Les jardins partagés, ces "lopins pour pauvres" devenus potagers en vogue

Paris compte une cinquantaine de jardins partagés.
Paris compte une cinquantaine de jardins partagés. © PATRICK HERTZOG / AFP
  • Copié
Ugo Pascolo
Au micro de Wendy Bouchard, Alain Baraton, jardinier en chef du Grand Parc du château de Versailles, et Hervé Brunon, historien des jardins et du paysage, reviennent sur l'histoire et le succès de ces lopins de terre devenus bien plus que des potagers.
LE TOUR DE LA QUESTION

"Il y a un siècle, les Anglais appelaient les jardins partagés 'les lopins des pauvres'". Invités de Wendy Bouchard lundi, Alain Baraton, jardinier en chef du Grand Parc du château de Versailles et Hervé Brunon, historien des jardins et du paysage, ont fait le point sur l'histoire et le succès actuel ces espaces, où l'on peut venir gratuitement bêcher un coin de terre, alors que quatre Français sur cinq vivent dans une zone urbaine. 

Bêcher pour éviter la boisson. "L'histoire des jardins partagés remonte à l'Abbé Lemire [Jules-Augsute Lemire, 1853-1928, ndlr] qui avait l'intention d'éloigner les hommes des bistrots", explique Alain Baraton sur Europe 1. "Il s'était dit qu'en leur permettant de venir cultiver leur propre terre, ils allaient peut-être se détourner de la boisson. On peut donc dire que les jardins partagés sont nés en France". Après un bref oubli durant les deux guerres mondiales, le jardin partagé refait progressivement surface. Aujourd'hui, "il a pris ses quartiers dans les grandes villes. Paris en compte par exemple une cinquantaine", assure Alain Baraton.

>> De 9h à 11h, c’est le tour de la question avec Wendy Bouchard. Retrouvez le replay de l’émission ici

"Des lieux de vie et de partage". "Le propre des jardins partagés est que ce sont des lieux de citoyenneté, fondés sur la dimension collective", précise Hervé Brunon. "Ils sont pris en charge par un groupe de personnes qui s'engagent à jardiner ensemble. Les jardiniers sont des citoyens, et quand ils ouvrent le lieu au public, par exemple deux jours par semaine, les visiteurs peuvent y venir librement", ajoute l'historien. "Le comportement des gens y est extraordinaire", lance de son côté le jardinier en chef du Grand Parc du château de Versailles. "Une femme voilée va converser avec une chic Parisienne qui, en temps normal, n’aurait pas supporté la cohabitation. Là, elles discutent, les enfants jouent entre eux et les hommes s’échangent des conseils. Ce sont des lieux de vie et de partage, il n'y a pas cet esprit de repli sur soi : on peut faire participer la famille et même partager les récoltes".

Des jardins qui prennent de la hauteur. Si ces jardins partagés apparaissent un peu partout dans les recoins des grandes villes, dernièrement, ils ont pris de la hauteur en poussant aussi sur les toits, au cœur de la ville. Un mouvement qui témoigne du besoin de nature des Français. A Paris, des ruches sont apparues sur le toit de l'Opéra Garnier. Celui de l'Institut du monde arabe va bientôt se couvrir de safran. Bref, de plus en plus, les potagers poussent au-dessus de nos têtes. "Oui, il y a finalement une inventivité permanente dans les jardins, la 'ville verte' est une expression qui dit bien ce qu'elle veut dire", conclut avec satsifaction Hervé Brunon.