Meryem a été victime de violences conjugales : "Jamais je n'aurais cru vivre ça"

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Léa Beaudufe-Hamelin
Pendant sa première relation amoureuse, Meryem a subi des violences conjugales. Au micro de Sabine Marin, sur "La Libre antenne" d’Europe 1, Meryem explique qu’elle tente désormais de se reconstruire, mais garde des séquelles des violences verbales, physiques et sexuelles dont elle a été victime.
TÉMOIGNAGE

Meryem a mis fin à sa première relation amoureuse, pendant laquelle elle a été victime de violences conjugales. Elle explique que c’est grâce au premier confinement qu’elle a pu s’éloigner de son ex-compagnon et rompre, parce qu’elle était confinée chez ses parents loin de lui. Aujourd’hui, elle a rencontré quelqu’un et essaye de se reconstruire, mais garde des séquelles de son ancienne relation. Sur "La Libre antenne" d’Europe 1, Meryem évoque les violences verbales, physiques et sexuelles qu’elle a subies.

" J’ai 21 ans. Pendant le premier confinement, je suis sortie d’une relation amoureuse très prenante qui a duré 3 ans, pendant laquelle j’ai été victime de violences conjugales et j’ai vécu un avortement. Maintenant, j’en parle beaucoup calmement, mais ça a été très dur de couper le lien et rompre. C’est vraiment le premier confinement qui m’a aidée à le faire, parce que j'étais rentrée chez mes parents. J'essaye de me reprendre en main, de me consacrer à mes études, de retrouver mes amis que j'avais complètement perdus et je débute une nouvelle relation amoureuse. 

J’ai commencé une thérapie. La thérapeute m'a expliqué que les violences conjugales, l'avortement et d'autres épisodes ont créé des traumatismes et qu'il fallait travailler sur chacun d’eux. Je suis très en colère contre moi-même parce que j'estime que j'ai perdu trois ans de ma vie avec une personne qui m'étouffait et me privait de ma jeunesse. C'est pour ça que j'ai envie de rencontrer l’amour à nouveau et de vivre ma vie parce que j'estime que j'ai perdu trop de temps et que cette personne m'a trop fait souffrir.

" Tout mon environnement tournait autour de cette personne "

C'était ma toute première histoire. J'ai rencontré cette personne à l'âge de 17 ans. Tout mon environnement tournait autour de cette personne et réciproquement, parce que nous étions tous les deux étudiants étrangers en France. Dès le départ, ça ne s'est pas bien passé. Ça a coincé physiquement et je suis malgré tout tombée enceinte. C'est pour ça que ça a créé un problème de vaginisme chez moi. Je n'étais pas forcément très attirée physiquement par cette personne. Pour moi, le rapport intime devenait un poids et un stress. Ça n'a jamais été un moment de plaisir.

Je n'avais jamais vécu de violences avant cette relation. Je me rappelle que ça a commencé par un truc bête, une histoire de billets d’avion. Il a piqué une crise et a pris ma tête. Je me suis enfermée dans la salle de bain. Il a frappé dans la porte et a fait un trou énorme. Au début, je ne réagissais pas, j'étais pétrifiée. Jamais je n'aurais cru vivre ça un jour, et encore moins venant de cette personne qui est cultivée, ouverte d'esprit et qui vient d’un certain milieu. En fait, les violences conjugales, c’est chez tout le monde. Après, quand on a vécu ensemble, j'ai commencé à répondre et à me défendre.

" On a l'impression d’être dans une prison invisible "

Un soir, j'étais complètement tétanisée. Il n'était pas là, c'était une dispute par téléphone. À 3 heures du matin, je suis allée chez une amie que je n'avais pas vue depuis deux ans et je lui ai tout raconté. Cette amie m'a dit de rompre et de m'éloigner de cette personne, mais c'était trop compliqué. J'étais convaincue qu'on allait rompre, mais c'est tellement dur de couper le lien. On a l'impression d’être dans une prison invisible. J'étais en prison pendant trois ans et le confinement a été plus que libérateur. 

J’ai pu rentrer chez mes parents pendant quatre mois et demi. J’étais en colère contre mes parents parce qu'ils ne s’en rendaient pas compte. Mes parents ont toujours été présents pour moi, mais je ne leur ai jamais parlé de mes relations. Ils se doutaient que j'étais en couple, mais ce sont des choses qu’on ne se dit pas. Quand j'ai rompu avec cette personne, j'avais tellement de colère en moi que j’ai tout raconté à ma mère. Elle a eu une réponse à laquelle je ne m'attendais pas. Elle m’a dit qu’elle avait aussi avorté quand elle avait mon âge. 

 

Depuis, j'essaye tant bien que mal de garder ce lien que j'ai eu tant de peine à construire avec ma mère. Quand on parle avec ma mère, c'est encore très gênant parce que ce n'est pas naturel. Je me force à le faire. Je me dis que si elle avait été là pour moi quand mon ex-copain me frappait, m'isolait ou m'imposait des choses, j'aurais fait de meilleurs choix. C'est pour ça que je m’efforce à garder ce lien. 

Maintenant, j’essaye de passer à autre chose dans ma vie, mais il y a ce problème de vaginisme qui persiste, ainsi que ce manque d'estime de moi dans ma nouvelle relation amoureuse. Mon corps ne veut pas passer à autre chose. Ça m'énerve parce que c'est comme si je dépendais toujours de cette personne. J’ai parlé de tout ça à mon nouveau compagnon. Il a très bien réagi. Il m'a dit que ce n’était pas de ma faute et qu’on prendra notre temps. Ce que je ressens le plus, c’est de la colère envers moi-même, parce que je ne me suis pas libérée assez tôt. On peut se libérer, même si ça paraît impossible. "