Meurtre d'un cambrioleur : 10 ans de prison pour le buraliste du Tarn

Luc Fournié avait été condamné à sept ans de prison en première instance.
Luc Fournié avait été condamné à sept ans de prison en première instance. © PASCAL PAVANI / AFP
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Ce patron d'un bar-tabac avait plaidé la légitime défense, une thèse écartée par l'avocat général. 

Le buraliste du Tarn qui avait tué un cambrioleur de 17 ans a été condamné vendredi en appel à Toulouse à 10 ans de prison, soit trois ans de plus qu'en première instance. Lors des trois jours du procès, Luc Fournié, 59 ans, patron d'un bar-tabac de Lavaur avait plaidé la légitime défense, une thèse écartée par l'avocat général, qui a donc été suivi par la cour d'assises.

"Chronique d'une mort annoncée". "C'est la chronique d'une mort annoncée, tous les indicateurs étaient au rouge pour que cette affaire se termine par un drame et c'est précisément ce qui est arrivé", avait souligné dans ses réquisitions Jean-Marc Chazottes, l'avocat général. En première instance, le parquet avait demandé implicitement l'acquittement, en retenant la qualification de légitime défense, mais n'avait pas été suivi par la cour d'assises du Tarn qui avait condamné Luc Fournié à sept ans de prison. Il avait été libéré un mois après sa condamnation et avait fait appel.

Un fusil et des "rondes". Le buraliste était jugé pour avoir tué d'un coup de fusil de chasse Jonathan, un lycéen de 17 ans, qui était venu cambrioler son commerce à Lavaur, dans le Tarn, dans la nuit du 14 décembre 2009. Quatre jours avant les faits, l'accusé avait découvert que des barreaux d'une fenêtre de son café avaient été sciés. Il était alors allé chercher le fusil de son père, des cartouches et avait installé un système d'alarme de fortune, après avoir alerté les gendarmes. Il avait aussi décidé de dormir au rez-de-chaussée et de "faire des rondes". Le soir du cambriolage avorté, après avoir tiré à bout portant sur Jonathan, qui s'était effondré, le buraliste avait tiré une deuxième fois en direction de son acolyte, qui s'enfuyait, sans l'atteindre. 

"On ne peut pas évoquer la légitime défense préventive". L'avocat général a longuement questionné les décisions de Luc Fournié : le fait que les barreaux n'aient pas été réparés, qu'il n'ait pas remis en marche son "alarme volumétrique", posé un verrou, puis le soir-même allumé la lumière ou appelé les gendarmes. "On ne peut pas évoquer la légitime défense préventive", a estimé le magistrat. "On sait que Luc Fournié avait quatre jours pour penser, réfléchir, se retourner, réagir de façon adéquate", a déclaré l'avocat général, estimant que l'accusé avait "préparé, anticipé un dispositif d'autodéfense qui n'était ni nécessaire ni proportionné". Dans ses motivations, la cour d'assises évoque également le deuxième coup de feu sur l'individu en fuite, "ce qui ne peut jamais constituer un acte de défense." 

"Glissement dangereux de la légitime défense à l'autodéfense". La décision, prononcée après 5h30 de délibéré, a entraîné une vague d'émotion et de colère chez la famille de Luc Fournié, alors que des pleurs résonnaient du côté des proches de la victime. L'accusé, lui, a semblé assommé. Jugeant le verdict "absolument aberrant, incompréhensible", Me Georges Catala, avocat de la défense, a indiqué son intention de se pourvoir en cassation. La cour a "refusé ce glissement dangereux de la légitime défense à l'autodéfense, que la force l'emporte sur le droit", s'est au contraire félicité Me Simon Cohen, avocat des parties civiles.