardi au Premier ministre par Frédéric Thiriez, l'ancien patron de la Ligue de football professionnel, propose de bousculer la formation des futurs hauts fonctionnaires, quelle que soit l'institution choisie, de manière à mettre en place davantage de diversité et à reconnecter les étudiants avec les réalités du terrain.

C'est un rapport qui ne passe pas inaperçu. Frédéric Thiriez, l'ancien patron de la Ligue de football professionnel, a été chargé d'une mission sur la réforme de la haute fonction publique. Le climat social des derniers mois a peut-être conduit à un changement de paradigme. L'ENA, mais aussi les autres institutions comme Polytechnique, ou les écoles de la Magistrature, sont désormais jugées trop élitistes. Ce rapport propose un ensemble de réformes pour permettre à la haute administration française d’être plus représentative de la société, avec une vraie diversité.

Parmi les préconisations : la création d’une vingtaine de classes préparatoires dans toute la France pour ouvrir la voie à des jeunes issus de toute la France et de tous les territoires. Mais aussi l’instauration d’un socle commun de six semaines, par lequel passerait tous les futurs hauts fonctionnaires, et qui inclurait une préparation militaire de trois semaines, puis trois autres semaines consacrées à l’encadrement de jeunes du Service national universel.

Enfin, troisième préconisation : les futurs hauts fonctionnaires ne rentreraient pas directement à leur sortie d’école dans les grands corps comme l’inspection des finances. Pendant deux ans, les jeunes cadres feront de l’administration de terrain, avant d’intégrer l’institution choisie, où ils ne seront titularisés qu’au bout de quatre ou cinq ans.

Les réserves de la magistrature

Du côté de la magistrature, on craint que ces mesures s’appliquent au détriment de l’enseignement théorique. "Nous ne sommes pas opposés à une formation en commun avec les hauts fonctionnaires, l’important est qu’elle préserve la qualité de la formation actuellement dispensée", explique à Europe 1 Céline Parisot, la présidente de l'Union syndicale de la magistrature. "Aujourd’hui, la formation d’un magistrat dure 31 mois, y intégrer six mois de formation en commun avec d’autres, pourquoi pas ? Mais pas à n’importe quel prix. Il faut que l’on reste dans un objectif pédagogique adapté."

Autre réserve pour cette magistrate : la mise en place d’un cursus commun, au détriment des spécificités de chaque corps. "La préparation militaire n’a aucun sens pour des magistrats", relève-t-elle. "La justice est indépendante, les magistrats ne sont pas là pour apprendre à marcher au pas ou répondre aux ordres. C’est l’inverse des objectifs pédagogiques de l’Ecole nationale de la magistrature actuellement", tacle-t-elle. De son côté, le Premier ministre Edouard Philippe a salué les orientations de ce rapport, avant d’annoncer que 2022 serait la première année de mise en œuvre des nouvelles modalités de sélection et de formation des hauts fonctionnaires.