Leur fils souffre de troubles envahissants du développement : "Il faut l'accepter"

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Léa Beaudufe-Hamelin
Souffrant de troubles envahissants du développement (TED), Rémi suit ses cours au collège accompagné d’une assistante de vie scolaire. Ses parents, Marie et Alain, expliquent à Olivier Delacroix comment ils abordent les difficultés rencontrées par leur fils en l’accompagnant dans son quotidien.
TÉMOIGNAGE

Rémi a 13 ans et souffre de troubles envahissants du développement (TED) qui affectent ses capacités de socialisation et engendrent chez lui des angoisses. Malgré tout, il va au collège et parvient à suivre une scolarité normale grâce à l’aide et la présence indispensable de son assistante de vie scolaire. Aujourd’hui, Rémi va mieux et a progressé à l’école. Ses parents, Marie et Alain, racontent à Olivier Delacroix comment les troubles de leur fils bouleversent leur quotidien et leur vie de couple.

Marie évoque son inquiétude quand Rémi est entré au collège : "On avait très peur à son entrée en sixième. On se disait qu’il n’allait pas s'adapter, mais ça se passe plutôt bien. On a tout fait pour que ça se passe bien. On s'est battus pour qu'il ait une auxiliaire de vie. Tous ses professeurs font des efforts et adaptent leur cours. Nous avons aussi adapté nos horaires. Il est externe, donc il ne subit pas la pression de la cantine avec le bruit et la foule. Il a un aménagement confortable qui lui permet d'évoluer. On calque notre vie sur la sienne. 

On a été bien entourés pour sa scolarisation. L'auxiliaire de vie est essentielle. Elle est là pour l'aider et pour reformuler ce qu'a dit le professeur. Quand Rémi est fatigué, parce qu'il lui arrive de se déconcentrer, elle prend des notes à sa place. Il a besoin d'une présence physique et d'être sécurisé. Au collège, c'est pareil. Il faut qu'il ait cette présence à côté de lui. C'est un lien essentiel pour que ces enfants aient une vie sociale, réussissent à progresser et évoluent. C'est un métier-clé qu'il ne faut pas sous-estimer. C'est important, même vital, pour certaines familles. 

" On nous a pris pour des parents maltraitants "

Marie se souvient des premières manifestations des troubles de son fils : "Quand il est entré en moyenne section de maternelle, les enseignants ont tiré la sonnette d'alarme en nous disant qu’il y avait un problème. Il ne s'intégrait pas au groupe, s'allongeait dans un coin et se mettait en retrait. Il avait peur du bruit et quand les autres l'approchaient. Les gens se posaient des questions. Je pense qu'on nous a pris pour des parents maltraitants dans un premier temps".

"On nous a posé beaucoup de questions. C'était normal de la part d'un enseignant. Il y avait beaucoup de petits détails qui faisaient qu'on devait envisager tout un suivi thérapeutique, avec des ateliers pour lui apprendre à entrer en contact avec les autres et un suivi individuel avec un pédopsychiatre. On nous a d'abord parlé de troubles autistiques. Quand il a été un peu plus grand, ça a été des troubles psychotiques. Mais les troubles psychotiques sont également des troubles autistiques. Aujourd'hui, on nous parle de troubles envahissants du développement. Il n'y a pas de définition précise." Alain, le père de Rémi, poursuit : "La chose qui lui déclenche ses troubles peut être quelconque. Ça peut être une mauvaise pensée, un bruit ou une personne qui l'inquiète. N'importe quelle chose peut le faire basculer dans ce trouble."

" Il y a eu une période où on aurait pu se séparer "

Les troubles de Rémi affectent leur couple, confie Marie : "À cause de toutes ses angoisses, il a des obsessions. C'est un enfant qui peut répéter dix fois la même chose en une demi-heure. C'est usant. On prend sur nous. Ça se retourne parfois sur les relations de couple puisqu'on se focalise sur cet enfant qui demande plus d'attention. On délaisse forcément l'autre. Il y a eu une période où j'étais prête à partir et où on aurait pu se séparer. Je suis restée pour Rémi. Mais maintenant avec le recul, j'ai l'impression que notre couple est plus fort et que ça nous a rapprochés."

Quand les troubles de Rémi ont été diagnostiqués, sa mère a d’abord culpabilisé, explique-t-elle : "Je culpabilisais beaucoup parce que j'avais eu une grossesse difficile, je ne me sentais pas prête à avoir un enfant. Je me disais que c’était de ma faute et qu’il était comme ça parce qu'il a ressenti in utero que quelque chose n'allait pas. On me disait que c’était de naissance, sans me donner d'explication valable. Ce sont des questionnements qui minent quand on ne sait pas quelles sont les causes.

Je pense que la plupart des parents réagissent de la même façon, en culpabilisant et en se disant qu’on n'a pas fait ce qu'il fallait faire. On me dit que c’est de naissance parce qu'il est né avant terme et a été privé d'oxygène pendant un moment. Beaucoup de choses m'ont rassurée. Je me suis dit que c'est la nature qui a voulu ça. On fait avec et on se dit c'est comme ça. Donc maintenant, il faut faire en sorte que ça aille le mieux possible."

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Rémi raconte comment il vit avec ses troubles : "Niam, c’est un ami imaginaire que j’ai créé pour m'amuser quand je suis tout seul. J'aimais bien m'amuser tout seul dans mes pensées. J’ai des troubles envahissants du développement. J’ai des angoisses, des croyances pas possibles. C’est comme si mes pensées me forçaient. Ça me fait du bien d’avoir progressé. Ça veut dire que je peux peut-être réussir ma vie et avoir un bon métier. J'aimerais bien être infographiste."

" On a fini par l’accepter, même s’il y a des moments difficiles "

Face aux difficultés de Rémi, Marie se souvient qu’elle et son mari n’ont pas réagi de la même façon : "On n'en parlait pas au début. J'avais l'impression qu'Alain ne voulait pas en entendre parler, qu'il niait, qu'il ne se sentait pas concerné. J'ai eu l'impression de tout prendre sur moi. Mais ce n'était pas ça." Alain reprend : "Je ne l’éprouvais pas oralement. J'étais en réflexion. Je me suis dit que le monde ne s'arrêtait pas là, que c'était une étape. Qu'il fallait rebondir et continuer."

Marie acquiesce : "Il faut l'encaisser, le digérer et l'accepter. Au bout de quelques années, on a fini par l’accepter, même s’il y a des moments de tension et des moments difficiles. Maintenant, quand il est en crise, il nous fait des reproches. Ça s'est transformé au fil des années. C’est la crise d’adolescence. Parfois je lui dis : 'Trouve-toi une famille d'accueil, ça nous fera des vacances.' Il y a quelques années, on n'aurait pas réagi comme ça. On ne pouvait pas." Alain poursuit : "On le dit quand on sent qu'il peut l'accepter. Il y a des moments où il n’est vraiment pas bien et où on sait qu’il faut le réconforter."

" On essaye de voir l’avenir en rose "

Marie évoque le futur de Rémi : "On essaye de voir l’avenir en rose, mais on ne sait pas. Il faut voir au jour le jour comment il évolue et tout mettre en œuvre pour qu'il évolue le mieux possible. On n’anticipe pas sur le long terme parce que ça peut changer du jour au lendemain. À la fin de l'année scolaire, on peut très bien nous dire que la scolarité, c’est terminé pour lui parce qu’il n’est plus capable de suivre". "On est plus forts. On est capables de faire front à des situations complexes." remarque Alain. "C'est grâce à Rémi qu’on a pris autant d'assurance. C’est un moteur", conclut sa mère.