Olivier, 23 ans, bisexuel : "Je trouve ça génial de ne pas avoir à faire de choix"

Olivier, qui a "toujours été curieux", a mis un mot sur son orientation sexuelle il y a deux ans. Photo d'illustration.
Olivier, qui a "toujours été curieux", a mis un mot sur son orientation sexuelle il y a deux ans. Photo d'illustration. © Sarah Rice / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP
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Thibaud Le Meneec
Bisexuel, Olivier n'a pas peur du jugement des autres mais ne souhaite pas forcément faire un "coming out officiel" auprès de sa compagne et de ses parents. Il a raconté son histoire à Olivier Delacroix, mardi, sur Europe 1.
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Cela fait maintenant trois ans qu'Olivier, 23 ans, est en couple avec une femme. Le jeune homme se définit comme bisexuel, une notion qui lui permet de "se départir d'une étiquette" et de ne pas avoir à faire de choix, comme il l'a expliqué au micro Europe 1 d'Olivier Delacroix, mardi. Aujourd'hui, il n'éprouve pas le besoin de se revendiquer comme tel avec ses parents et sa compagne, moins par peur du jugement que par volonté de préserver sa relation de couple. Même si, dit-il, "ça fait quand même du bien de l'avouer de temps en temps".

 

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"Là, je suis dans une relation avec une jeune femme depuis trois ans et je pense que ma bisexualité ne remet rien en question. J'ai pu laisser quelques indices, sans faire exprès, mais elle ne l'a pas relevé. Elle est assez ouverte sur le sujet. J'ai déjà pu évoquer une attirance pour certains hommes, comme ça, au détour d'une conversation. Elle a déjà remarqué que tel homme, je le trouvais attirant, mais on n'en a pas discuté plus que ça. Je ne le lui ai pas annoncé de manière solennelle.

"Si mes parents me posaient la question, je le leur dirais"

Un homme hétéro en relation avec une femme, il sera toujours attiré par d'autres femmes. Moi, je peux toujours trouver d'autres personnes plus ou moins attirantes, comme tout le monde. Mais dans mon cas, il peut s'agir d'hommes ou de hommes, sans distinction.

Au lycée, c'est dans une période d'introspection que j'ai commencé à m'intéresser à mes choix, à vouloir tester de nouvelles choses. J'ai toujours été curieux. J'ai mis officiellement un mot dessus il y a deux ans, mais c'est surtout au moment de l'émergence du mouvement #MeToo sur Internet que j'ai eu une deuxième occasion d'avoir une introspection, une remise en question et une déconstruction de la masculinité. Ça a aussi renforcé mon rejet des étiquettes. Et pour moi, la bisexualité, c'est en quelque sorte se départir d'une étiquette.

Entendu sur europe1 :
C'est une affaire de normes. Je peux comprendre que certains se sentent plus à l'aise en se rangeant dans une case précise

Avec mes parents, c'était totalement secret. S'ils me posaient la question, je le leur dirais. Je ne le cache pas spécialement, c'est juste que je n'en parle pas. J'en ai parlé à certains amis, dont je savais qu'ils ne me jugeraient pas et dont le comportement à mon égard ne changerait pas s'ils le savaient. Ça fait quand même du bien de l'avouer de temps en temps. Je n'ai pas du tout peur du jugement. Si on me le demande, je ne vais pas mentir. Je sais choisir mon entourage et je pense savoir que ça va bien passer chez tout le monde.

[Les personnes qui estiment que la bisexualité n'est pas une sexualité à part entière] ont le droit de penser ça. C'est une affaire de normes. Je peux comprendre que certains se sentent plus à l'aise en se rangeant dans une case précise. Moi, je trouve ça génial de ne pas avoir à faire de choix. La sexualité est avant tout une affaire de plaisir et non plus une problématique de sauvegarde de l'espèce. Et qu'on soit bi, hétéro ou homo, ce n'est jamais un choix."

L'avis de Félix Dusseau, sociologue spécialiste des questions de sexualité

On pourrait définir la bisexualité comme une attirance amoureuse, sentimentale et/ou sexuelle envers des personnes de plus d'un sexe ou d'un genre. Elle est multiple et c'est peut-être là le nœud de la question. Il va y avoir des personnes qui vont être amoureusement attirées uniquement par les hommes ou par les femmes mais aussi avoir une sexualité plurielle ou encore des personnes qui auront des pratiques sexuelles avec les deux sexes. Parfois, ce n'est pas égal : on s'imagine que la bisexualité se situe entre l'hétérosexualité et l'homosexualité, mais ça va au-delà de cette considération. Ça peut être sur certaines périodes la vie, de manière ponctuelle, voire unique. Ça peut être une attirance à 50%/50%, mais aussi à 95%/5%.

Il peut s'agir d'une bisexualité identitaire et affirmée ou d'une bisexualité qualifiée de possibilité, comme dans le témoignage d'Olivier. Certaines personnes peuvent se revendiquer bisexuelles pour rassurer l'entourage, mais il ne faut pas tomber dans le travers inverse en disant que toutes les personnes bisexuelles sont des personnes homosexuelles qui ne s'assument pas. La bisexualité est un miroir de notre société, qui met en avant une exclusivité sentimentale et sexuelle, une norme très importante. Dans la rue, on peut difficilement voir qu'une personne est bisexuelle. Les personnes bisexuelles brouillent involontairement les pistes et c'est ce qui fait réagir de manière négative certaines personnes.