Penelope Fillon mise en examen : de quoi est-elle soupçonnée ?

Deux semaines après son mari, Penelope Fillon a été mise en examen, mardi.
Deux semaines après son mari, Penelope Fillon a été mise en examen, mardi. © JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP
  • Copié
M.L avec AFP
L'épouse du candidat LR à l'élection présidentielle a été mise en examen après plusieurs heures d'audition par trois juges d'instruction, mardi.

Personne ne l'a vue entrer ou sortir des locaux du pôle financier, où elle était convoquée par trois juges d'instruction. Mais la discrète Penelope Fillon, 61 ans, a bel et bien été entendue et mise en examen, mardi. Deux semaines après son époux, elle est la troisième personne à être placée sous ce statut dans ce dossier, après le candidat LR à l'élection présidentielle et son ancien suppléant à l'Assemblée nationale, Marc Joulaud. Trois chefs d'accusation ont été retenus contre celle qui est soupçonnée d'avoir été fictivement employée en tant qu'assistante parlementaire.

  • "Complicité et recel de détournement de fonds publics"

Au cœur de l'enquête se trouvent les contrats de Penelope Fillon, signés de 1986 à 2013 avec plusieurs interruptions, comme assistante parlementaire de son mari ou de Marc Joulaud. Elle a, pour ces missions, été rémunérée à hauteur de 680.380 euros net au total. La justice soupçonne ces emplois, révélés par le Canard Enchaîné, d'être fictifs. "Dans les couloirs du Palais-Bourbon comme dans le fief de son mari, personne n'a jamais croisé d'assistante parlementaire du nom de Penelope Fillon", écrivait l'hebdomadaire après avoir interrogé de nombreux anciens collaborateurs du couple, fin janvier.

Si les emplois de Penelope Fillon s'avéraient fictifs ou surévalués, l'épouse du candidat LR pourrait être condamnée pour "complicité et recel de détournement de fonds publics", son salaire ayant été payé par le "crédit parlementaire" alloué à chaque député pour rémunérer ses collaborateurs. Dans ce volet de l'enquête, une perquisition à l'Assemblée nationale a permis de constater qu'aucun badge ni adresse mail au nom de Penelope Fillon n'avait jamais existé. Le député de Paris argue que son épouse était son "relais" à Sablé-sur-Sarthe, fief du couple, assurant qu'elle s'occupait de "tâches simples mais essentielles", comme la gestion du courrier ou de l'agenda.

  • "Complicité et recel d'abus de biens sociaux"

C'est la deuxième révélation du Canard Enchaîné : de mai 2012 à décembre 2013, Penelope Fillon a également été employée de la Revue des deux mondes, l'un des plus vieux mensuels de France. "Je n'ai jamais rencontré Penelope Fillon et ne l'ai jamais vue dans les bureaux de la revue", a indiqué au journal satirique Michel Crépu, ancien directeur du périodique. En plus d'un an, l'épouse de François Fillon n'a fourni que deux notes de lecture, publiées sous un pseudonyme. Elle assure avoir par ailleurs rempli un rôle de "conseil" pour la revue.

Là encore, les juges d'instruction Serge Tournaire, Aude Buresi et Stéphanie Tacheau cherchent à savoir si cet emploi a pu être fictif. D'autant que la Revue des deux mondes appartient à Marc Ladreit de Lacharrière, proche du candidat Les Républicains. En 2011, ce dernier a reçu des mains de son ami, alors Premier ministre, la dignité de "grand'croix dans l'ordre national de la Légion d'honneur". L'emploi de Penelope Fillon pourrait-il alors être une compensation pour service rendu ? L'enquête devra le déterminer.

  • "Recel d'escroquerie aggravée"

Mi-mars, l'enquête initiée par le parquet national financier (PNF) a été élargie à des soupçons de faux et d'usage de faux et d'escroquerie aggravée. Lors de leurs perquisitions à l'Assemblée nationale, les enquêteurs ont en effet découvert une fiche de renseignement sur laquelle l'épouse du candidat déclarait, en juillet 2012, travailler 14 heures par mois à la Revue des deux mondes. Mais dans le bureau de François Fillon, un autre document, semblant être un brouillon, a été trouvé et fait état d'un nombre d'heures deux fois plus élevé.

Les enquêteurs se demandent si le volume horaire des missions de "conseil" de Penelope Fillon a pu être minimisé, afin de respecter la limite légale du temps de travail cumulé lorsqu'elle était à la fois salariée de la revue littéraire et de l'Assemblée nationale, deux emplois censés être à temps plein. Si les juges n'ont pas retenu les chefs de faux et d'usage de faux dans leur convocation adressée à Penelope Fillon, ils l'ont donc mise en examen pour recel d'escroquerie aggravée.